DERAEDT, Lettres, vol.7 , p. 146

23 aug 1868 Bagnères de Bigorre MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Saint Grégoire de Nysse et sainte Macrine. – Les premiers-nés appartiennent au Seigneur. – L’oeuvre de l’Assomption au ciel.

Informations générales
  • DR07_146
  • 3383
  • DERAEDT, Lettres, vol.7 , p. 146
  • Orig.ms. ACR, AD 1493; D'A., T.D. 24, n. 992, pp. 31-32.
Informations détaillées
  • 1 ADORATION
    1 AMOUR DU CHRIST A L'ASSOMPTION
    1 MORT
    1 TRISTESSE
    1 UNION DES COEURS
    1 VOCATION RELIGIEUSE
    2 BARAGNON, MARIE
    2 BASILE, SAINT
    2 DUFFOUR, THERESE-MARIE
    2 ETIENNE HARDING, SAINT
    2 GREGOIRE DE NYSSE, SAINT
    2 HERNSCHEIM, CHARLES-PIERRE
    2 LACORDAIRE, HENRI
    2 MACRINE, SAINTE
    2 PIEL, LOUIS-ALEXANDRE
    2 RANCE, ABBE DE
    2 REQUEDAT, HIPPOLYTE
    3 CITEAUX
    3 LOURDES
    3 MOLESMES
    3 NIMES
  • A LA MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • Bagnères de Bigorre, 23 août 1868.
  • 23 aug 1868
  • Bagnères de Bigorre
La lettre

Vous avez parfaitement fait, ma chère fille, de me conter toutes vos tristesses et vos angoisses(1), surtout si cela vous a fait du bien et vous a soulagée. Saint Grégoire de Nysse, pour se consoler de la mort de saint Basile, son frère, voulait aller visiter sainte Macrine qui avait décidé la vocation du patriarche des moines d'[Orient](2). Il trouva sa soeur mourante, et, certes, la manière dont il décrit ses derniers moments montre bien que les saints ont connu la consolation de s’appuyer les uns sur les autres. Dans leurs alarmes comme dans leurs regrets ils se rapprochaient, se visitaient, et, quand ils ne pouvaient pas se voir, s’encourageaient par lettres. Pourquoi ne ferions-nous pas comme eux, alors même que nous ne sommes pas des saints? Nous voulons bien le devenir, n’est-ce pas? Pour moi, en ôtant ce que l’élément humain peut mêler de faiblesse à ces rapports, il me semble que la tendresse envers Dieu, qui est bien une perfection, doit refléter quelque chose de sa douceur sur les souffrances où nous pouvons apporter quelque baume. Telle est du moins ma disposition, en étudiant les épreuves des grands modèles que l’Eglise nous propose et en revenant ensuite à moi, pour retourner vers vous.

Ne vous désolez pourtant pas trop. Dieu, presque toujours, a pris pour lui les premières fleurs des champs monastiques. On en trouve une foule d’exemples. Voyez Citeaux. Ce fut la grande épreuve de saint Etienne de Molesmes; ce fut celle de l’abbé de Rancé. Voyez le P. Lacordaire avec Piel, Réquédat, le Père Hernscheim(3). Les premiers-nés appartiennent au Seigneur, avec la différence que ses premiers-nés à lui ne sont pas ceux que désigne le calcul des hommes. Laissez-le faire. Il y a une très grande bénédiction sous ces victimes qu’il prélève. Si ce sont des anges plus vite prêts, des épouses plus rapidement ornées, laissez-les partir: anges et épouses, ce sont des médiateurs. L’Assomption a son oeuvre sur la terre. Son oeuvre au ciel est plus grande, c’est de rendre à J.-C. l’hommage qui lui est dû dans l’amour et l’adoration. Il y a là encore des trésors de grâces qui augmenteront la puissance de celles qui ne sont pas aussitôt moissonnées. Et moi aussi, ma fille, je me rappellerai vos anniversaires et je vous rendrai de mon mieux ce que vous faites pour moi.

Puisque vos Soeurs ne vont que le 2 à Lourdes, je renonce à ma course; si elles s’y étaient trouvées le 30, c’eût été différent. Probablement alors je partirai samedi pour être à Nîmes le soir même, à 11 heures.

Adieu, ma fille, et mille fois vôtre en Notre-Seigneur.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
Je voudrais bien vous donner des vocations, Marie Baragnon que j'ai vue aujourd'hui, par exemple; mais il faut la vocation.1. La désolation de Mère M.-Eugénie devant l'état désespéré de Soeur Thérèse-Marie est en effet extrême. Voici ce qu'elle a écrit le 21 août au P. d'Alzon: "Cette enfant est si angélique, si simple, si à Dieu. Je joins un acte de soumission à chaque prière, mais ce danger rapide me brise et puisque le bon Dieu veut ou semble vouloir que la congrégation se passe d'âmes qui en auraient si bien soutenu le bon esprit, je le prie de se passer aussi de moi qui n'ai pas les grâces de Thérèse. Il n'a besoin de personne et moi j'ai besoin de cette enfant et de celles qui lui ressemblent et qui précisément sont celles dont la santé est le plus précaire. L'ardent désir d'être remplacée m'a envahie, je crois que j'ai donné ce que je pouvais donner, mais ne vous scandalisez pas, tout cela est soumis à Dieu [...]."
2. Le manuscrit porte *Occident* par erreur.
3. Premiers disciples de France de Lacordaire. Tous trois moururent prématurément.