DERAEDT, Lettres, vol.5 , p. 346

22 jun 1865 Le Vigan MENU Camille-Stanislas ra

Moi aussi je sais ce que c’est que les nerfs. – La poudre de valériane. – Je vais préparer une nuit d’adoration à nos Bulgarettes. – Priez pour cette oeuvre.

Informations générales
  • DR05_346
  • 2557
  • DERAEDT, Lettres, vol.5 , p. 346
  • Orig.ms. AC R.A.; D'A., T.D. 35, n. 12, pp. 13-14.
Informations détaillées
  • 1 ADORATION DU SAINT-SACREMENT
    1 COLERE
    1 INTEMPERIES
    1 MALADES
    1 MALADIES
    1 OBLATES
    1 REMEDES
    1 SOUFFRANCE
    3 CHARENTON-LE-PONT
  • A SOEUR CAMILLE-STANISLAS MENU
  • MENU Camille-Stanislas ra
  • Le Vigan, 22 juin 1865.
  • 22 jun 1865
  • Le Vigan
La lettre

D’abord je ne suis point au lit, ma chère enfant; puis, je n’en écris pas mieux pour cela, et si vous pouvez me déchiffrer, vous aurez du mérite. Voyez comme je suis bâti! Je serais tenté de vous dire: Impatientez-vous donc de temps en temps, afin que j’aie le plaisir de recevoir de temps en temps de vos lettres. Bénie soit la poudre de valériane, dont l’ordonnance me vaut votre épître! Non, je ne vous enverrai pas prendre l’air de Charenton. Hélas! moi aussi, je sais ce que c’est que les nerfs. Figurez-vous qu’il m’arrive quelquefois, pas souvent, mais enfin quelquefois, de me réveiller en colère. Contre qui et contre quoi? Pour cela je n’en sais rien. Que c’est humiliant, n’est-ce pas? Eh bien, je suppose que ma fille Camille est un peu comme cela. Aussi je la plains de toute mon âme, à condition qu’elle me plaindra un peu. Hélas! mon enfant, il faut que nous prenions notre parti. Nous sommes des gens nerveux. Et moi qui n’ai pas le temps de l’être, et qui suis obligé de m’arrêter en mille circonstances pour laisser passer mes nerfs!

Tout ceci est pour vous dire que je me mets à votre place, que je me rends parfaitement compte de tout ce que vous souffrez, que j’y compatis, que j’espère que cela vous fera du bien, parce que j’ai éprouvé que quand on avait un peu compassion de moi, je me trouvais rafraîchi comme un pré après un orage. (Il vient d’en faire un, c’est ce qui m’inspire la comparaison, assez jolie du reste). Nota. Il vient de faire un orage et non pas un pré: la phrase est amphibologique, mais vous l’auriez comprise. Bref, nous avons des nerfs, c’est le plus clair de votre histoire et de la mienne. Et, après tout, prendre de la poudre de valériane est moins pénible que d’autres choses par où l’on veut me faire passer. Par exemple, je vous remercie de m’apprendre que la valériane se donne aux gens qui tombent du haut mal, ce que j’ignorais, et aux gens qui approchent de la cinquantaine. J’ai 55 ans sous peu, et je n’en ai pas encore pris.

Je vous quitte pour aller préparer une nuit d’adoration à mes Bulgarettes. Priez un peu pour cette oeuvre et croyez-moi bien vôtre en Notre-Seigneur.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
Quand les nerfs ne me tracassent plus, je suis en général honteux de ce qu'ils m'ont fait dire ou faire. Etes-vous comme moi? Je prierai de bien bon coeur à toutes vos intentions, et je vous demande pardon de ne vous avoir pas plus tôt répondu, mais j'étais souffrant et obligé d'écrire par petites doses.