DERAEDT, Lettres, vol.6 , p. 19

31 jan 1866 Paris CORRENSON_MERE Emmanuel-Marie

Ce que je voudrais devenir. – L’oeuvre du P. Pernet. – L’abbé Girodon. – Il va recevoir Louis Veuillot à déjeuner.

Informations générales
  • DR06_019
  • 2741
  • DERAEDT, Lettres, vol.6 , p. 19
  • Orig.ms. AC O.A.; Photoc. ACR, AH 403; D'A., T.D. 29, n. 52, pp. 58-59; QUENARD, pp. 40-41.
Informations détaillées
  • 1 DESIR DE LA PERFECTION
    1 ESPRIT DE L'ASSOMPTION
    1 PETITES SOEURS DE L'ASSOMPTION
    1 TRIPLE AMOUR
    2 BEVIER, MARIE-AUGUSTINE
    2 GIRODON, ABBE
    2 PERNET, ETIENNE
    2 SABRAN, HELENE
    2 VEUILLOT, LOUIS
    3 PARIS, SEMINAIRE SAINT-SULPICE
  • A MADEMOISELLE MARIE CORRENSON
  • CORRENSON_MERE Emmanuel-Marie
  • Paris, 31 janvier 1866.
  • 31 jan 1866
  • Paris
La lettre

Que devient ma chère fille? Voilà ce que je me demande souvent. Comme je ne reçois pas de réponse à cette question, voulez-vous que je vous dise ce que je voudrais devenir? C’est une petite confidence de coeur, dont vous profiterez pour prier un peu plus pour moi.

Je voudrais être un homme de foi, d’oraison, de foi [sic], de véritable humilité; un religieux pénétré de l’esprit de sacrifice; grave dans le sens vrai du mot; par-dessus tout, surnaturel dans ses moindres intentions, sa tenue, sa conduite, ses paroles, son action; un supérieur préoccupé du devoir de développer et de sanctifier sa famille spirituelle en charité, union, piété, amour de N.-S., de la Sainte Vierge, de l’Eglise, selon la perfection des conseils évangéliques et du zèle apostolique. Eh bien! ma fille, je ne suis rien de tout cela. Pourtant, quand j’examine ce que nous pourrions faire, si nous avions un peu le zèle de la cause de Dieu, vraiment je suis épouvanté. Je fais parfois des rêves à la Soeur M.-Augustine, et je me perds dans des aspirations qui ne se réaliseront jamais.

En attendant, Dieu semble nous bénir par le peu de bien que nous faisons aux pauvres. Figurez-vous que le P. Pernet a fondé une Association de quelques pauvres filles, vivant absolument de la charité, se consacrant à être Soeurs garde-malades, sans recevoir un sou de rétribution de leur part. Ce sont les Petites-Soeurs des pauvres, mais à domicile(1).

Avez-vous assisté au mariage d’Hélène(2)? Son beau-frère, l’abbé Girodon, est un des élèves les plus distingués de Saint-Sulpice. Je dois l’avoir probablement à déjeuner mercredi prochain, avec quelques autres séminaristes qui désirent connaître M. Veuillot; je compte le leur servir.

Adieu, chère enfant. On me dérange et je n’ai pas le temps de me relire.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. C'est la première allusion à l'oeuvre du P. Pernet dans les lettres du P. d'Alzon. Sans doute ce dernier n'ignorait-il pas l'intérêt que le P. Pernet portait aux pauvres (voir *Lettre* 2515 n.), mais il était loin de se douter - on le sent au ton étonné et admiratif à la fois de sa phrase - de ce que son disciple venait d'imaginer à leur service. Voyez sa réponse aux voeux du P. Pernet au début de cette année (*Lettre* 2719): il y émet le voeu que Dieu lui fasse trouver beaucoup de bonnes vocations, mais ce n'est pas du tout aux filles du P. Pernet qu'il songe, mais à son propre noviciat du Vigan... Le responsable de cette ignorance est le P. Pernet lui-même. Dans ses lettres à son supérieur ou à ses confrères, jamais il n'est question de lui-même. "Il encombre si peu les autres de sa personnalité et de ses oeuvres, a écrit une de ses biographes, qu'un prêtre apprenant par une religieuse que le P. Pernet était leur fondateur s'exclama avec étonnement: "Comment, c'est votre fondateur! Je le connais depuis l'âge de dix-neuf ans, je suis en correspondance intime avec lui et j'ignorais votre existence." (*Etienne Pernet 1824-1899*, p. 28, Paris, 1962).
2. Hélène Sabran.