DERAEDT, Lettres, vol.8 , p. 209

19 feb 1870 Rome CORRENSON_MERE Emmanuel-Marie

Accepter l’oeuvre ou se retirer – Les deux Louise – Une jeune personne sur qui je crois pouvoir compter – On veut me parler de la Russie.

Informations générales
  • DR08_209
  • 3901
  • DERAEDT, Lettres, vol.8 , p. 209
  • Orig.ms. AC O.A.; Photoc. ACR, AH 414; D'A., T.D.30, n.262, pp.57-59.
Informations détaillées
  • 1 AMITIE
    1 BETISE
    1 CONFESSION SACRAMENTELLE
    1 CONGREGATION DES AUGUSTINS DE L'ASSOMPTION
    1 OBLATES
    1 PROVIDENCE
    1 SANTE
    1 TRAVAIL DE L'ETUDE
    1 VENTES DE TERRAINS
    1 VOCATION RELIGIEUSE
    2 ANTONELLI, GIACOMO
    2 BAILLY, EMMANUEL
    2 BANNEVILLE, GASTON MORIN DE
    2 CHABERT, LOUISE
    2 COSTA, MATHILDE DE
    2 COULOMB, LOUISE
    2 DINSART, CELESTIN
    2 GALABERT, VICTORIN
    2 LA FARGE, ALINE DE
    2 PIE IX
    2 THIBON, LOUIS
    3 FRANCE
    3 GRENOBLE
    3 ORIENT
    3 RUSSIE
    3 SAINT-LAURENT DU PONT
  • A LA MERE EMMANUEL-MARIE CORRENSON
  • CORRENSON_MERE Emmanuel-Marie
  • Rome, 19 février 1870.
  • 19 feb 1870
  • Rome
La lettre

Ma bien chère enfant,

Je reçois votre lettre et j’y réponds très vite, parce que je suis un peu pressé, et pourtant j’ai bien à vous dire. Vous entrez dans une phase nouvelle de la Congrégation. Quelques filles un peu sérieuses vont arriver, je l’espère. Il faut partir de ce point, qui a été ma force pour l’Assomption des hommes; il faut que l’oeuvre marche, et que les personnes qui ne l’acceptent pas telle qu’elle doit être prennent leur parti de se retirer.

Voilà le point de vue où je me place pour juger la manière de faire de Louise Coulomb. Aller se confesser à l’abbé Thibon est très significatif. Il est facile de prévoir que l’abbé Thibon la détournera d’entrer sur-le-champ. Dès lors, quand entrera-t-elle? Il est évident qu’elle a des prétextes dans sa santé, mais alors elle fait aussi bien de ne pas entrer du tout. Et c’est pour cela que je préfère que vous ne lui disiez plus un mot. Tant pis pour elle, si ce que je lui ai écrit ne la décide pas! Il y a une limite à tout. D’autre part, il me paraît insensé qu’elle réponde à mes trois premières lettres, comme elle l’a fait hier. Pour mon compte, je suis décidé à la voir venir. Hier encore, je lui ai écrit par le P. Emmanuel une bonne lettre, mais désormais je resterai dans le vague, où elle-même s’est placée. Peut-être cela aura-t-il un bon côté.

Voilà que je reçois une bonne lettre de Louise Chabert, qui me dit qu’elle est prête à venir, dès que nous le lui dirons. Je vous envoie un mot pour elle où je l’engage à aller vous trouver. De votre côté, accueillez-la aussi bien que possible, et pressez-la d’entrer. Vous trouverez chez elle de l’élan, de la délicatesse, de l’affection, si vous savez vous en emparer. Peut-être un élément plus jeune vous serait-il plus facile à former. N’oubliez pas que l’oeuvre des Oblates prend tous les jours une importance plus grande. Hier encore, j’ai causé de l’Orient avec l’ambassadeur de France(1), et, sans parler des Oblates, il m’a été évident qu’une position très sérieuse leur était ménagée par la Providence, si nous voulons nous rendre dignes de son appel.

L’autre jeune personne, ou plutôt la jeune personne sur laquelle je crois pouvoir compter, sauf erreur, est Mlle Aline de Lafarge, dont le père habitait Grenoble. Elle vient de vendre sa propriété à Saint-Laurent du Pont; elle a une passion pour l’étude, quoiqu’elle se dise assez ignorante. C’est une petite personne dans le genre de Mlle de Costa. J’espère bien que Dieu nous en enverra d’autres. Pour le moment, vous avez à travailler énormément sur vous-même pour être à la hauteur de votre vocation. J’ai lutté tant que j’ai espéré que Louise Coulomb aurait le sens commun pratique; au dernier moment, quand Dieu semble indiquer autre chose, je m’arrête. Vous dirai-je que sa préférence pour l’abbé Thibon est pour moi un symptôme de bêtise dont je demeure stupéfait.

Je suis interrompu par quelqu’un qui veut me parler de la Russie et de ce que l’on peut y faire. Il doit demain voir le Saint- Père(2).

Adieu, ma fille. Tout à vous. Sentez-vous bien au moins toute la profondeur de mon affection et du sérieux avec lequel je m’appuie sur vous?

Lisez la lettre ci-incluse, mettez-la sous enveloppe et faites la porter.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. M. de Banneville, ancien directeur général aux Affaires étrangères, avec lequel le P. d'Alzon est en rapport depuis plusieurs années.
2. Célestin Dinsart (v. *Lettre* 3792 n.).Dans son journal, au 20 février, le P. Galabert a noté : "M. Dinsart a eu audience; bonté du Saint-Père. Ce soir il doit voir card. Antonelli et verra Pape dans quelques jours en particulier. - Projet : préparer religieux slaves pour pénétrer plus facilement en Russie; leur donner l'instruction française; religieux travaillant la terre." Nous retrouverons chez le P. d'Alzon l'idée de religieux travaillant la terre liée au projet de pénétration en Russie (v. *Lettre* 4121).