DERAEDT, Lettres, vol.8 , p. 153

27 jan 1870 Rome CHABERT Louise

La solitude – Dieu doit être votre tout – Prier pour le concile, pour l’Orient – L’union à Dieu – La volonté du pape est de pousser les affaires – Avant d’entrer, rétablissez votre santé – Une fille de foi! – La visite du pape à l’évêque de Nîmes – Le P. Gratry.

Informations générales
  • DR08_153
  • 3859
  • DERAEDT, Lettres, vol.8 , p. 153
  • Orig.ms. ACR, AM 315; D'A., T.D.38, n.11, pp.19-22.
Informations détaillées
  • 1 ACTION DE DIEU
    1 ADVENIAT REGNUM TUUM
    1 APOTRES
    1 BETISE
    1 BONTE MORALE
    1 BREVIAIRE
    1 CALENDRIER LITURGIQUE
    1 CATECHISME
    1 CONCILE DE TRENTE
    1 CONCILE DU VATICAN
    1 CONGREGATIONS DE FEMMES DE L'ASSOMPTION
    1 CONGREGATIONS ROMAINES
    1 CONTRARIETES
    1 CRITIQUES
    1 DECRETS
    1 DIEU
    1 DIPLOMATIE
    1 ECRITURE SAINTE
    1 EGLISE
    1 EGLISE NATIONALE
    1 ENSEIGNEMENT DE LA VERITE
    1 EPOUSES DU CHRIST
    1 EPREUVES
    1 ESPRIT SURNATUREL A L'ASSOMPTION
    1 ETRE HUMAIN
    1 EVEQUE
    1 FOI
    1 GALLICANISME
    1 GENEROSITE DE L'APOTRE
    1 GLORIFICATION DE JESUS-CHRIST
    1 HOMME CREE A L'IMAGE DE DIEU
    1 HUMILITE
    1 IDEES DU MONDE
    1 ILLUSIONS
    1 IMITATION DE DIEU
    1 INDEX
    1 INFAILLIBILITE PONTIFICALE
    1 ITALIENS
    1 LITURGIES ORIENTALES
    1 MISERICORDE
    1 OBLATES
    1 PAQUES
    1 PEUPLE DE DIEU
    1 PREDICATION
    1 PRIERE POUR L'EGLISE
    1 PUISSANCE DE DIEU
    1 RECONNAISSANCE
    1 REFORME LITURGIQUE
    1 SAINTETE
    1 SANTE
    1 SOINS AUX MALADES
    1 SOLITUDE
    1 SOUFFRANCE
    1 SUJETS DU ROYAUME
    1 VERTUS THEOLOGALES
    1 VIE DE PRIERE
    1 VIE RELIGIEUSE
    1 VIE SPIRITUELLE
    1 VISITE DES MALADES
    1 VOIE UNITIVE
    1 VOYAGES
    2 ALLOU, AUGUSTE
    2 ARNIM, HARRY VON
    2 AUDO, JOSEPH
    2 ESCHBACH, ALPHONSE
    2 GRATRY, ALPHONSE
    2 JACOBINI, LODOVICO
    2 PIE IX
    2 PIERRE, SAINT
    2 PLANTIER, CLAUDE-HENRI
    3 ALLEMAGNE DU NORD
    3 BRESIL
    3 MEAUX
    3 NIMES
    3 ORIENT
    3 PRUSSE
    3 ROME
    3 ROME, SEMINAIRE FRANCAIS
    3 TRENTE
  • A MADEMOISELLE LOUISE CHABERT
  • CHABERT Louise
  • Rome, 27 janvier 1870.
  • 27 jan 1870
  • Rome
La lettre

Il est très vrai, ma chère enfant, que par moments vous devez vous sentir bien seule. Ce sont là de très précieux moments, pour entrer tout entière dans une union absolue avec Dieu. Il est, dit le Psalmiste, tout près de ceux qui ont le coeur dans la tribulation. C’est votre état; profitez-en. Ces souffrances, par où vous passez, sont à la fois une purification et un aiguillon.

Je vous l’ai déjà dit, c’est Dieu qui doit être chaque jour votre tout. Puisque vous voulez être son apôtre, commencez par lui préparer un instrument parfait. Quand saint Pierre institua les diacres, il réserva au Collège apostolique la prière et la prédication. Vous ne pouvez pas encore prêcher, instruire, faire le catéchisme, mais vous pouvez prier. Et que de choses vous avez à demander! D’abord, pour le concile. Ne vous ai-je pas déjà fait observer que le concile se compose de deux éléments, l’élément divin et l’élément humain? Or, l’élément humain a ses tristes côtés. Ce soir encore, le secrétaire de la Propagande pour les rites orientaux me parlait d’une scène, qui avait eu lieu, avant-hier soir, entre le Pape et un certain patriarche oriental(1), et où le Pape avait épuisé sa bonté et le patriarche sa sottise, appuyé qu’il est par l’ambassadeur de Prusse(2) et certains évêques gallicans. Ah! ma fille, que d’illusions se font les plus illustres, quand ils ne s’appuient pas sur la pierre immuable! Vous avez donc à prier pour l’Orient, à devenir saintement jalouse de la gloire de Jésus, votre époux, à désirer que son royaume advienne, à devenir une fille de l’Assomption et capable, le plus possible, de faire beaucoup de bien.

Je voyais, ce matin, que les êtres matériels ont leur mesure, mais que, pour la mesure des êtres spirituels, ils n’en ont point d’autre que Dieu; ils sont plus ou moins grands, selon qu’ils se rapprochent le plus, par la ressemblance, de l’être de Dieu. Or, ma chère enfant, nous nous agrandissons, à mesure que nous faisons plus parfaitement des actions divines, et nos actions deviennent divines, en proportion de ce qu’elles sont plus faites selon les intentions de Dieu, en foi, espérance et amour. Voyez comme, toute petite servante de Dieu que vous êtes, vous pouvez cependant accroître votre valeur, votre puissance, et, si je puis dire, la somme de votre être surnaturalisé, en ne cherchant, en ne voulant que vous revêtir de la vertu de Dieu, et donner à vos moindres actions une énergie divine, la plus grande possible.

Si vous devez venir à Rome, dépêchez-vous, car voilà que les décrets les plus importants vont être discutés lundi. Cela durera peut-être un mois. Après quoi, je présume qu’on ira rondement et que tout sera fini pour Pâques. C’est la volonté très arrêtée du Saint-Père de pousser les affaires, et je suppose que si quelque chose reste à faire, le concile s’en rapportera au Pape en indiquant ses voeux, comme le dernier concile le fit à Trente, pour la réforme du calendrier, du bréviaire, l’édition de la Vulgate, l’Index, la publication du catéchisme, etc.

Quant à venir parmi nos Oblates, rétablissez d’abord votre santé. Je tiendrais seulement que vous y vinssiez un peu avant mon retour, mais vous avez deux à trois mois. En attendant, je vous ordonne de vous soigner, autant que vous le pourrez. Vous désobéiriez si vous ne faisiez pas vos efforts pour prendre des forces. Ne vous faites pas illusion. La vie religieuse aura de très grandes peines pour vous. Vous y trouverez des froissements, des contrariétés. Ce qui de loin vous semble un moyen vous deviendra un obstacle. Oh! Louise, devenez une fille de foi, une fille surnaturelle; regardez toujours du côté du ciel, comme vous me le dites dans votre lettre. Vous ferez l’oeuvre de Dieu, en proportion de ce que vous chercherez moins à faire la vôtre.

Monseigneur m’a donné de très vives inquiétudes, ces jours-ci. Le Pape est venu le voir. Il est resté environ vingt minutes avec lui. Pendant ce temps, j’étais avec deux prélats à la porte qui était ouverte, et le Pape était sur la chaise où je m’étais assis quelques minutes auparavant. Je pense aller le remercier un de ces jours, avec le supérieur du séminaire français. Lorsque Pie IX entra, je lui demandai s’il voulait voir Monseigneur et l’évêque de Meaux, qui est aussi souffrant. Il me répondit: « Je viens pour voir l’évêque de Nîmes et l’évêque de Meaux. Visiter les malades est une oeuvre de miséricorde« . Eh! bien, ma fille, consoler les affligés est une oeuvre de miséricorde aussi. Seulement, je ne sais si avec ma fille j’y ai un grand mérite. Je veux la faire désormais cette oeuvre par un principe le plus surnaturel possible.

Adieu mon enfant. Je vous bénis du fond du coeur.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
Avez-vous entendu parler de la chute du P. Gratry et de sa seconde lettre? Quelle aberration, quelles calomnies contre l'Eglise sur des points si souvent fixés et résolus! Ici, sa lettre a décidé un certain nombre d'évêques hésitants à se prononcer plus catégoriquement que jamais pour l'opportunité de la définition, entre autres tous les évêques du Brésil et plusieurs Italiens.Qu'il faut être humble et prier pour l'Eglise!1. Cinq patriarches de rite oriental étaient présents à Rome. [Ajout à cette note: Il s'agit ici du patriarche de Babylone, Joseph Audo, v.*Lettre* 3860, n.1.]
2. Baron H. von Arnim, envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de Prusse et de la Confédération de l'Allemagne du Nord.