DERAEDT, Lettres, vol.8 , p. 179

6 feb 1870 Rome RA_NIMES

Que Mère M.-Gabrielle se soigne bien! – Mgr Dupanloup – Evêques trop bavards – L’infaillibilité bientôt proposée – A Nîmes, j’espère, moins de 15 jours après Pâques – Que vos enfants soient de vraies catholiques et se mortifient par l’humilité, l’obéissance et la douceur.

Informations générales
  • DR08_179
  • 3877
  • DERAEDT, Lettres, vol.8 , p. 179
  • Orig.ms. AC R.A.; D'A., T.D.35, n.11, pp.86-87.
Informations détaillées
  • 1 BAVARDAGES
    1 CARDINAL
    1 CATHOLIQUE
    1 CONCILE DE TRENTE
    1 CONCILE DU VATICAN
    1 CONFESSEUR
    1 DEFAUTS
    1 DOUCEUR
    1 EVEQUE
    1 GALLICANISME
    1 GENEROSITE
    1 HERESIE
    1 HUMILITE
    1 INFAILLIBILITE PONTIFICALE
    1 JANSENISME
    1 JARDINS
    1 JOIE
    1 LANGUE
    1 LIBERALISME
    1 MALADES
    1 MORT
    1 PAPE
    1 PAQUES
    1 SOINS AUX MALADES
    1 TRAVAIL
    1 VERTU D'OBEISSANCE
    2 BILIO, LUIGI
    2 COURCY, MARIE-GABRIELLE DE
    2 DUPANLOUP, FELIX
    2 MANSI, GIOVANNI-DOMENICO
    2 PLANTIER, CLAUDE-HENRI
    3 NIMES
    3 ROME, VILLA GRAZZIOLI
  • A UNE RELIGIEUSE DE L'ASSOMPTION DE NIMES
  • RA_NIMES
  • Rome, 6 février [18]70.
  • 6 feb 1870
  • Rome
La lettre

Ma chère fille,

Dites à la Mère M.-Gabrielle tout mon chagrin de la savoir malade et toutes mes recommandations de se bien soigner. Voilà mon évêque hors d’affaire, mais il n’a été si bas que parce qu’il a fait des imprudences. Que votre Mère n’en fasse pas, ou, quand je reviendrai, je l’excommunierai: c’est certain.

Les bonnes nouvelles que vous me donnez des Enfants de Marie me font un immense plaisir. De grands malheurs se préparent ici. Figurez-vous qu’un certain nombre de dames n’admirent plus autant Mgr Dupanloup(1). Après cela, comment voulez-vous que nous ne traversions pas d’horribles catastrophes? Ici le fétiche de la villa Grazioli reçoit un peu moins d’encens. Quelques-unes disent beaucoup moins, mais Mme de M. et Mlle de L. lui en donnent pour toutes les désertrices.

Voyons, une bonne petite nouvelle. Un des cardinaux présidents du concile, que j’ai vu avant-hier(2), m’a déclaré qu’on est fatigué de toutes les longueurs de certains évêques, et qu’on va les prier de ne plus être si prolixes au point de laisser croire qu’ils ont mis au bout de leur langue toutes celles des dévotes de leurs diocèses. S’ils ne tiennent aucun compte des observations, la langue sera impitoyablement coupée(3). Redoublez de prières. L’infaillibilité du Pape va être proposée immédiatement. Probablement quand vous recevrez cette lettre, ce sera fait, et cela fait, le reste se fera bien autrement vite que les bons gallicans ne le supposent(4).

Maintenant il est très vrai qu’une sainte âme a annoncé que le concile durerait seize mois. Je vous réponds que cela m’est tout à fait égal, et que j’espère bien être à Nîmes avant la fin de la quinzaine de Pâques, et qu’il m’en tarde. Voici ce que je vous charge de dire à vos enfants.

Mes chères filles,£$

Soyez toujours de vraies catholiques. Souvenez-vous que vous ne devez jamais mettre vos confesseurs avant le Pape, comme le font ici quelques dames, vos confesseurs fussent-ils des évêques. Après le concile du Vatican, nous aurons très probablement une bonne ou plutôt une mauvaise petite hérésie, comme après le concile de Trente on eut le jansénisme. Cette hérésie s’appellera probablement le libéralisme, mais quel que soit son nom, fuyez-la comme la peste.

Il est mort ici la semaine dernière une demoiselle qui avait offert sa vie pour le concile. Voilà comment font les âmes généreuses, mais ceci est à admirer et non à imiter. Vous pouvez l’imiter cette demoiselle en vous mortifiant par l’humilité, l’obéissance, la douceur, le travail; vous pourriez prendre au milieu du jardin une pierre et aller y mettre les unes après les autres vos défauts. C’est là ce qui serait un fameux holocauste. L’idée est bonne, pensez-y.

Adieu, ma fille. A trois mois. Bon soir, ma fille. Votre père.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Voir *Lettre* 3855 n.
2. Le cardinal Bilio.
3. Le nouveau règlement sera distribué le 22 février.
4. De nombreuses adresses pour ou contre la discussion de l'infaillibilité étaient parvenues aux *postulata*. Les Pères favorables à la discussion et même à la définition étaient de loin les plus nombreux (v.*Lettre* 3857, n.2 et n.4). La congrégation examina ces adresses le 9 février et conclut à l'opportunité de la discussion. Le 2 mars elle informa le secrétaire du concile que le pape, *re mature perpensa*, avait approuvé cet avis et le 6 mars la formule du chapitre à ajouter au schéma *de Ecclesia Christi* fut distribuée aux Pères qui eurent dix jours pour fournir leurs observations. Ajoutons que le 8 février l'évêque de Nîmes, qui fut suivi par beaucoup d'autres, avait émis le voeu que la question de l'infaillibilité soit mise immédiatement, *statim*, en discussion (MANSI, 51, c. 687-697, 701, 703-705).