DERAEDT, Lettres, vol.6 , p. 364

9 sep 1867 Le Vigan PICARD François aa

L’administration de certains fonds. – L’argent fourni par Mme la Supérieure est-il un prêt qu’elle me fait ou un remboursement effectué par vous? – Le P. Vincent de Paul est un très saint garçon qui n’a pas fait de noviciat et a besoin de repos. – Le P. Vincent Chaine. – Informez-vous sur le prix des terrains pour les gares.

Informations générales
  • DR06_364
  • 3122
  • DERAEDT, Lettres, vol.6 , p. 364
  • Orig.ms. ACR, AE 253; D'A., T.D. 25, n. 253, pp. 204-206.
Informations détaillées
  • 1 ACHAT DE TERRAINS
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 CRITIQUES
    1 EMPLOIS
    1 EXAMENS SCOLAIRES
    1 GARES
    1 GESTION DES BIENS
    1 INDEMNITES D'EXPROPRIATION
    1 JOURNAUX SCOLAIRES
    1 NOVICIAT
    1 RAPPORT SUR LA SITUATION DE L'ECONOMAT
    1 RELATIONS DU PERE D'ALZON AVEC LES ASSOMPTIADES
    1 SCANDALE
    1 SUPERIEUR
    1 VOEUX DE RELIGION
    2 BAILLY, EMMANUEL
    2 BAILLY, VINCENT DE PAUL
    2 CABRIERES, ANATOLE DE
    2 CART, JEAN-FRANCOIS
    2 CHAINE, VINCENT
    2 DUMAZER, ALEXIS
    2 GERMER-DURAND, EUGENE
    2 MALASSIGNE, ATHANASE
    2 MILLERET, MARIE-EUGENIE
    2 PLANTIER, CLAUDE-HENRI
    2 SAUGRAIN, HIPPOLYTE
    3 LONDRES
    3 MILLAU
    3 NIMES
    3 PARIS
    3 VIGAN, LE
    3 VIGAN, PROPRIETE BAGATELLE
    3 VIGAN, PROPRIETE D'ARENES
    3 VIGAN, PROPRIETE LAVALETTE
  • AU PERE FRANCOIS PICARD
  • PICARD François aa
  • Le Vigan, 9 sept[embre 18]67.
  • 9 sep 1867
  • Le Vigan
La lettre

Bien cher ami,

Je suis très heureux que nous nous rencontrions sur une foule de points, et sans nous être entendus(1); seulement je tiens à relever un point capital. Vous me demandez si j’ai renoncé à la combinaison par laquelle je laissais au P. Hippolyte et au P. Vincent de P[aul] l’administration de certains fonds. Non, si le P. V[incent] de P[aul] reste à Nîmes, parce que je le crois un très habile administrateur; oui, s’il se retire(2). Et comme je sais les ennuis qu’il a eus par manque d’argent, je voudrais me les éviter en prenant mes précautions à l’avance.

En second lieu, l’argent que le P. Vincent de Paul a retiré de la supérieure est à vos yeux un remboursement de ce que je vous ai avancé. Je voudrais à cet égard une indication catégorique. Dois-je rendre à Madame la supérieure, ou bien êtes-vous censé m’avoir payé pour ce qu’elle a fourni? Je désirerais quelque chose de précis à cet égard, afin que si elle réclame, je sache ce que je dois lui répondre. J’avoue que cette situation me paraît bizarre. Elle m’a parlé toujours de cet argent comme d’un prêt qu’elle me faisait. Vous m’en parlez comme d’un remboursement fait par vous. Au fond qu’y a-t-il?

Quant au P. V[incent] de P[aul], c’est un très saint garçon qui n’a pas fait de noviciat. J’avoue que je puis avoir tort de ne pas l’avertir des mesures que je prends, mais j’avoue que je suis à me demander quelles sont ces mesures. La première est, il y a dix-huit mois, l’autorisation de publier de petits journaux(3); la seconde, les examens que j’ai faits au commencement de cette année. Et encore!!! Mais ne l’ai-je pas prévenu? Le P. V[incent] de P[aul] a assez hautement manifesté son mécontentement des journaux, pour que si je voulais récriminer j’eusse beau jeu; mais je me contente de dire que, plus jeune, j’avais les mêmes mécontentements envers Mgr Cart, comme M. de Cabrières les a avec Mgr Plantier, qu’à mon âge cela ne me fait rien. C’est un fait de distraction humaine, voilà tout. Ce qu’il y a de plus curieux, c’est que les jeunes maîtres se plaignent de ce qu’il a juste les mêmes procédés envers eux. Encore une fois, c’est de l’enfantillage. Remarquez que si les jeunes maîtres se sont plaints à lui de certaines choses, c’est qu’ils savaient mon opinion manifestée devant le P. V[incent] de P[aul] et devant eux. Cela change la thèse que vous me développez.

Exemple. L’an dernier, aux vacances, devant moi, M. Durand, le P. Hip[polyte], le P. V[incent] de P[aul], le P. Athanase, le P. Emmanuel, le P. Alex[is], le règlement fut relu, discuté, approuvé, modifié. Après quoi, pendant toute l’année, le P. V[incent] de P[aul] n’a cessé de dire qu’il fallait renverser tout cela. Que voulez-vous que pensent les trois jeunes religieux? Je n’insiste pas. La conclusion, pour moi, est que le P. V[incent] de P[aul] a besoin de repos. Il me semble que s’il va à Paris vers février, vers le printemps vous pourriez aller à Londres.

Le P. Vincent Chaine m’écrit une troisième fois pour demander la dispense de ses voeux. Peut-être pourrait-on l’envoyer à Londres, où il y a deux mois il me demandait d’aller, mais ce serait uniquement pour dire la messe, car c’est une tête qui déménage.

Maintenant question très grave, et pour laquelle je vous ordonne de me procurer tous les renseignements possibles. Sur quel pied les chemins de fer achètent-ils les terrains pour les gares? Après mille hésitations, le Vigan va devenir tête de ligne. La question sera tranchée avant quinze jours, comme au Vigan avant la fin de nov[embre]. Les expropriations seront faites au printemps. Si le Vigan devient tête de ligne, la gare se fait à Arènes, celle [de] mes propriétés qui se trouve entre La Valette et Bagatelle. Il y a là sept à huit hectares, si je ne me trompe. On ferait un pont à une passerelle que vous avez traversée avec moi, il y a deux ans. Je ne crois pas que nous y ayons passé cette année. Par un revirement d’influences, il paraît que l’on renonce au chemin de fer du Vigan à Millau. Ce qui fera gagner énormément le Vigan et ce qui en même temps donnera bien plus de valeur aux terrains. C’est pour cela que si Madame la supérieure g[énéra]le veut acheter ici, il faut qu’elle vienne au printemps et se décide pour quelque chose dans un sens ou dans un autre, car, d’ici à quelques années, les terrains deviendront de plus en plus chers. Avec le chemin de fer, il n’y aura que trois heures au plus de Nîmes au Vigan. Ce n’est réellement presque rien(4).

Adieu, très cher ami. Examinez, pesez et répondez.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Voir *Lettre* 3113, n. 3.
2. Réponse du P. Picard: "J'ai bien réfléchi et je réponds: s'il était permis à un fils de dire à un père qu'il respecte profondément et qu'il aime très tendrement: "vous faites une grosse sottise", je vous le dirais dans toute la conviction de mon âme. Comment pouvez-vous penser en effet à prendre l'administration matérielle du collège? En avez-vous le temps? Les expériences passées ne vous suffisent-elles pas? Ne vaut-il pas mieux consacrer vos forces et votre intelligence à quelque chose de plus élevé? Par là vous userez vos forces et votre santé en efforts inutiles et en dehors, je crois, des desseins du bon Dieu. Quand on peut comme vous, avoir une influence générale, exercer une grande action sur les âmes, on a sa ligne de conduite toute tracée. [...] Pour vous, je vous en supplie, gardez la liberté que vous avez si péniblement conquise. Vous sentirez beaucoup plus la pauvreté et votre vertu y gagnera; vous éprouverez beaucoup moins la gêne et votre action n'en sera que plus libre." [...] Quant à la solution préconisée pour le P. Vincent de Paul, elle est excellente: laisser faire la rentrée et puis prétexter un voyage.
3. Voir *Lettre* 2797 et n. 3.
4. La diligence du soir pouvait mettre près de 12 heures pour faire le trajet du Vigan à Nîmes (v. *Lettre* 3134). De jour, le voyage durait moins longtemps: parti de Nîmes à 6 heures du matin, on arrivait au Vigan entre 1 h. et 2 h. (v. *Lettre* 2494).