DERAEDT, Lettres, vol.8 , p. 272

19 mar 1870 Rome ENFANTS de Marie

Autour du concile – Se préparer aux difficultés par le zèle, la prière, la sainteté, la générosité – Que le sentiment chrétien bouillonne et déborde! – Les catholiques et l’Europe.

Informations générales
  • DR08_272
  • 3949
  • DERAEDT, Lettres, vol.8 , p. 272
  • Orig.ms. ACR, AL 238; D'A., T.D.36, n.20, pp.182-185.
Informations détaillées
  • 1 ANGES
    1 ARMEE PONTIFICALE
    1 CATHOLIQUE
    1 CONCILE DU VATICAN
    1 CONCILE OECUMENIQUE
    1 CONFESSION DU NOM DE JESUS-CHRIST
    1 CONFESSION SACRAMENTELLE
    1 DENIER DE SAINT-PIERRE
    1 DIPLOMATIE
    1 DISTINCTION
    1 DOGME
    1 DON DE SOI A DIEU
    1 ECRITURE SAINTE
    1 ESPRIT CHRETIEN
    1 GALLICANISME
    1 GENEROSITE DE L'APOTRE
    1 GOUVERNEMENT
    1 HIERARCHIE ECCLESIASTIQUE
    1 LACHETE
    1 LIBERALISME CATHOLIQUE
    1 MALADIES
    1 MESSE DE REQUIEM
    1 PAIX
    1 PAQUES
    1 PARESSE
    1 PRESSE
    1 PRIERE DE DEMANDE
    1 PUBLICATIONS
    1 RENOUVELLEMENT
    1 RESPECT HUMAIN
    1 SAINTETE
    1 SALUT DES AMES
    1 SLAVES
    1 SYMPTOMES
    1 TIEDEUR
    1 TRAVAIL
    1 TRINITE
    1 UNIVERSITES CATHOLIQUES
    1 VIE DE PRIERE
    1 ZELE APOSTOLIQUE
    2 ADAM
    2 ANTONELLI, GIACOMO
    2 BILIO, LUIGI
    2 CATHERINE DE SIENNE, SAINTE
    2 DUPANLOUP, FELIX
    2 EVE
    2 FRANCOIS II, NAPLES
    2 FRANCOISE ROMAINE, SAINTE
    2 GRATRY, ALPHONSE
    2 HOLTZHAUSER, BARTHELEMY
    2 MONTALEMBERT, CHARLES DE
    2 PIE IX
    2 SALZANO, THOMAS
    2 SPACCAPIETRA, VINCENZO
    2 TIZZANI, VINCENZO
    2 VICTOR-EMMANUEL II
    3 EUROPE
    3 NAPLES
    3 NISIBE
    3 PALERME
    3 ROME
    3 ROME, CAPITOLE
    3 SICILE
    3 SMYRNE
    3 TANIS
  • AUX ENFANTS DE MARIE DE L'ASSOMPTION, A NIMES
  • ENFANTS de Marie
  • Rome, 19 mars [18]70.
  • 19 mar 1870
  • Rome
La lettre

Mes bien chères enfants,

Je voudrais vous convaincre de la nécessité de redoubler de prières. J’avais eu un moment l’espoir de vous voir à Pâques. Figurez-vous que les libéraux gallicans sont cause que ce sera tout au plus à la Trinité. Si vous croyez que cela contribue à me les faire aimer, vous êtes dans l’erreur. Ces pauvres gens sont comme les criminels à qui l’on va couper le cou. Ce n’est pas agréable et c’est pour cela qu’ils cherchent des prétextes pour retarder le fatal moment. Ce n’est pas agréable, en effet, mais s’ils y avaient mis un peu plus de bonne grâce, on aurait fait l’affaire plus poliment; tandis que si cela dure, ah! je ne sais ce qui les attend! Hier, par exemple, sauf un rapport de la Commission du dogme, on a eu Mgr Tizzani qui a parlé dix minutes, -on a trouvé que c’était bien-; puis, Mgr Spaccapietra douze minutes, on a bâillé; enfin, Mgr Salzano(1) un peu plus, ah! mais on s’est impatienté, et il a fallu qu’il retournât à sa place. Et il paraît que ce sera ainsi désormais. Ainsi soit-il!

Vous savez l’affaire du service commandé au Capitole, je dis au Capitole, pour M. de Montalembert. Ne voilà-t-il pas que le Pape a défendu une manifestation en faveur de celui qui l’avait appelé une idole. Mais, un moment! Le lendemain, il en fait faire un et il va y assister. Comment trouvez-vous que le Pape se, se, se… du monde? Et moi je trouve qu’il a bien fait et qu’il s’est conduit comme il faut se conduire envers certaines gens. Tout de même, il me tarde de vous revoir. C’est le sentiment universel que le séjour à Rome est monotone pour le quart d’heure. J’ai un ami qui crache sur les gens à qui il parle et les interrompt, quand ils lui parlent. Eh! bien, c’est le seul qui, pour le quart d’heure, trouve que l’on fait bien de ne pas aller vite. On m’assure que la brochure de Mgr Dupanloup a fait long feu. M. Gratry a failli mourir, m’écrit-on de Paris, d’une névralgie au coeur. Ah! que je voudrais pour quinze jours un rhumatisme au coeur à Antonelli pour sa diplomatie, à Bilio pour sa couardise! Il n’y a que le Pape. Quant aux gallicans ils font leur métier.

Mais laissons cela. J’ai passé avant souper une ou deux heures avec un prêtre sicilien, que je ne connais ni d’Eve ni d’Adam, mais qui s’est constitué mon ami intime, et va partir pour Palerme et donner, si je ne me trompe, l’absolution à je ne sais plus quel Monsignore que le Pape avait excommunié et qui a fait sa rétractation. Il vient mettre la paix entre les ministres de l’ex-roi de Naples, il rédige un journal à Palerme, il est curé, il serait chanoine si Victor-Emmanuel le voulait permettre. Il est très puissant, je vous assure, ce mien ami qui m’est poussé depuis le coucher du soleil. Or, il me disait le bonhomme que, dans son commentaire de l’Apocalypse, Holtzhauser annonce qu’il y aura un concile qui sera le couronnement de tous les conciles; qu’il y aura de grandes difficultés pour le réunir, qu’il les surmontera; de grandes difficultés pour s’entendre, qu’il les surmontera; de grandes difficultés pour le mettre en pratique, qu’il les surmontera. Eh! bien, il faut se préparer à surmonter ces difficultés par un grand zèle, par beaucoup de prières, par une sainteté cent fois plus grande que celle à laquelle vous avez aspiré jusques à aujourd’hui. Dieu veut des séraphins sur la terre, il veut une grande générosité pour donner et pour se donner. On donne son temps, son argent, sa patience; on se donne par toutes les oeuvres apostoliques, par l’extirpation du respect humain, par la confession de Notre-Seigneur Jésus- Christ. Qu’il serait beau si la manifestation d’une ardeur vraiment apostolique prenait commencement chez les enfants de Marie et se développait ensuite aux environs!

Je vous préviens qu’à mon retour je veux vous trouver à l’état de volcan en éruption. Il faut que le sentiment chrétien bouillonne au milieu de vous, déborde et se communique.

Adieu, mes chères filles, priez pour moi et soyez toutes des saintes Catherines de Sienne ou des saintes Françoises Romaines. Préparez-moi les éléments d’un beau denier de Saint-Pierre, d’une université catholique, de la conversion des Slaves. Ah! mon Dieu, ce n’est pas le bien à faire qui manque, mais la sainte paresse ne manque pas, non plus. Quand je vous reverrai, la paresse aura disparu, l’amour du travail chrétien aura si bien pris votre âme que vous ferez tout ce qu’on vous dira et qu’au lieu de vous pousser, il faudra vous arrêter.

Adieu, mes filles. Mille fois vôtre en N.-S.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
Si vous voulez mon impression générale sur l'Europe du point de vue où je suis, la voici. Le monde patauge dans le médiocre. Les catholiques seuls, s'ils le comprennent, peuvent devenir des gens distingués. Mais le comprendront-ils? Peut-être un jour, mais certainement pas encore. Que les enfants de Marie se dépêchent de donner le signal de la vraie résurrection que Dieu accordera, si nous en sommes dignes!1. Vincenzo Tizzani, archevêque titulaire de Nisibe, aumônier général de l'armée pontificale; Vincenzo Spaccapietra, archevêque latin de Smyrne; Thomas Salzano O.P., évêque titulaire de Tanis.