DERAEDT, Lettres, vol.7 , p. 32

16 feb 1868 Lavagnac MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Crampes d’estomac. – Faites les mortes pendant un certain temps. – Les *animadversiones*. – Mgr Mermillod. – Je songe à envoyer le P. Picard à Rome en vue du concile. – Il ferait un excellent théologien. – Chaque nature va à Dieu avec elle-même. – Noviciat peu nombreux. – Varia. – Les Soeurs de Charité.

Informations générales
  • DR07_032
  • 3255
  • DERAEDT, Lettres, vol.7 , p. 32
  • Orig.ms. ACR, AD 1472; D'A., T.D. 24, n. 971, pp. 7-8.
Informations détaillées
  • 1 APOTRES
    1 CHEMIN DE FER
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 CONCILE DU VATICAN
    1 CONSTITUTIONS DES RELIGIEUSES DE L'ASSOMPTION
    1 ERECTION DE MAISON
    1 MALADIES
    1 NOVICIAT DES ASSOMPTIONNISTES
    1 PREDICATIONS DE CAREME
    1 RELIGIEUSES DE L'ASSOMPTION
    1 REVENUS DE PROPRIETES
    1 SIMPLICITE
    1 SUPERIEUR ECCLESIASTIQUE
    1 VIN
    1 VOYAGES
    2 BAILLY, VINCENT DE PAUL
    2 ETIENNE, JEAN-BAPTISTE
    2 GAY, CHARLES-LOUIS
    2 JEAN CHRYSOSTOME, SAINT
    2 LEQUETTE, FELICITE
    2 LEQUETTE, LOUISE
    2 MERMILLOD, GASPARD
    2 PICARD, FRANCOIS
    2 SAUGRAIN, HIPPOLYTE
    2 TOUJOUZE, THERESE-MAYLIS
    3 AUTEUIL
    3 GENEVE
    3 PARIS
    3 REIMS
    3 ROME
  • A LA MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • Lavagnac, 16 février 1868.
  • 16 feb 1868
  • Lavagnac
La lettre

Ma bien chère fille,

Je reçois votre excellente lettre et je vous en remercie. J’ai ces jours-ci des crampes d’estomac assez vives, mais cela ne m’empêche pas d’aller.

L’orage qui gronde ne doit plus vous effrayer, du moment que vous avez quelqu’un comme Reims pour vous soutenir. Il faut pendant un certain temps faire les mortes. Que de longtemps aucune affaire ne surgisse; évitez les consultations à l’archevêché, sauf pour les prises d’habit. La demande à Rome d’une maison de noviciat autre qu’Auteuil serait bien importante. Croyez que le lendemain du jour où vous aurez cette autorisation en poche, les fureurs seront terribles intérieurement, mais au dehors on ne dira plus rien. Quoi qu’on dise, on crie parce qu’on a été battu. A lire les animadversiones, c’est clair comme le jour. Pour ces animadversiones, je voulais vous envoyer un petit travail qui est dans ma tête.

En y réfléchissant, je les range en deux catégories, les importantes et les moins sérieuses. Quand il s’agira de traiter l’approbation des règles, vous ferez deux parts et vous obtiendrez tout ce à quoi vous tenez sérieusement en ayant l’air de concéder comme un grand sacrifice les points moins capitaux. Evidemment il y a des choses que l’on n’a pas comprises et d’autres qui sont de vraies bagatelles(1).

Veuillez offrir mes hommages à Mgr Mermillod. Je serais allé à Genève en me rendant à Paris, mais puisque mes affaires m’ont empêché d’aller à Paris, je dois renoncer pour plusieurs mois à aller à Genève. Je serais allé volontiers à Rome pour le concile, mais il eût fallu rappeler le P. V[incent] de Paul. Depuis quelques jours je médite pour savoir si je n’y enverrai pas le P. Picard. Ma profonde conviction est qu’il n’y a peut-être pas de religieux en France qui connaisse mieux la situation des esprits, soit par ses relations à Saint-François de Sales, soit par l’ensemble de ses idées, soit par sa capacité. Si donc après l’avoir fait causer avec Mgr Mermillod, celui-ci pouvait le proposer comme théologien, en mon âme et conscience je le crois trois fois plus capable que M. Gay. Dans la conversation avec Mgr Mermillod, je redouterais, de la part du P. Picard, cette disposition à ne pas entrer du premier coup dans la pensée des gens et à avancer la sienne sans ménagement. Comment feriez-vous sans lui? Mais aussi quelle force n’auriez-vous pas, si votre aumônier allait à Rome!

Je le répète, tant que mes affaires à Nîmes seront où elles en sont, je ne pourrai guère franchir le vol du chapon(2). Laissez les gens qui vous trouvent trop métaphysique en dévotion, chaque nature va à Dieu avec elle-même. C’est là la vraie simplicité. Dans l’immense variété d’anges qui entourent le trône divin, croyez-vous que chacun étant de son espèce, il n’y ait pas quelques espèces et même quelques genres très métaphysiques? Je prépare mon carême sur les Actes des apôtres, et je trouve dans saint Jean Chrysostome que chez les disciples de Notre-Seigneur la joie succédait à la tristesse, et la tristesse à la joie, par une disposition du Saint-Esprit. De même pour vous.

En ce moment le noviciat est peu nombreux, le P. Hippolyte un peu découragé. Je l’attribue à sa santé. Ma récolte de vin a été bien plus belle que je ne m’y attendais. La grosse affaire est de savoir si le chemin de fer passera définitivement chez moi. Je serais trop dédommagé de mes pertes passées, s’il s’y arrêtait en effet.

Vous savez, quant aux Soeurs de Charité, que la supérieure générale de la Charité a trois de ses soeurs religieuses. L’une est supérieure à Rome et très bien avec le P. V[incent] de P[aul]; d’où je conclus qu’elle est moins bien avec M. Etienne(3). Je vous attends vers le mois de mai ou de juin, n’est-ce pas?

Tout vôtre en Notre-Seigneur.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Les constitutions des R.A. seront définitivement approuvées en 1888. Voir Soeur THERESE MAYLIS, *Mère Marie-Eugénie et les Constitutions*, dans *Partage d'Auteuil* n° 33 (juillet 1981), pp. 7-44.
2. C'est-à-dire m'éloigner de mon domaine, quitter Nîmes. Mère M.-Eugénie souhaitait, en effet, qu'il fasse le voyage de Paris.
3. Jean-Baptiste Etienne (1801-1874), supérieur général des Lazaristes de 1843 à sa mort.