DERAEDT, Lettres, vol.8 , p. 227

27 feb 1870 Rome MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Monseigneur de Nîmes – L’incertitude règne au concile – M. Icard – Le programme du concile et la force des choses – La ferveur nécessaire.

Informations générales
  • DR08_227
  • 3914
  • DERAEDT, Lettres, vol.8 , p. 227
  • Orig.ms. ACR, AD 1547; D'A., T.D.24, n.1054, pp.98-99.
Informations détaillées
  • 1 ADORATION DU SAINT-SACREMENT
    1 AMOUR DE L'EGLISE A L'ASSOMPTION
    1 ASSOMPTIONNISTES
    1 CAREME
    1 CHAPELLE
    1 CONCILE DU VATICAN
    1 CONGREGATIONS ROMAINES
    1 DEVOTION
    1 DISCIPLINE ECCLESIASTIQUE
    1 ELECTION
    1 ERREUR
    1 FETE
    1 GALLICANISME
    1 INDULGENCES
    1 INFAILLIBILITE PONTIFICALE
    1 INSTITUTS RELIGIEUX
    1 LIBERALISME
    1 MYSTIQUE
    1 NEUVAINES DE PRIERES ET DE PENITENCES
    1 PAQUES
    1 PASSION DE JESUS-CHRIST
    1 PENITENCES
    1 PIETE
    1 PUBLICATIONS
    1 RECONNAISSANCE
    1 RELIGIEUSES DE L'ASSOMPTION
    1 SAINTE COMMUNION
    1 SOUFFRANCE
    1 VIE DE PRIERE
    2 ANTONELLI, GIACOMO
    2 BIZZARRI, GIUSEPPE
    2 BORGHESE, PRINCESSE
    2 DUPANLOUP, FELIX
    2 GRATRY, ALPHONSE
    2 HAYNALD, LUDWIG
    2 ICARD, HENRI-JOSEPH
    2 MOURRET, FERNAND
    2 PIE IX
    2 PLANTIER, CLAUDE-HENRI
    3 NIMES
    3 ORLEANS
    3 ROME
    3 ROME, VILLA BORGHESE
  • A LA MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • Rome, 27 février [18]70.
  • 27 feb 1870
  • Rome
La lettre

Ma bien chère fille,

Mgr de Nîmes est très touché de votre souvenir; il a besoin qu’on lui porte de l’intérêt. Ses souffrances sont par moments très vives. J’espère pourtant que le beau temps lui permettra de retourner chez lui.

Au point où nous en sommes, l’incertitude la plus grande règne dans le concile. Hier matin, le bruit était qu’Antonelli avait obtenu que l’on ne traiterait l’infaillibilité que vers Pâques. Hier soir, un Jésuite (et les Jésuites sont bien renseignés) m’affirmait que le grelot sera attaché vendredi. Vous savez que c’est la fête de la couronne d’épines. Les gallicans après tout lâchent pied. Ainsi Haynald, dans le discours qu’il n’a pas pu finir(1), avait parfaitement reconnu le Pape infaillible. Pourquoi alors cette opposition? Hélas! parce que beaucoup ont à se faire pardonner beaucoup. Et puis, parce que la promulgation de l’infaillibilité implique la condamnation du libéralisme.

Vous abordez un sujet dont j’ai les oreilles rebattues du matin au soir par quelqu’un ici. Et je finis par m’apercevoir que quand on veut remonter à cert[ain]es origines, on est épouvanté de voir l’erreur ayant fait des premiers pas dans une certaine sainteté mystique et avoir grandi comme dans un nid de dévotion. M. Icard(2) joue ici un très gros jeu par rapport à sa Congrégation, et des évêques le lui ont fait observer. Evidemment, s’il ne mène pas la faction, il est le premier aide [de] camp d’Orléans, ou plutôt je le considère comme une puissance alliée, qui par ses services a le droit d’imposer certains tempéraments, mais qui peu à peu inspire la défiance de ce qui vient de Rome et trouve une pieuse consolation à constater un à un les abus des Romains. On s’occupe de démolir ces Messieurs.

J’espère que le programme du concile tel qu’il a été distribué, sera voté rapidement ou renvoyé à la sagesse du Pape. Evidemment une foule de questions disciplinaires ne sont pas mûres, et il vaut bien mieux que l’on ne promulgue pas des lois qu’il faudrait abolir avant un siècle. Bien mieux vaut laisser ces lois sortir du fait même des changements profanes qui se préparent. Ainsi ne soyez pas étonnée que je me tienne coi pour la question des Congrégations religieuses. Il paraît que le cardinal Bizzarri(3) leur est devenu très favorable. Tant mieux! Mais franchement je m’en occupe très peu. La force des choses est notre plus grande puissance.

Recommandez bien à vos filles d’offrir pendant le carême leurs prières, leurs pénitences, leurs communions pour le concile. A Rome on redouble de ferveur. Un certain nombre de dames ont demandé de faire une neuvaine pour le concile. Le Pape l’accorde avec des indulgences et les prières indiquées par lui. Savez-vous la chapelle qu’il a désignée pour le salut du Saint-Sacrement? La chapelle Borghese. Vous connaissez les relations de la princesse Borghese avec Mgr d’Orléans.

J’ai oublié de demander à nos Pères les publications nouvelles. Ainsi je n’ai pu avoir qu’une heure à ma disposition la seconde lettre de Gratry. Adieu, ma bien chère fille. Vous ai-je dit qu’à Rome vous êtes comme Congrégation très connue pour votre attachement à Rome?

Mille fois vôtre.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Voir *Lettre* 3903 n.
2. Les historiens s'accordent à reconnaître le rôle modérateur joué au concile par le savant et sage M. Icard qui jouissait de la confiance de nombreux prélats des deux bords. Ce rôle a spécialement été mis en relief par Fernand Mourret, historien de la même compagnie, dans *Le Concile du Vatican d'après des documents inédits* (Paris, 1919). Parmi ces inédits il y avait précisément le journal de M. Icard.
3. Préfet de la Congrégation des Indulgences.