DERAEDT, Lettres, vol.7 , p. 380

17 jul 1869 Nîmes CORRENSON_MERE Emmanuel-Marie

Chaleurs éprouvantes – Le concile – Les efforts que vous avez à faire – Revenez-moi une vraie sainte – Préparez un petit coutumier.

Informations générales
  • DR07_380
  • 3635
  • DERAEDT, Lettres, vol.7 , p. 380
  • Orig.ms. AC O.A.; Photoc. ACR, AH 411; D'A., T.D. 29, n. 203, pp. 233-235; QUENARD, pp. 126-129.
Informations détaillées
  • 1 AMITIE
    1 BESOINS DE L'EGLISE
    1 CAUSE DE L'EGLISE
    1 CO-FONDATRICE DES OBLATES
    1 CONCILE DU VATICAN
    1 COUTUMIER
    1 CURES D'EAUX
    1 EPOUSES DU CHRIST
    1 ESPRIT ETROIT
    1 ETUDE DE L'EGLISE
    1 FATIGUE
    1 FEMMES
    1 GUERISON
    1 INTEMPERIES
    1 LUTTE CONTRE LA TENTATION
    1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
    1 OBLATES
    1 PERFECTIONS DE JESUS-CHRIST
    1 ROI DIVIN
    1 SOUFFRANCE ACCEPTEE
    1 SUPERIEURE
    1 ZELE APOSTOLIQUE
    2 CORRENSON, MADAME CHARLES-LOUIS
    2 PLEINDOUX, ETIENNE
    3 VICHY
    3 VIGAN, LE
  • A LA MERE EMMANUEL-MARIE CORRENSON
  • CORRENSON_MERE Emmanuel-Marie
  • Nîmes, 17 juillet 1869.
  • 17 jul 1869
  • Nîmes
La lettre

Ma chère enfant,

Si vous tenez absolument à avoir des nouvelles de ma santé, il faut bien vous dire qu’il me tarde furieusement d’être à quinze jours d’ici, pour pouvoir fuir du côté du Vigan. Les chaleurs m’éprouvent et me laissent sans forces, je ne suis capable de rien de bon.

Avec cela je réfléchis, je pense assez au concile, où quelques personnes voudraient encore me faire nommer consulteur, à quoi je résiste. Il me semble que je serai bien plus libre d’y faire le peu de bien dont je suis capable, par les conversations particulières. Je suis sur ce point en divergence avec plusieurs de mes amis, mais c’est probablement moi qui ai tort.

Je pense aussi beaucoup à vous, ma chère enfant. Les eaux, que vous allez prendre loin de Nîmes, auront cet heureux effet de me faire juger par moi-même à quel point vous êtes aimée de vos filles, l’influence que vous pouvez acquérir tous les jours, pourvu que vous developpiez en vous certaines qualités ou certaines vertus, comme il vous plaira. Voyons, voulez-vous que je vous parle, comme je parlerais à une sainte?

1° Il faut que vous preniez la résolution de faire comprendre tous les jours un peu plus que vous ne tenez au pouvoir que parce qu’il est vous est imposé, et, à ce point de vue, vous avez encore à faire disparaître devant Dieu certaines parties, anguleuses ,de votre chère petite personnalité.

2° Vous avez à oublier un peu plus les points de vue pris du côté des personnes et traiter davantage les questions en elles-mêmes et dans leur sens le plus général. Ici, je vous signale un écueil qui est plus de votre sexe que de votre nature à vous; je crois même qu’avec votre nature vous avez ce qu’il faut pour vous affranchir d’un inconvénient plus inhérent à votre qualité de femme qu’à votre caractère propre. Je vous crois, au contraire, très capable pour peu que vous vous y appliquiez à acquérir le don de laisser de côté les petits côtés des choses, mais pour cela vous avez encore à faire des efforts.

3° Vous aimez beaucoup N.-S. comme votre époux, pas assez peut-être comme votre roi. Vous poussez très loin la délicatesse de vos relations avec lui, vous le voulez pour vous; la fondatrice des Oblates doit le vouloir pour ses filles, pour toutes les âmes que ses filles convertiront, pour toute l’Eglise, pour tous les pécheurs. Vous vous efforcerez de le placer sur un trône dans votre coeur, vous devez être sans cesse préoccupée des moyens à prendre pour le placer sur un trône qui domine tous les coeurs. Et pour cela, non seulement vous devez beaucoup prier et prendre vos souffrances pour moyen de coopérer au mystère de la rédemption, mais vous devez occuper davantage votre esprit de tout ce qui peut intéresser la grande cause de l’Eglise. Votre intelligence doit, je le crois, se développer beaucoup de ce côté.

Laissez tomber les tentations de toute espèce que le diable peut vous suggérer; c’est un très habile moyen pour lui de vous faire perdre votre temps. Ce temps serait bien mieux employé si vous vous appliquiez, autant que votre santé vous le permettrait, à étudier tout ce qui peut vous faire bien saisir ce dont l’Eglise a le plus besoin. Il y a là tout un monde nouveau qui s’ouvre devant vous. Reste à savoir ce que vous ferez, ce que vous pourrez faire. Je sais par expérience qu’une certaine fatigue physique empêche le travail de l’esprit; aussi à ce point de vue (je ne parle pas des autres) je fais les voeux les plus ardents pour que vous trouviez la santé à Vichy. Vous ne voulez pas y pétrifier votre coeur, vous avez mille fois raison. Je préférerais de beaucoup que vous puissiez le rendre mille fois plus grand, plus ardent pour tout ce qui est grand, beau, divin dans les perfections de Jésus-Christ et la cause de l’Eglise. Vous avez à entrer dans une vie toute nouvelle par une certaine puissance d’intelligence dont vous êtes extrêmement capable, et par une dilatation de votre capacité d’aimer les âmes, comme Notre-Seigneur les aime. Marie, revenez-moi une vraie sainte. Encore une fois, sans vous pétrifier, coupez, tranchez, élargissez, agrandissez tout ce qui en vous est fait pour se tourner vers l’infini et trouver la pleine possession de Dieu par l’accomplissement de tous ses desseins sur vous.

Adieu, mon enfant. Je vous bénis avec un redoublement de tendresse et avec un très ardent désir de vous voir prendre votre vol vers le but de votre vocation, avec des ailes grandes comme le monde et puissantes comme celles d’un séraphin.

Votre père.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
Je ne suis pas allé voir Mme votre mère, à l'occasion de la mort de M. Etienne Pleindoux(1); j'ai eu peur que ma visite ne ressemblât à une mauvaise plaisanterie. Préparez, si vous le pouvez, un petit coutumier. Voici quelques titres de chapitre: L'emploi de la journée, le dimanche, les communions, les confessions, le réfectoire, les récréations, les pénitences, les parloirs, la tenue, le travail, etc.; nous mettrons ensuite cela en ordre ensemble.1. Oncle de Mme Correnson.