DERAEDT, Lettres, vol.9 , p. 331

28 mar 1872 Paris GIRY_MADAME

Vous souffrirez moins quand vous vous oublierez vous-même et que vous vous plongerez toute en Dieu.

Informations générales
  • DR09_331
  • 4577
  • DERAEDT, Lettres, vol.9 , p. 331
  • Orig.ms. ACR, AM 213; D'A., T.D.37, n.14, pp.191-192.
Informations détaillées
  • 1 CHARITE ENVERS DIEU
    1 CONTRITION
    1 DROITS DE DIEU
    1 EGOISME
    1 OUBLI DE SOI
    1 PASSION DE JESUS-CHRIST
    1 SAINTE VIERGE
    1 SOUFFRANCE
    1 VIE SPIRITUELLE
    1 VOIE UNITIVE
    2 GIRY, MAURICE DE
  • A MADAME LOUIS DE GIRY
  • GIRY_MADAME
  • Paris, Jeudi saint, [28 mars 1872].
  • 28 mar 1872
  • Paris
La lettre

Hélas! dès la première page de votre lettre, ma chère Constance, je trouvais par instinct la solution, à la fin de la deuxième et à la troisième(1). Le Jésuite vous a disséquée, desséchée, en vous faisant replier sur vous-même. Voulez-vous que je vous dise quand vous souffrirez un peu moins? Car vous souffrirez toujours, car une douleur comme la vôtre ne se console jamais(2). Vous souffrirez moins, quand vous vous oublierez vous-même et que vous vous plongerez toute en Dieu. Voyons donc vos regrets. Vous avez souvent pleuré aux pieds de Notre-Seigneur sur la croix. Mais que de fois ne vous êtes-vous pas pleurée vous-même? Quel profit en tirerez-vous pour le ciel? Pensez donc moins à vous, quoique ce soit bien naturel, et pensez à la Passion, parce que c’est la vie surnaturelle qu’on y puise. Sachez vous souvenir que la vie du ciel c’est l’union à Dieu, et qu’on la commence ici-bas par un amour résigné. Qu’est Dieu? Et qu’êtes-vous? Et dans l’ordre de la pensée et de l’amour, quelle place Dieu doit-il occuper, quelle doit être la vôtre? Dieu a droit à tout, vous à rien. Pensez à Dieu toujours, aimez Dieu toujours, et prenez après cela tout ce qui restera pour vous. Ah! si nous savions nous perdre dans ces sentiments des droits de Dieu, comme nous comprendrions la nécessité de garder nos larmes dans notre poche, sauf pour pleurer nos péchés!

Je suis un cruel. Mais sur le Calvaire, à quoi pensait la Sainte Vierge? A elle ou à Dieu? Croyez-moi, oublions-nous pour nous plonger dans les plaies de Notre-Seigneur.

Adieu, ma fille. Je vais dire la messe et je prierai pour vous, de tout mon coeur.

E. D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Nous comprenons comme suit : "dès la première page, j'avais trouvé la solution de ce que vous me dites en deuxième et troisième pages".
2. La perte de son fils.