DERAEDT, Lettres, vol.10 , p. 71

8 jul 1873 Le Vigan BAILLY_VINCENT de Paul aa

Le muscat du P. Hippolyte – J’accepte votre programme – Les points essentiels pour moi – Varia.

Informations générales
  • DR10_071
  • 4826
  • DERAEDT, Lettres, vol.10 , p. 71
  • Orig.ms. ACR, AG 333; D'A., T.D.27, n.328, pp.271-273.
Informations détaillées
  • 1 CONGRES DE L'ENSEIGNEMENT LIBRE
    1 ENSEIGNEMENT
    1 ESPRIT CHRETIEN DE L'ENSEIGNEMENT
    1 FORMATION DES JEUNES AUX VERTUS
    1 PREDICATION
    1 QUERELLE DES AUTEURS CLASSIQUES
    1 TOLERANCE
    1 VIN
    2 COLETTE, AUBAIN
    2 LAURENT, CHARLES
    2 NASSER-ED-DIN-SHAH
    2 SAUGRAIN, HIPPOLYTE
    2 THONNARD, FRANCOIS-JOSEPH
    3 LYON
    3 NIMES
    3 PERSE
  • AU PERE VINCENT DE PAUL BAILLY
  • BAILLY_VINCENT de Paul aa
  • Le Vigan, 8 juillet [18]73.
  • 8 jul 1873
  • Le Vigan
La lettre

Pendant que j’écris cette date, le P. Hippolyte met sur ma table deux verres d’eau, l’un pour lui, l’autre pour moi: mais le gueux, à qui j’ai lu votre lettre, n’y met pas de sucre, il y met du muscat -dans les verres, non dans les lettres.

Interrompu pour boire sans sucre!!!

C’est bu et c’est bon. Ce qui est meilleur, c’est votre programme. Mais je l’adopte sans discussion. D’abord, c’est plus tôt fait; ensuite je trouve, sauf trois ou quatre points, un immense inconvénient à discuter un programme pareil, qui doit être le fruit de l’expérience. Sauf quelques principes, je suis disposé à accepter tout à titre d’essai, à repousser tout de peur de me blouser. Voici les points essentiels:

1° Faire un programme, non seulement de l’enseignement religieux, mais de l’esprit religieux à mettre dans tout l’enseignement et exposer tous les obstacles que le baccalauréat met à cet enseignement et à cet esprit religieux.

2° Des moyens de rendre à la jeunesse et par la jeunesse les moeurs religieuses dans la famille.

3° Pour cela nécessité de développer le courage chrétien.

4° L’esprit de conciliation, considéré comme le plus grand ennemi du courage chrétien, et, par conséquent, des moeurs chrétiennes.

5° Nécessité du courage chrétien chez les maîtres qui l’inspireront aux élèves, nemo dat quod non habet, et c’est là le hic très grave, je vous assure.

6° J’arriverai à cette conclusion, nécessité de prêcher des retraites aux maîtres, pour leur prouver: 1° qu’ils doivent être chrétiens; 2° qu’ils doivent abjurer la poltronnerie magistrale.

Quant à la question des auteurs païens ou chrétiens, je la poserais ainsi: Il y a tant de beautés dans les auteurs chrétiens que, tout en respectant les païens et en nous en servant comme modèles de forme grammaticale, nous n’avons à peu près que le temps d’étudier les chrétiens. Quant à la perfection de l’art, il est dans la perfection du beau, et la perfection du beau est dans la parfaite splendeur du vrai. Il y a deux vrais, le vrai naturel et le vrai surnaturel. Sans dire du mal d’aucun, je préfère celui des deux qui est le plus divin, parce qu’étant la source de plus de vertus divines, il est le principe de plus de beautés réelles(1).

Je pourrais poursuivre jusqu’à demain. Adieu, ami fondant, fondu, fondé, fusible.

E.D’ALZON.

Post-scriptum. Si vous voulez de technique, où en trouverez-vous plus que dans le P. Laurent, qui, à partir du 5 août, sera à Lyon à prendre le frais à la retraite. Invitez-le au Congrès, pressez-le, sollicitez-le. Je vous donnerai comme aide un novice qui va prendre l’habit, après avoir été près d’un an professeur chez nous, à Nîmes. Et vous avez le courage de ne rien dire du shah, sinon que vous êtes allé pour le voir? Mais l’avez-vous vu?

E.D'ALZON
Notes et post-scriptum
1. Cette page résume bien les idées du P. d'Alzon sur l'enseignement. Sans doute les retrouve-t-on dans le projet de programme du congrès de l'enseignement chrétien que vient de lui présenter Vincent de Paul, mais pas aussi nettement exprimées. Ce projet parut dans le n° de juillet de la R.E.C. (t.5, p.193-200).
Sur le P. d'Alzon et l'enseignement :
A.COLETTE, *L'idéal pédagogique du P. d'Alzon*, dans *Mélanges d'Alzon*, p.227-250, Saint-Gérard, 1952.
Fr.-J. THONNARD, *Le P. d'Alzon et l'enseignement*, ibid. p.253-270.