DERAEDT, Lettres, vol.8 , p. 435

19 jun 1870 Rome CHABERT Louise

Notes sur la Russie (suite).

Informations générales
  • DR08_435
  • 4102
  • DERAEDT, Lettres, vol.8 , p. 435
  • Cop.ms. ACR, AP 189; D'A., T.D.40, pp.399-400.
Informations détaillées
  • 1 ACHAT DE TERRAINS
    1 APOSTOLAT
    1 ATHEISME
    1 CATHOLICISME
    1 CHEMIN DE FER
    1 CHRISTIANISME
    1 CONSERVATEURS
    1 CONVERSATIONS
    1 COUVENT
    1 DOCTRINE CATHOLIQUE
    1 ERECTION DE MAISON
    1 GOUVERNEMENT
    1 LANGUE
    1 LIBERALISME
    1 LIBERTE
    1 POLITIQUE
    1 REVOLTE
    1 REVOLUTION ADVERSAIRE
    1 RUSSES
    1 SLAVES
    1 TOLERANCE
    1 UNIVERSITES D'ETAT
    2 ALEXANDRE II, TSAR
    2 BOUDOU
    2 CORRENSON, EMMANUEL-MARIE
    2 GORTCHAKOV, ALEXANDRE-M.
    2 KATKOV, MICHEL-N.
    2 NESSELRODE, KARL-ROBERT DE
    2 VOLKONSKI, NEVEU
    3 MER NOIRE
    3 ODESSA
    3 RUSSIE
  • A MADEMOISELLE LOUISE CHABERT
  • CHABERT Louise
  • Rome, 19 juin 18[70](1).
  • 19 jun 1870
  • Rome
La lettre

Notes sur la Russie(2).

J’ai eu hier une très longue conversation avec mon Russe; il désire en avoir une nouvelle ce soir. Vous voyez que cela prend corps. Il vous faut savoir que la Russie subit en ce moment trois courants: 1° le courant émancipateur libéral, à la tête duquel s’est placé le prince Gortschakoff(3) le premier ministre en Russie. Ce ministre a déjà présenté une loi sur la tolérance de tous les cultes. On ne l’a pas encore promulguée, parce que les esprits ne sont pas prêts, mais on agit dans la haute administration en conséquence. 2° Un courant révolutionnaire, qui effraie par ses conspirations et par son impiété; il se recrute surtout parmi les étudiants des universités. 3° Enfin, le vieux parti russe, à la tête duquel est un certain Katkoff, le rédacteur de la Gazette de Moscou et qui est une vraie puissance(4). La Russie, on le sent, penche vers une catastrophe. Les vieux conservateurs s’adressent à l’élément religieux pour en arrêter le trop prompt accomplissement, et je crois qu’ils accepteraient l’appui des catholiques, s’ils trouvaient dans leur propagande un élément conservateur. D’autre part, le parti émancipateur, en nous donnant la liberté, nous permettrait de nous établir; nous n’aurions évidemment rien [à] attendre de l’élément révolutionnaire. Mais si nous profitons de la liberté pour les uns, de la protection que nous assureraient les autres, peut-être arriverions-nous à faire du bien dans ce pays.

Les chemins de fer conduisent à l’extrémité de la Russie méridionale; on y va aussi par la mer Noire et Odessa. Rien n’empêcherait d’obtenir une concession de terrain pour une colonie, et, avec ce titre, on ferait peu à peu son établissement et l’on exercerait l’influence que tous les couvents ont exercée au moyen-âge. Il n’y aurait qu’à attendre la loi qui va permettre d’enseigner la religion catholique en langue russe, et la propagande commencerait aussitôt. Il serait facile d’avoir des terres dans ce pays, et, par conséquent, de faire toutes les fondations possibles et imaginables.

Notes et post-scriptum
1. Comme la lettre du 13 juin à la même (*Lettre* 4094), celle-ci était datée de 1869, corrigé par une autre main en 1879. Voir la note de cette *Lettre* 4094.
Il n'est pas impossible que les lettres que nous présentons séparément à la date du 13 juin et à celle du 19 n'en fassent qu'une, étalée sur plusieurs jours. Le 20 juin le P. d'Alzon écrit à Mère Emmanuel-Marie : "J'écris à Sr Louise une grande lettre sur les Russes".
2. Ce titre figure dans la copie.
3. Ministre des Affaires étrangères du tsar Alexandre II. Le prince Alexandre Gortchakov avait succédé en cette qualité en 1856 au comte de Nesselrode.
4. Michel N. Katkov (1820-1887), apôtre du panslavisme et porte-voix des nationalistes ultra-russes dont la loi suprême est l'intérêt de la Russie, et de la Russie *orthodoxe* (BOUDOU, *o.c., II, p. 360).