- DR07_118
- 3358
- DERAEDT, Lettres, vol.7 , p. 118
- Orig.ms. ACR, AD 1487; D'A., T.D. 24, n. 986, pp. 22-23.
- 1 CHATIMENT
1 DON DE SOI A DIEU
1 ESPERANCE
1 FOI
1 FONDATRICE
1 INSTITUTS RELIGIEUX
1 LOISIRS
1 MALADES
1 MIRACLE
1 PURIFICATION
1 TENTATION
2 PAUL, SAINT
3 LOURDES
3 MEDOUS - A LA MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
- MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
- Bagnères de Bigorre, 6 août 1868.
- 6 aug 1868
- Bagnères de Bigorre
Je partage toutes vos angoisses(1), ma chère fille, et je voudrais bien vous aider à les calmer. Voici une idée. Hier est partie d’ici une demoiselle qui, depuis quinze mois, n’avait pas mis les pieds par terre, qui vomissait tout ce qu’elle prenait, au point que pour lui donner la communion il lui fallait ne prendre que le quart d’une petite hostie. Le soir, elle revenait de Lourdes complètement guérie. J’étais chez le curé de Bagnères, lorsqu’un prêtre qui connaissait beaucoup cette personne vint nous annoncer ce fait miraculeux. Voulez-vous que j’aille à Lourdes demander la guérison de cette religieuse que vous me nommerez? Voulez-vous que je promette qu’elle s’y rendra elle-même, si elle guérit? Voulez-vous que je vous envoie de l’eau de la fontaine? Je comprends tout ce que doivent vous faire souffrir tous ces ébranlements de santés précieuses. Hélas! ce sont des fleurs pour le ciel. Elles vous obtiendront des filles plus nombreuses, sinon plus ferventes.
Quant à vos tentations contre la foi(2), elles doivent vous faire bien cruellement souffrir. Une fondatrice doit répéter sans cesse le mot de saint Paul: Contra spem in spem. Cet avenir d’une oeuvre que nous avons pétrie de nos doigts sera ce que l’aura faite cette foi vive, épurée, sans mélange d’appui humain. Quand je pense à ces choses pour ce qui me concerne, j’éprouve une sorte d’écrasement, une indicible oppression. Et pourtant si la tentation venait du dehors, que de faits propres à la dissiper! Vous avez besoin de preuves surnaturelles, je vous en apporte une qui a à peine vingt-quatre heures de date. Mais ce n’est pas là que gît le mal. Dieu veut nous purifier, et si ce n’était pas par ce moyen, ce serait par un autre. Le meilleur est donc de se livrer entièrement à lui et de le laisser faire absolument comme il l’entend.
J’ai déjà parcouru les environs, et avec un homme du pays, religieux et assez instruit. Je suis épouvanté par l’énumération qu’il me fait de tous les couvents, prieurés, abbayes qui ont peuplé ces montagnes. Ici des Bénédictines, là des religieuses d’une règle très austère. Hier je passai devant la place où l’on voyait, il y a quelques années, les ruines du fameux couvent de Médous, appartenant aux Dominicaines. Pourquoi ces disparitions? Pourquoi l’absence même de ruines? Dieu le sait, mais je lui demande que si c’est dans sa vengeance qu’il a ainsi pulvérisé ces monuments, il ne permette pas que nous en élevions qui soient destinés à ces châtiments. Mais ne vaut-il pas mieux se livrer à des pensées d’espérance et travailler, encore une fois, contra spem in spem?
Adieu, ma fille, et mille fois vôtre en Notre-Seigneur.
E.D'ALZON.2. "... depuis un mois, j'ai un retour de tentations contre la foi, plus terrible que jamais... Je tâche d'y porter la soumission et l'adoration, mais la tentation même vient à travers la prière et la présence de Dieu pour faire tout tomber dans le scepticisme." (4 août).