DERAEDT, Lettres, vol.6 , p. 230

Bien cher ami,

Je vais m’occuper de faire ordonner le plus tôt possible le Fr. Barthélemy et le Fr. Alexandre, puis nous verrons. Je vais écrire au P. Francesco(1). Votre projet pour Andrinople me semble parfait(2). Dans ce cas, je regretterais bien que vous n’ayez pas un religieux de plus, [le] Fr. Barthélemy; tout serait parfait; mais [le] Fr. Alexandre suffirait-il pour Philippopoli? Au moins pour quelque temps, j’autorise les Frères à réciter l’office de la Sainte Vierge. Je crois qu’il faudra revenir aux Oblats(3). Faites donc prier pour que les fonds nous arrivent. Addio, cher. Je suis écrasé de demandes. Mille fois vôtre.

Vous aurez d’excellentes filles dans 18 mois. Tout vôtre en N.-S.

E.D'ALZON.

1. Administrateur du vicariat pendant la vacance du siège. Le P. Galabert souhaite que le P. d'Alzon lui fasse part de sa désignation comme conseiller de Mgr Raphaël, de son prochain départ pour Andrinople, où il compte se rendre pour Pâques (lettre du 1er mars) et de l'arrivée dans un avenir pas trop lointain de son successeur à Philippopoli.
2. Voici ce qu'écrit le P. Galabert: "A Andrinople, dans les premiers temps, les plus grandes difficultés viendront du côté des Rév. PP. Polonais. Ces bons Pères n'ont pas encore pu organiser une école passable. Mgr Raphaël compte sur moi pour cela; et d'un autre côté l'intérêt de la religion me fait un devoir d'éviter tout ce qui pourrait faire croire que je vise à substituer notre congrégation à la leur, comme me le recommande Mgr Brunoni dans ses instructions." (1er mars). Le P. d'Alzon approuve donc tout à la fois l'idée d'une aide à apporter à Mgr Raphaël pour l'organisation d'une école (où il voit la première pierre du séminaire auquel il tient tant) et la façon d'agir en toute loyauté et charité envers les Pères Résurrectionistes que préconise le P. Galabert. Les instructions de Mgr Brunoni au P. Galabert ne sont en fait qu'une approbation donnée à la ligne de conduite que s'est donnée le fondateur de la mission assomptioniste en Orient. Ecoutons en effet ce que Mgr Brunoni a écrit à ce dernier le 18 février: "Quant à vos instructions je vous rappellerai ce que vous écriviez naguère vous-même: 1° Assister le prélat de vos conseils avec prudence et sans sembler vouloir les lui imposer 2° Servir, pour ainsi dire, de trait d'union entre le clergé bulgare et les Pères Résurrectionistes et surtout éviter tout ce qui pourrait faire penser que vous visez à substituer votre communauté à la leur 3° Enfin avoir beaucoup de ménagements vis-à-vis des Pères Conventuels."
3. Ce nom d'Oblats n'apparaît que deux fois dans l'ensemble des écrits conservés du P. d'Alzon: dans une lettre du 6 février 1856 et ici, où une erreur de transcription a bien failli le faire passer inaperçu (les T.D. ont transcrit *Oblates*, mais le ms est formel). En 1856, il est question des Oblats à l'occasion des pourparlers d'union avec les Pères de Sainte-Croix (voir *Lettre* 618 et n. 2). Lors d'une des réunions préparatoires au chapitre de 1858 qui se tinrent à Clichy en septembre 1857, une liste de préséances situe les Oblats au 13e rang, entre les novices de choeur et les postulants de choeur (Actes des chapitres généraux, ACR, C 31, p. 25). Le chapitre de 1862 décidera de n'en plus recevoir à l'avenir (C 31, p. 60). Les frères Oblats se distinguaient des frères convers en ce qu'ils avaient leur place au choeur (v. TOUVENERAUD, *Premières Constitutions*, p. 83 en note). - On comprend dès lors la réflexion du P. d'Alzon qui vient précisément d'accorder aux Frères de Philippopoli la permission demandée pour eux le 3 janvier par le P. Galabert, de réciter l'Office de la Sainte Vierge "plutôt que leurs Pater et Ave".