DERAEDT, Lettres, vol.9 , p. 341

21 apr 1872 Nîmes GERMINY Comte

Un malentendu à propos du congrès de l’enseignement.

Informations générales
  • DR09_341
  • 4586
  • DERAEDT, Lettres, vol.9 , p. 341
  • Orig.ms. ACR, AO 48; D'A., T.D.39, n.1, pp.278-281.
Informations détaillées
  • 1 BACCALAUREAT
    1 BONTE
    1 CERCLES CATHOLIQUES
    1 COMITES CATHOLIQUES
    1 CONGRES DE L'ENSEIGNEMENT LIBRE
    1 CONTRARIETES
    1 CRITIQUES
    1 ECOLES
    1 ENSEIGNEMENT SECONDAIRE
    1 ENSEIGNEMENT SUPERIEUR
    1 FRANCHISE
    1 PROGRAMME SCOLAIRE
    1 PUBLICATIONS
    1 RECONNAISSANCE
    1 REUNIONS POPULAIRES
    1 UNITE CATHOLIQUE
    2 ARISTE, JEAN-BAPTISTE D'
    2 BAILLOUD
    2 GUIBERT, JOSEPH-HIPPOLYTE
    2 LECUYER, LAURENT
    2 MINGASSON, ABBE
    2 PICARD, FRANCOIS
    2 PLANTIER, CLAUDE-HENRI
    3 BOURGES
    3 FRANCE
    3 LOUVAIN
    3 NEVERS
    3 NIMES
    3 PARIS
    3 PARIS, RUE FRANCOIS Ier
    3 ROME
  • A MONSIEUR LE COMTE DE GERMINY
  • GERMINY Comte
  • Nîmes, le 21 avril 1872.
  • 21 apr 1872
  • Nîmes
La lettre

Monsieur le Comte,

J’ai vivement regretté de ne point vous trouver quand je me suis présenté chez vous; j’avais choisi l’heure où vous recevez ordinairement. Je tenais à vous remercier de votre note si bienveillante, insérée par vous dans le Bulletin de la Société générale d’éducation à propos de la Revue d’enseignement chrétien(1).

Je vais chercher à expliquer le malentendu que vous semblez redouter, et à propos duquel vous voulez bien m’écrire(2).

1° Lorsque j’ai eu l’honneur de me présenter à votre réunion, je me permis de faire observer qu’il y avait nécessairement deux questions qui touchaient en même temps à l’enseignement supérieur et à l’enseignement secondaire: le programme des études et le baccalauréat. Je fis observer que je ne voulais pas toucher à la question de la fédération des établissements parce que les difficultés pratiques en semblaient trop grandes, mais je ne m’opposais pas à ce que d’autres que moi en fissent la tentative. Vous-même fîtes remarquer que l’utilité de deux congrès ressortait de la discussion. Quelqu’un, si je ne me trompe, le P. Lécuyer, dit que l’un s’occuperait des questions de défensive, l’autre des questions d’offensive, une autre personne ajouta: « Oui, des droits à conserver et des droits à conquérir ». Je demandai s’il me serait permis de publier cette distinction et l’on me répondit que je le pouvais. J’ai entendu plusieurs fois indiquer le 15 septembre comme l’époque de votre congrès, et je crois être certain qu’il fût convenu que l’un se tiendrait immédiatement après l’autre. Je pensais qu’après le congrès de l’enseignement secondaire, on pourrait tenir celui de l’enseignement supérieur, mais on m’a fait observer que, pour les chefs d’établissements de province, le 15 septembre serait un peu tard. C’est pour cela que je n’ai pas fixé exactement l’époque, afin de savoir si vous ne voudriez pas avancer votre réunion de huit jours, auquel cas nous aurions fixé la nôtre vers le 2 septembre. Dans l’intérêt des maisons de province, la première quinzaine de ce mois est évidemment en général la plus favorable.

Je regrette bien vivement de n’avoir pas connu l’assemblée générale dont vous voulez bien me parler. Ou moi, ou l’un des miens aurions sollicité la permission d’y prendre part. Vers cette époque, j’avais envoyé une adhésion générale à M. d’Ariste, au nom de l’évêque de Nîmes(3). Depuis, aucun renseignement ne me parvint, et je n’ai rien su, qu’aux vacances dernières, par quelques mots que me dit le P. Picard, et il ne me parla d’aucune réunion, de telle façon que c’est très sincèrement que nous avons cru avoir pris l’initiative du congrès. Vous avez désiré qu’il y en eût deux, je me suis rangé à cette idée. Vous avez désiré vous occuper de l’alliance ou fédération(4), je me suis bien gardé d’y toucher, soit parce qu’elle s’offrait à moi entourée de difficultés, soit parce que vous en aviez fait votre domaine et que je tenais très loyalement à ne pas empiéter sur votre terrain. A ce point de vue, pour rester les uns et les autres dans nos attributions je comprenais qu’en choisissant une des deux premières semaines de septembre, nous aurions pris, nous, les trois premiers jours, vous les trois derniers, ou bien vice versa, et qu’en une semaine toutes les questions eussent été traitées. Les deux congrès réclamés par vous avaient lieu, mais de façon à ce qu’après tout ils n’en fissent qu’un.

Vous voulez bien me dire que l’alliance sera une oeuvre permanente. Veuillez remarquer que je n’y fais pas la moindre opposition. J’avais compris que vous vouliez et l’alliance et le congrès, et il me semble que vous voulez encore ces deux choses; à quoi je ne songe pas à faire l’ombre d’opposition. Mais c’est à vous à le dire.

Les trois points où vous voyez du malentendu, s’éclairciront, si, vous rappelant que vous avez proposé deux congrès, vous nous permettez de parler de l’époque de notre congrès, du local de notre congrès, du secrétaire de notre congrès.

Et pour notre congrès, il y a eu hier huit jours, en allant avec M. Bailloud et au nom du bureau du congrès catholique, rendre à l’archevêque de Paris compte de nos travaux, je lui parlai de notre projet de nous réunir au cercle catholique. Il n’y vit pas de difficulté. Vous voyez que, pour mon compte, j’ai pris mes précautions à l’avance. Que si Mgr de Paris, qui a des bontés particulières pour moi, y trouvait des difficultés, je reviendrais bien vite à la première idée de nous réunir à Nevers, car la pensée d’aller à Paris n’est venue qu’à la suite de notre désir de rapprocher nos travaux des vôtres.

Je crois pouvoir vous assurer que la note accuse seulement la distinction, mais ni séparation ni dissentiment, au moins dans la pensée de ceux qui l’ont rédigée.

Si donc vous le voulez bien, nous en resterons à la note telle que l’Univers l’a donnée; mais si les explications que je vous soumets vous semblent éclaircir le malentendu, soyez assez bon pour rédiger vous-même une note explicative; et si, comme je l’espère, nous tombons d’accord, je la reproduirai dans la Revue de l’enseignement chrétien, et cette correspondance montrera et l’union des deux oeuvres et la distinction des deux courants, car le fond est là. Je crois que nous allons un peu plus loin que vous.

En vous offrant de rédiger vous-même la note, vous voyez combien je suis disposé à accepter de vos pensées tout ce qui n’est pas contraire aux nôtres. Permettez-moi de vous faire observer que mon désir le plus vif serait d’insérer dans le premier N° de notre revue le rapport du Père Lécuyer et que, si je ne l’ai pas demandé, c’est uniquement pour vous en laisser la primeur.

Vous paraissez craindre des froissements. Je les regretterais d’autant plus que je croyais avoir tout fait pour les éviter. Là où ils seront inévitables peut-être, c’est quand je me place peut-être à un point de vue plus radical que le vôtre.

Permettez-moi de vous remercier du fond du coeur de la confiance que vous voulez bien me témoigner et, en vous exprimant le bonheur que j’ai eu à vous connaître, de compter sur votre bienveillance pour interpréter ma pensée dans le sens de l’union et non de la division.

Veuillez agréer, Monsieur le Comte, l’hommage de mes plus respectueux sentiments.

E. D'ALZON.
Notes et post-scriptum
P.-S. -En relisant les lignes qui précèdent je m'aperçois que, dans ma hâte à vous répondre, je suis obscur. Permettez-moi de me résumer:|1° Je ne me doutais pas qu'un congrès d'enseignement eût jamais été tenu.|2° Je croyais que notre revue avait pris cette initiative.|3° J'ai cru que votre société désirait son congrès vers le 15 sept[embre] et j'ai cherché à entrer dans vos intentions.|4° J'ai voulu combiner la tenue de notre réunion avec la tenue de la vôtre, comme preuve de bonne entente.|5° Je n'ai pas parlé de l'alliance, parce que je ne voulais pas empiéter sur votre terrain.|6° Si le P. Lécuyer veut nous donner de suite son rapport, nous l'imprimerons avec un vrai bonheur dans le N° de Mai; veuillez le faire porter rue François Ier.|7° La manière dont l'archevêque de Paris m'a parlé (de lui-même), il y a deux mois, du comité catholique m'a prouvé que *sur l'invitation de Rome*, il l'entourait de toute sa bienveillance. Depuis, il m'en a reparlé, et j'ai eu soin, le voyant si bien disposé, de le prévenir de nos projets.|Tel est, il me semble, le résumé de mes réponses à vos observations. Je souhaite qu'il vous prouve mon désir de nous poser sur le terrain de la plus absolue franchise.|E.D'ALZON1. Le numéro de mai 1872 de la *R.E.C.* reproduisit cet article de M. de Germiny. On pouvait y lire : "Nos adhérents comprendront sans peine combien nous avons été heureux de voir de tels combattants entrer en lice [...]. Les auteurs de la *Revue* savent garder leur personnalité et, dût-il en résulter quelque différence d'appréciation entre nous, nous nous en félicitons [...]" (t.3, pp. 70-72).
2. Voir la lettre précédente.
3. M. de Germiny expliquait que depuis longtemps la *Société d'éducation et d'enseignement* s'intéressait à l'enseignement supérieur et qu'en 1870 déjà elle avait rédigé un projet de loi et tenu une assemblée générale réunissant des membres venus de toute la France et même de l'Université de Louvain. - M. d'Ariste, président du conseil d'administration du chemin de fer de l'Est, avait présidé au Congrès catholique la commission de l'enseignement primaire et populaire.
4. Le Congrès catholique a créé une commission chargée d'organiser une fédération des maisons d'éducation chrétienne et en a confié la présidence au P. Lécuyer. Mais une réunion tenue à Bourges les 15, 16 et 17 avril sous la direction de l'abbé Mingasson, a pris les devants et créé l'*Alliance des maisons d'éducation chrétienne* dont elle a confié la présidence à M. Mingasson, supérieur du petit séminaire de Bourges. Ni M. de Germiny, ni le P. d'Alzon ne sont encore au courant. Le compte-rendu de la réunion de Bourges fut publié par le numéro de juin de la *R.E.C.* (t. 3, pp. 119-128).