DERAEDT, Lettres, vol.9 , p. 85

6 jun 1871 Lavagnac CORRENSON_MERE Emmanuel-Marie

Comment il se soigne – Le P. Emmanuel va arriver – La dentelle.

Informations générales
  • DR09_085
  • 4315
  • DERAEDT, Lettres, vol.9 , p. 85
  • Orig.ms. AC O.A.; D'A., T.D.30, n.346, pp.168-170.
Informations détaillées
  • 1 ASSISTANCE A LA MESSE
    1 AUBE
    1 CELEBRATION DE LA MESSE PAR LE RELIGIEUX
    1 CHAPELLE
    1 LINGE LITURGIQUE
    1 MALADIES
    1 RECITATION DE L'OFFICE
    1 REMEDES
    1 REPAS
    1 REPOS
    1 SACRISTAIN
    1 SOUFFRANCE
    1 SYMPTOMES
    2 BAILLY, EMMANUEL
    2 GIRY, MADAME LOUIS DE
    2 PUYSEGUR, JEAN DE
    3 LAVAGNAC
    3 MONTPELLIER
    3 NIMES
  • A LA MERE EMMANUEL-MARIE CORRENSON
  • CORRENSON_MERE Emmanuel-Marie
  • Lavagnac, le 6 [juin 18]71(1).
  • 6 jun 1871
  • Lavagnac
La lettre

Ma bien chère enfant,

J’avais dû aller, hier, à Montpellier, et, de là, à Nimes; mais point, je suis à Lavagnac. Qu’est-ce que je fais à Lavagnac? J’y fais très peu de chose. 1° Je ne dis pas la messe depuis cinq jours; 2° La nuit, je me promène d’un fauteuil à l’autre. Une fois, je suis resté quatre heures dans mon lit pour me dégonfler les pieds, qui sont devenus énormes à ce métier. La nuit dernière, j’ai voulu me coucher à minuit, mais avant minuit cinq minutes j’étais relevé. Cependant, par un effort suprême, de huit heures à huit un quart, je suis resté dans mes draps. Qu’ai-je donc? A la suite de promenades à l’humidité, je fus pris de maux de dents qui allèrent augmentant jusqu’à jeudi soir, où je ne dînai pas. Nous dînons à sept heures. Cette nuit ou la suivante, je ne me couchai pas du tout.

Dès que je suis au lit, mon état douloureux augmente, je préfère rester sur mon fauteuil. J’en ai trois excellents, je me promène de l’un à l’autre. Je n’emploie qu’un remède très simple, des gargarismes d’eau fraîche. Je ne sais s’ils me guériront, mais ils me soulagent à un point incroyable. Aussi si je ne les renouvelle pas toutes les cinq minutes, je suis sûr d’avoir les tempes et le côté gauche du nez endoloris à n’en pouvoir plus. Il faut que je me mette à courir pour avoir une gorgée d’eau bien fraîche. Dès que je l’ai dirigée du côté de la tête qui souffre, un quart de minute après il y a redoublement et, après un autre quart, apaisement prodigieux. Seulement si je veux dire mon bréviaire, il faut recommencer cette opération tous les deux ou trois psaumes. Depuis samedi matin, j’ai constamment du feu.

Depuis jeudi soir, je ne suis sorti qu’une fois pour entendre dimanche la Messe dans la sacristie, car dans la chapelle même je n’aurais pas voulu distraire les gens qui m’auraient vu me gargariser sept ou huit fois. Ce qui fait que je ne puis rester au lit, c’est qu’à moins de me gargariser constamment, les douleurs y augmentent. Si je me gargarise, je ne dors pas, et l’eau que je prends me retombe sur mon linge, mes draps, mon lit, etc. J’ai la plus affreuse envie de dormir, ce qui m’amène à me réveiller la tête dans la cuvette où je rejette un gargarisme. Je m’endors en tenant mon verre; hier, j’en ai cassé un. J’en ai laissé, en dormant, tomber un sur ma jambe et une heure après, sur mes genoux. Jugez si cela me rafraîchit; je n’ai jamais souffert aussi constamment pendant cinq jours de suite. Il faut dire que, dans les moments où l’eau fraîche me manque, l’eau tiède me cause de vives douleurs; je suis peu raisonnable si je me plains. Pourtant la dernière nuit a eu des moments très rudes et j’ai plus d’une fois gémi tout haut.

Une dépêche du P. Emmanuel m’apprend qu’il va m’arriver. Je remets ces quelques lignes au cocher qui va le chercher. Mon neveu, en allant hier à Montpellier, a prié Mme de Giry d’acheter 50 centimètres, et non 60 comme le porte votre lettre d’il y a un moment. Probablement Mme de Giry vous portera cette étoffe. Mon neveu que j’avais chargé de payer l’a oublié, mais avec Mme de Giry cela importe peu. Souvenez-vous que j’ai l’aube, et vous pouvez la remercier des dentelles.

Mais je me fatigue. Ma petite rage de dents me fait payer le plaisir de vous écrire. J’ai pris quelques bains de pieds; j’ai voulu me gargariser avec de l’eau de pavot; cela n’a fait ni chaud ni froid, l’eau froide est ce qui me va le mieux.

Adieu. A revoir dès que j’irai mieux.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Le ms porte *6 mai* par erreur: voir les *Lettres* 4313 et 4314.