DERAEDT, Lettres, vol.10 , p. 66

Mon bien cher ami,

Votre lettre du 24 m’a vivement intéressé. Je suis disposé à accepter la mission qu’on me propose(1), mais permettez-moi quelques questions:

1° Où est Don Carlos?

2° Qui est le représentant du Pape dont vous me parlez?

3° A-t-on l’approbation du comte de Ch[ambord]?

4° Peut-on faire quelque chose pour l’obtenir? Vous savez l’adresse de son principal agent, le comte de Blacas, 52, rue de Varennes. Ne peut-on pas lui dire un mot?

Devrais-je aller en Espagne, quelle garantie que ma mission serait autorisée(2)?

Pour l’amour de Dieu, soignez-vous et ne vous faites pas enterrer. Envoyez-moi des croix rouges(3). J’irai ou n’irai pas à Lourdes, selon l’utilité pour l’affaire dont vous me parlez. Votre nièce est mûre, faites-la partir pour Auteuil. Elle est charmante. Je vais bien, à condition de rester étendu une partie de l’après-midi.

Mille tendresses à toute la communauté.

E.D'ALZON.

1. Voici ce qu'avait écrit le P. Picard. Une *Fédération catholique* était décidée à soutenir les droits à la couronne d'Espagne de Don Carlos (1848-1909). Elle lui proposait 25 millions, l'adhésion de 50 généraux, un mouvement tout prêt dans l'Espagne entière à condition notamment "qu'il reconnaisse en tous points et fasse exécuter dans tout le royaume les décrets infaillibles du Souverain Pontife et comme conséquences : protection des droits de l'Eglise, unité de culte etc." Le P. Picard donnait ensuite quelques explications sur le mouvement puis il en venait à l'objet de sa lettre. "On m'a demandé, écrivait-il, quel serait l'homme assez indépendant, assez énergique et assez à l'abri de tout soupçon d'ambition pour avoir et exercer une véritable influence sur l'esprit de Don Carlos dans le cas où il hésiterait. Je vous ai désigné comme de juste. J'ai affirmé que vous étiez prêt à favoriser et à soutenir toute organisation fortement catholique, mais que pour s'assurer votre concours on devrait aller vous voir, vous apporter des documents bien précis, des noms, des détails, vous convaincre enfin qu'on ne vous demande pas une démarche peu sérieuse."
2. Réponse non datée du P. Picard : 1° A Pau; 2° je ne me rappelle pas son nom; 3° et 4° il est difficile de demander l'approbation du comte de Chambord tant que don Carlos n'accepte pas. Enfin, il ne s'agit pas d'aller en Espagne mais à Pau, tout au plus à Bayonne.
3. Voir *Lettre* 4823, n.2.