DERAEDT, Lettres, vol.4 , p. 133

14 nov 1862 Nîmes BARAGNON_NUMA

Il le prie de mettre fin à une polémique où il n’a été que trop question de lui. – Les propos de M. Roucole. – Ballivet.

Informations générales
  • DR04_133
  • 1859
  • DERAEDT, Lettres, vol.4 , p. 133
  • Brouillon autogr. ACR, AL 7; D'A., T.D. 34, n. 7, pp. 141-142.
Informations détaillées
  • 1 COLLEGE DE NIMES
    1 POLEMIQUE
    2 BALLIVET, CHARLES-EMILE
    2 BARAGNON, MADAME NUMA-PIERRE
    2 BASILE
    2 PIEYRE, ADOLPHE
    2 ROUCOLE, JEAN-BAPTISTE
    2 SOUSTELLE, FERDINAND
    3 NIMES
    3 ROME
  • A MONSIEUR NUMA BARAGNON
  • BARAGNON_NUMA
  • Nîmes, 14 nov[embre] 1862.
  • 14 nov 1862
  • Nîmes
La lettre

Je viens vous prier mon cher ami de mettre un terme à une polémique(1) où il était trop question de moi. Je tiens pourtant à vous remercier de la verve et du talent, que vous avez mis à repousser certaines injures dont j’ai été l’objet. Je ne croyais pas que, parmi mes très nombreux défauts, on dût ranger ceux de Basile; mais on apprend toujours quelque chose et me voilà renseigné sur mon propre compte.

On m’a dit: pourquoi ne pas poursuivre devant les tribunaux des insultes si transparentes? Pourquoi? Parce que je ne me sens point atteint. Il est des inculpations qui me flattent, à l’égal des éloges de mes meilleurs amis; c’en est la contre-épreuve. Parmi ceux à qui l’on peut plaire, il y a longtemps que j’ai fait mon choix.

Et puis, suis-je bien Basile? Consultez votre directeur et répondez. Dimanche, je sortais de la cathédrale, un Monsieur m’arrête. « Monsieur, à qui ai-je l’honneur de parler? – Je suis Roucole. » Comme je n’ai pas l’honneur de connaître M. Roucole(2), je lui demande pardon pour ce qui va suivre, si je n’ai pas eu à faire à lui. – « Je tenais à vous déclarer dans la rue, car je ne serais pas allé chez vous, (il me le répéta plusieurs fois), que l’Opinion du Midi a étrangement dénaturé une insinuation, qui, loin de s’appliquer à vous et à votre établissement, s’adressait à M. Soustelle(3) et au bureau de son journal. – Mais, Monsieur, les paroles sont si claires. – Monsieur, je puis vous assurer que, si j’avais voulu parler de l’Assomption, j’aurais dit que l’on y avait mis M. Baragnon non pas en sevrage, mais en nourrice. » Ainsi me voilà obligé de me croire chef d’un établissement de nourrices et que Madame votre mère m’a confié le soin de vous faire donner à téter.

Que le bureau de l’ Opinion est une maison de sevrage, passe pour tout cela. Suis-je obligé de croire, parce que M. Roucole me l’affirme, que M. Soustelle est bonne? Toutefois, comme je n’ai pas l’honneur de connaître M. Roucole, si ce n’est pas lui que j’ai rencontré près de la cathédrale, je lui fais mes plus humbles excuses de lui attribuer à tort les choses étonnantes qu’il m’a fallu écouter jusqu’à la rue de la Madeleine, et, pour peu qu’il réclame, je suis prêt à les attribuer à un très mauvais plaisantin.

Laissez-moi ajouter que j’ai trouvé votre appel à la mémoire de votre camarade Ballivet(4) heureux sous tous les rapports; il sert votre cause, sans doute, mais c’est un vrai souvenir du coeur. Il faut plaindre ceux qui ne peuvent comprendre certains accents.

Adieu, cher ami. Tout à vous.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
Vous pouvez faire de ma lettre l'usage que vous voudrez.1. Cette polémique entre le *Courrier du Gard* et l'*Opinion du Midi* durait depuis le retour de Rome de la "caravane nîmoise". Le P. d'Alzon intervient parce que son établissement a été mis en cause.
2. J.B. Roucole, secrétaire de rédaction au *Courrier du Gard*. - A. PIEYRE, *Histoire de la Ville de Nîmes*, t. 2, p. 326, Nîmes, 1886, raconte que le 14 novembre 1862 (le jour où le P. d'Alzon écrivit notre lettre), M. Roucole envoya ses témoins à N. Baragnon qui, conformément à ses opinions religieuses, refusa le duel. [Basile est le personnage du "Mariage de Figaro", type du sot calomniateur, du complaisant mercenaire et cupide].
3. Propriétaire de l'*Opinion du Midi*.
4. Emile Ballivet, ancien élève de l'Assomption, mort en 1855.