DERAEDT, Lettres, vol.8 , p. 244

7 mar 1870 Rome CORRENSON_MERE Emmanuel-Marie

Le décret sur l’infaillibilité – Poitiers – Nous serions encore ici pour la Pentecôte – Les cloches – Une grande attente – Votre sanctification – Louise Coulomb – Courses pour la prompte conclusion du concile.

Informations générales
  • DR08_244
  • 3930
  • DERAEDT, Lettres, vol.8 , p. 244
  • Orig.ms. AC O.A.; Photoc. ACr, AH 414; D'A., T.D.30, n.272, pp.74-75; QUENARD, pp.167-169.
Informations détaillées
  • 1 ACTION DE DIEU DANS L'AME
    1 ADVERSAIRES
    1 ANGOISSE
    1 ANIMAUX
    1 AUTORITE PAPALE
    1 CLOCHER
    1 CONCILE DU VATICAN
    1 CONTRARIETES
    1 CULPABILITE
    1 DECRETS
    1 EGLISE
    1 ENFANTEMENT DES AMES
    1 ENSEIGNEMENT DE LA VERITE
    1 EPREUVES DE L'EGLISE
    1 ESPERANCE
    1 EVEQUE
    1 FRANCAIS
    1 INFAILLIBILITE PONTIFICALE
    1 ITALIENS
    1 OBLATES
    1 PAQUES
    1 PENTECOTE
    1 PERFECTION
    1 POLITIQUE
    1 PREDICATIONS DE CAREME
    1 PRIERE DE DEMANDE
    1 PROGRES DANS LA VIE SPIRITUELLE
    1 RENONCEMENT
    1 SAINT-ESPRIT
    1 THOMAS D'AQUIN
    2 COULOMB, LOUISE
    2 DUMAZER, ALEXIS
    2 GALABERT, VICTORIN
    2 PIE IX
    2 PIE, LOUIS
    3 FRANCE
    3 NIMES, CATHEDRALE
    3 POITIERS
  • A LA MERE EMMANUEL-MARIE CORRENSON
  • CORRENSON_MERE Emmanuel-Marie
  • Rome, 7 mars [18]70.
  • 7 mar 1870
  • Rome
La lettre

Peut-être ne pourrai-je pas vous écrire à l’aise demain, je m’y prends dès ce soir, ma chère enfant. Enfin, le décret sur l’infaillibilité est proposé. Mais que de tiraillements il a fallu subir de la part des politiques! Tel qu’il est, il est parfait, à mon gré. J’entends qu’on le trouve trop fort, d’un côté, trop faible, de l’autre. Pour ma part, je m’en contente. Quand sera-t-il discuté? Pas avant dix jours, hélas! L’évêque de Poitiers me parlait du lundi de Quasimodo(1). Je lui fis une mine qui lui prouva combien je suis peu content de lui. Il commence à voir que ses actions sont en baisse. Peu importe; l’essentiel est qu’on s’y mette. Les évêques français préparent quelque chose pour conjurer que la question soit traitée au plus tôt. L’obtiendront-ils? Je le présume, parce qu’on mettra le feu aux poudres en talonnant les présidents. Que voulez- vous? Les Italiens ne sont pas pressés.

Voilà le Pape qui permet de se servir des saintes huiles jusqu’au retour des évêques; c’est effrayant. On suppose même que nous serons ici pour Pentecôte. Cela n’empêche pas, ma chère enfant, que vous ne vous mettrez pas à vous sanctifier, autant que vous le pourrez.

Je m’interromps pour vous dire qu’à l’instant j’entends une cloche qui a juste le son de celle qui, à la cathédrale, avertit pour les instructions du carême. Hélas! je suis un peu loin de cette pauvre cathédrale et de mes filles qui peuvent entendre le son de ses cloches. Pour les cloches, je les sacrifie, mais mes filles! Eh! bien, je les offre à Dieu, et le sacrifice pour être dur n’est que plus méritoire.

En ce moment le monde catholique est évidemment sous le poids d’une grande attente, que certains opposants transforment en angoisse. Mais il faut que l’Eglise, comme la femme, souffre lorsqu’elle enfante. Toute créature est dans cet enfantement et ce gémissement. Pourquoi ne l’accepterions-nous pas? Vous le voyez, mon enfant, je vous écris sous le poids d’une très grande préoccupation; j’en verse dans votre coeur la surabondance, mais vous, de votre côté, il faut prier, il faut demander, il faut faire violence à Dieu, il faut forcer l’esprit d’amour de répandre la vérité sur la terre. Il est admirable que le décret sur l’infaillibilité ait été communiqué aux évêques le jour de saint Thomas d’Aquin, le prince de la théologie. Ah! qu’ils sont coupables ceux qui veulent entraver son enseignement si précis sur le droit du Pape!

Mais parlons de votre sanctification. Où en est-elle? Je ne puis vous dire à quel point elle me préoccupe. Je me demande quelquefois si cela ne vient pas de ce que je vous considère un peu trop comme ma propriété. Je ne voudrais pour rien au monde apporter un pareil sentiment au travail que Dieu veut faire en vous et où je me considère comme son instrument.

Adieu, ma fille. Bonne nuit; demain matin je causerai encore un peu avec vous.

8 mars.

Louise Coulomb a reçu une lettre du P. Galabert, dont elle doit être contente; nous verrons ce qu’elle fera. Adieu, ma bien chère enfant. J’ai à courir comme un chat maigre pour pousser à la prompte conclusion du concile. Je vous laisse donc, mais je veux que vous sachiez, une fois de plus, combien je vous suis paternellement et tendrement dévoué.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
Si mes courses réussissent, nous pourrions être en France quelques mois plus tôt. Lisez le billet au P. Alexis; il y a de bonnes nouvelles.1. C'est-à-dire le 25 avril.