DERAEDT, Lettres, vol.6 , p. 137

1 sep 1866 Nîmes MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Je n’ai pu donner à l’évêque que la partie de vos constitutions dont je disposais. – Je vais demander au cardinal Pitra de parler à Quaglia de façon à ce que les choses s’arrangent sans passer par Chaillot. – Un moyen de poser la question des mutations. – Voyez M. Ratisbonne. – Il serait dommage que vous retiriez Soeur M.-Madeleine. – De possibles remplaçantes. – Le bonnet et la ceinture des Oblates. – Un bien résultera de tout cela. – A propos de diverses religieuses.

Informations générales
  • DR06_137
  • 2872
  • DERAEDT, Lettres, vol.6 , p. 137
  • Orig.ms. ACR, AD 1418; D'A., T.D. 23, n. 892, pp. 220-223.
Informations détaillées
  • 1 CEINTURE AUGUSTINIENNE
    1 CONGREGATION DE LA PROPAGANDE
    1 CONSTITUTIONS DES RELIGIEUSES DE L'ASSOMPTION
    1 DEPARTS DE RELIGIEUX
    1 ECONOMAT
    1 EVEQUE
    1 FRANCHISE
    1 HABIT RELIGIEUX
    1 NOMINATIONS
    1 OBLATES
    1 POLEMIQUE
    1 RETRAITE DES RELIGIEUX
    1 VOILE
    2 BAILLY, VINCENT DE PAUL
    2 BARDOU, THERESE DE LA CONCEPTION
    2 BOSC, FRANCOIS DE SALES
    2 BRUN-VILLARET, FELICITE
    2 BURE, MARIE-JULIENNE DE
    2 CABRIERES, ANATOLE DE
    2 CHAILLOT, LUDOVIC
    2 COURCY, MARIE-GABRIELLE DE
    2 EVERLANGE, MARIE-EMMANUEL D'
    2 GONTIER, MARIE-LAURENCE
    2 GOUY, MARIE DU SAINT-SACREMENT DE
    2 HUGUES, MARIE DES ANGES
    2 PETER, MARIE-MADELEINE DE
    2 PITRA, JEAN-BAPTISTE
    2 PLANTIER, CLAUDE-HENRI
    2 QUAGLIA, ANGELO
    2 RATISBONNE, THEODORE
    2 REGIS, EULALIE DE
    2 ROUSSEAUX, MARIE DU SACRE-COEUR
    2 SAUGRAIN, HIPPOLYTE
    2 VERON, PAUL
    3 AUTEUIL
    3 NIMES
    3 PARIS
    3 ROME
    3 VIGAN, LE
  • A LA MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • Nîmes, 1er sept[embre 18]66.
  • 1 sep 1866
  • Nîmes
La lettre

Ma bien chère fille,

Je comptais trouver ici les Constitutions que vous m’aviez annoncées(1). Ayant avancé de dix à douze jours mon retour à Nîmes pour pouvoir causer avec l’évêque, j’eusse été bien aise de les avoir complètes. Je lui ai remis ce que vous m’avez laissé sur le gouvernement, lui faisant observer que ce n’est qu’un projet. Du reste le P. Vincent de Paul, qui est parti cette nuit pour Paris, vous portera une lettre de lui.

Je vais écrire au cardinal Pitra de parler à Quaglia, de façon à ce que les choses s’arrangeront sans passer par Chaillot. Je pense que plus vous attendrez, mieux cela vaudra. Qu’aurons-nous après le 15 septembre?

Si vous persistez à me redemander la Mère M.-Madeleine, ce dont je vous parlerai sur une feuille pour ne pas brouiller les affaires, voici une idée que je vous soumets, c’est de m’envoyer une de celles dont M. V[éron] est le plus coiffé. Vous le prévenez, il refuse. Comme je l’accepterai au moins pour quelque temps, la lutte s’engagera sur le terrain du droit qu’ont les évêques de traiter directement avec vous. Toutefois pour répondre à la question que vous m’adressez au sujet des changements et envois de Soeurs dans les maisons particulières, voici un mode que je préférerais. Ce serait une lettre à peu près ainsi conçue:

M. le sup[érieur],

J’ai l’honneur de vous adresser la liste des Soeurs que je compte envoyer d’Auteuil dans les maisons particulières. Toutefois je ne puis vous dissimuler que NN. SS. les évêques de ces maisons, qui me laissent toute liberté pour les changements, ou avec lesquels je traite des changements dans des termes où leur autorité ne se fait point sentir, pourront, s’ils viennent à apprendre les conditions que vous m’avez imposées, se plaindre à Rome de ce que les conditions tout autres qu’ils connaissaient, quand les maisons particulières ont été fondées, sont changées par vous. Je ne vous dis ceci que pour éviter des conflits toujours pénibles.

Une lettre dans ce sens, mieux tournée par vous, serait une bonne chose. Ou il accordera tout, et vous aurez l’avantage de faire les changements comme vous l’entendrez; ou il vous répondra à sa façon, mais dans ce cas il ne peut que vous donner barre sur lui, et ce sera à vous à tirer tel avantage que vous voudrez; ou il ne répondra rien, et vous en conclurez qu’il renonce à ses exorbitantes prétentions. Vous êtes à même d’être soutenue par tous les évêques et par Rome dans un pareil combat. De plus, vous vous placez sur un terrain où vous n’avez plus d’acte de soumission à faire envers lui.

Je crois que vous ferez bien de voir M. Ratisbonne(2), mais il vous est très difficile de prendre le même mode d’approbation que lui, puisqu’ayant des Soeurs dans les missions, il a pu se faire autoriser à la Propagande. Je me tiens prêt à aller à Rome, dès le mois de décembre, s’il le faut, mais je ne sais pourquoi je me figure que c’est au printemps que la difficulté s’aplanira.

Adieu, ma chère fille. Voyez si vous pouvez m’envoyer les Constitutions par la grande vitesse.

La proposition de prendre Soeur Marie-Madeleine m’étonne en ce moment. Voici pourquoi. Un des sujets de conflit était une certaine Soeur Félicité, excessivement capable, que la Mère M.-M[adeleine] m’a refusé au commencement de prendre pour économe ou plutôt pour dépensière, et qui, à la fin acceptée par elle, a fait des économies assez fortes en nourrissant bien mieux les Oblates. J’ai cru faire un coup de maître en la prenant pour Nîmes, malgré les cris du P. Hipp[olyte], mais il paraît qu’à la fin la Mère M.-Madeleine ayant consenti à reconnaître sa capacité, a été dans l’embarras, parce que réellement elle lui était utile. Elle ne m’en a rien dit à moi, mais elle en a parlé à quelques personnes.

J’ai eu avec elle de bonnes explications; je l’ai engagée à venir faire sa retraite au prieuré, elle a accepté avec joie, et comme j’ajoutais: « Quand on vit dans l’isolement où vous êtes, on a quelquefois besoin de se dégonfler. – Oh! mon Père, reprit-elle avec vivacité, quand on s’est dégonflé comme vous m’avez permis de le faire avec vous, on n’a plus besoin de rien ». Je croirais funeste à l’oeuvre de la changer, car quelquefois j’ai dit au P. Hip[polyte]: « Eh bien, nous demanderons une autre supérieure », il m’a toujours conjuré de bien m’en garder. Maintenant si vous la prenez, quoique cela me soit pénible, je vous ferai trois demandes bien différentes: Ou Soeur M.-Julienne, qui est une bonne et sainte religieuse et qui reviendra à Nîmes, après avoir été quelque temps encore au Vigan. Ou Soeur M.-Emmanuel, pour vous en débarrasser. Je crois que le P. Hip[polyte] la fera marcher et qu’elle se trouvera ensuite bien mieux avec vous. Ou Soeur M. des Anges, si vous ne la croyez pas trop pleine de défauts. Je la préfère à Soeur François de Sales. Voilà, ma fille, ma pensée.

M. de Cabrières m’a dit que vous seriez bien aise de le voir, vers le 25 septembre, pour la profession de Soeur M.-Laurence. J’appuierai auprès de l’évêque ou n’appuierai pas, selon que vous désirerez qu’il vienne ou ne vienne pas. Le bonnet de Saint-Léonard(3) n’est pas encore arrivé, de façon qu’obligé de prendre un parti j’ai fait arranger quelque chose qui me semble bien. C’est un voile assez semblable à celui des Soeurs de Nevers, sauf l’horrible bavette. Je leur ai donné la ceinture en cuir.

Adieu, ma chère fille. Je prie sans cesse pour vous. Somme toute, je vous assure que je vois un bien résulter de tout cela. Quelques filles partiront, et je crois que vous devez commencer à préparer la chose, de façon à ce qu’elles s’éliminent, de peur d’être éliminées. La tyrannie de M. V[éron] passera, et si elles ne sont plus soutenues par lui, je crois que leur situation sera insoutenable. Je croirais très utile que la Mère Marie du Saint-Sacrement vînt faire sa retraite ici, mais c’est à vous à en juger(4).

Soeur M. du Sacré-Coeur est très froide depuis quelque temps. Soeur Thérèse de la Conception a de petites antipathies pour Mère Marie-Madeleine, mais soyez censée ne pas le savoir. Je suis toujours plus content de la Mère M.-Gabrielle. Elle me fait l’effet de devenir tous les jours plus sainte et plus capable. Je n’ai pas cru mal faire de la mettre un peu au courant de ce que je savais de vos affaires, ainsi que la Mère M.-Madeleine.

Notes et post-scriptum
1. Mère M.-Eugénie a annoncé, le 21 août, l'envoi d'une copie des constitutions présentées à Rome afin que le P. d'Alzon pût les montrer à l'évêque de Nîmes. "Puisque M. Véron les annote et les dispute d'un bout à l'autre, que Mgr Chaillot veut tout changer, il serait bon que d'autres parlassent."
2. Marie-Théodore Ratisbonne (1802-1884), fondateur de la Congrégation de N.-D. de Sion en 1843. Mère M.-Eugénie a eu un entretien intéressant avec deux Soeurs du Conseil des Dames de Sion à propos de leurs Règles et elle "a envie de voir M. Ratisbonne pour savoir mieux les choses" (lettre du 30 août).
3. Il s'agit d'un bonnet porté par des religieuses anglaises et que le P. d'Alzon aurait voulu adopter ou adapter pour les Oblates (v. *Lettre* 2826). Mère M.-Eugénie vient de lui écrire (30 août) qu'elle en a expédié les modèles à Nîmes, mais qu'elle les a adressés à Mlle de Régis.
4. Mère M.-Eugénie envoya effectivement Mère M. du Saint-Sacrement à la retraite de Nîmes.