DERAEDT, Lettres, vol.7 , p. 251

10 feb 1869 Paris BAILLY_VINCENT de Paul aa

L’enceinte du concile – Je n’ai pas la moindre envie d’être consulteur – Dieu nous ménage une position magnifique – Je vois pour vous un travail immense à Paris – Les millions de Jean – Un cachet – La séparation de l’Eglise et de l’Etat – L’affaire Beauffremont – Vicaire général des Augustins pour la France ?

Informations générales
  • DR07_251
  • 3511
  • DERAEDT, Lettres, vol.7 , p. 251
  • Orig.ms. ACR, AG 235; D'A., T.D. 27, n. 231, pp. 180-181.
Informations détaillées
  • 1 APOSTOLAT
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 CONCILE DU VATICAN
    1 HERITAGES
    1 PROJET D'UNION AVEC LES ERMITES DE SAINT-AUGUSTIN
    1 RELIGIEUSES DE L'ASSOMPTION
    1 SCEAU DE LA CONGREGATION DES ASSOMPTIONNISTES
    1 SEPARATION DE L'EGLISE ET DE L'ETAT
    2 AUBERT, ROGER
    2 BEAUFFREMONT, LA
    2 DONEY, JEAN-MARIE
    2 JEAN, CUISINIER
    2 KELLER, EMILE
    2 MONIQUE, SAINTE
    2 PICARD, FRANCOIS
    2 VINCENT DE PAUL, SAINT
    3 NIMES
    3 PARIS
    3 ROME, BASILIQUE SAINT-PIERRE
  • AU PERE VINCENT DE PAUL BAILLY
  • BAILLY_VINCENT de Paul aa
  • Paris, 10 février [18]69.
  • 10 feb 1869
  • Paris
La lettre

Mon cher ami,

J’ai reçu hier votre lettre de 12 grandes pages et je me hâte de vous dire qu’elles m’ont procuré un vif plaisir. Je vous remercie surtout des détails que vous me fournissez sur l’enceinte du concile(1). Tout cela sera très beau, à coup sûr. Il me semble, autant que je puisse me le rappeler, que le tout sera sous la protection de saint Vincent de Paul.

Quant à votre désir de me voir consulteur, n’y cédez pas, je vous en conjure(2). Je n’en ai pas la moindre envie, et ce n’est pas la peine de nous en occuper. Nous avons d’autres chats à fouetter pour le moment. Quant à moi, ma conviction très profonde est que Dieu nous ménage une position magnifique, si nous savons nous en emparer. Ainsi, par exemple, à Nîmes, le collège se relève, et à Paris quatre ou cinq religieux pourraient faire des merveilles. Aussi je vous préviens que si les choses vont comme je le suppose, l’an prochain, après que vous aurez assisté au concile pendant quelque temps, vous pourrez bien être prié de venir vous établir définitivement à Paris, où je vois pour vous un travail immense à accomplir, surtout si vous prenez pour champ d’exploitation tout ce côté-ci de la Seine. Je crois que le P. Picard se propose de vous demander le mois de mai prochain(3). L’idée serait assez bonne. Nous nous verrions à Nîmes, en allant et en revenant, et nous nous entendrions, au mois de juin, surtout pour ce qu’il y a à faire en vue du concile.

Il y a aussi à s’occuper de l’action catholique. J’ai vu hier Keller. Nous avons causé deux heures ensemble. Evidemment, il y a quelque chose à faire, quoique je ne voie pas bien précisément quoi. Vous le trouveriez, vous, j’en suis très persuadé.

Quant à ce que deviendront les millions de Jean, Dieu seul le sait et je ne pense pas que nous devions nous en préoccuper. A moins que je ne sois dans une étrange illusion, ces millions s’en retourneront comme ils sont venus. Gardez-vous bien d’écrire à Mgr de Montauban(4), je me charge de tout.

Le P. Picard m’arrête, sans quoi je vous écrirais 36 pages. J’étais en train. Adieu, cher ami. Tenez que je suis arrêté. Je vous embrasse totis viribus.

E.D’ALZON.

(Cachet) Ceci est le cachet des Dames de l’Assomption(5). J’ai envie d’en faire faire un semblable. Je ne sais pourquoi il se fait que les partisans théoriques de la séparation de l’Eglise et de l’Etat en soient si effrayés, quand ils voient au bout la suppression du budget, et qu’au contraire les vrais partisans du Syllabus acceptent en fait la séparation de l’Eglise et de l’Etat, même avec la suppression du budget, pourvu que la nomination des évêques ne soit plus aux griffes du pouvoir temporel.

Les journaux vous ont appris la sale affaire Beauffremont. Cette Beauffremont, qui avait une villa près des Passionnistes, aurait voulu empoisonner son mari pour épouser un Polonais, mais je n’y étais pas. Vous voyez bien que je ne sais rien. Toutefois, voici un petit secret. On me propose de me faire nommer Vicaire général des Augustins pour la France, avec les voeux simples, mais tous les privilèges des voeux solennels, et Constitutions rédigées par nous, sauf approbation. Ne parlez pas de ceci, de grâce, mais examinez si vous pourriez me fournir des renseignements.

Adieu, très cher. Mille fois vôtre en N.-S.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
J'ai reçu la *Civilta*(6) et toutes vos lettres. Ecrivez beaucoup, beaucoup.1. Le P. Bailly a même agrémenté sa lettre d'un dessin de l'hémicycle de Saint-Pierre.
2. "Vous avez été sur le point d'être demandé à Rome comme consulteur. Je voudrais bien encore que vous le soyez..." (6 février).
3. Le même jour en effet le P. Picard propose à Vincent de Paul de venir prêcher le mois de mai à Paris : "...nous arriver trois ou quatre jours avant le 1er, prêcher et puis retourner à vos chers zouaves."
4. Au sujet de la proposition que Mgr Doney avait faite au P. d'Alzon d'être son procureur au concile (*Lettre* 3474).
5. Le P. d'Alzon utilise une feuille portant ce cachet. C'est un cachet ovale représentant la Vierge montant au ciel avec à ses pieds, à gauche, saint Augustin, à droite, sainte Monique et encadrée par l'inscription: S.CONGREG.SOROR.AUGUSTIN.DE B.M.V. IN CAEL.ASSUMPTA.
6. Le P. d'Alzon s'est donc abonné à la *Civiltà* et elle lui parvient. A-t-il lu au début de février dans le fasc. 453 (pp.345-352) la *Corrispondenza di Francia*? Il n'y fait en tout cas aucune allusion. Pourtant, au moment de sa parution, cet article, où il était question du désir des catholiques français de voir proclamer la doctrine du *Syllabus* et où était évoquée l'éventualité d'une définition par simple acclamation de l'infailibilité dogmatique du pape, eut un immense retentissement (AUBERT, *Vatican I*, p.74-76 et 261-269, Histoire des Conciles Oecuméniques, 12, Paris, 1964).