DERAEDT, Lettres, vol.10 , p. 337

15 nov 1874 Nîmes PICARD François aa

Le P. Vincent de Paul – A vous d’agir – J’ai besoin de chaleur.

Informations générales
  • DR10_337
  • 5134
  • DERAEDT, Lettres, vol.10 , p. 337
  • Orig.ms. ACR, AF 86; D'A., T.D.26, n.474, p.65.
Informations détaillées
  • 1 ALUMNATS
    1 ANIMATION PAR LE SUPERIEUR
    1 MALADIES
    1 VOCATION RELIGIEUSE
    2 BAILLY, BERNARD
    2 BAILLY, EMMANUEL
    2 BAILLY, VINCENT DE PAUL
    2 BENSA, ANTOINE
    2 CICERON
    2 HALLUIN, HENRI
    2 MAUBON, JOSEPH
    2 MILLERET, MARIE-EUGENIE
    3 ARRAS
    3 NICE
  • AU PERE FRANCOIS PICARD
  • PICARD François aa
  • Nîmes, le 15 nov[embre] 1874.
  • 15 nov 1874
  • Nîmes
La lettre

Cher ami,

Vous me demandez ce qu’il y a au fond de la lettre du Père V[incent] de Paul.

1° Un léger entêtement de sa part de ne tenir aucun compte des recommandations imprimées pour la réception à l’alumnat.

2° De là une irritation du P. Emmanuel de ce que son frère passe à pieds joints sur tout ce qu’il lui demande.

3° Une certaine fatigue de tête du P. V[incent] de Paul, que Bernard, qui a passé la journée hier ici, m’a expliquée par de très amusants exemples.

4° Le défaut de mémoire du P. Joseph, qui a été fortement grondé de n’avoir pas pris la peine d’avertir de son arrivée. Il est vrai que je l’avais annoncé au P. V[incent] de Paul deux fois, sans compter les avertissements de son frère.

5° La recommandation expresse faite par moi au P. Joseph de vous consulter sur ce qu’il avait à faire à Arras. Mais le P. Joseph, qui nous a joué un tour semblable, l’an dernier ici, et nous a fait perdre 4.000 ou 5.000 francs, est bien capable d’avoir recommencé. Vous êtes chargé d’Arras et je m’en rapporte à vous. Je l’ai dit au P. Joseph qui oublie très facilement, ce qui l’aide à se tirer de dessous ce qui lui déplaît(1).

Maintenant, comprenez-vous? Tout ce que vous dites est parfaitement entendu, mais le P. V[incent] de Paul avait reçu la migraine des mains du calorifère. Maintenant reprenons. Vous êtes chargé d’Arras et de parler fortement au Père Joseph, de faire comprendre au P. V[incent] de Paul qu’il doit se conformer aux conditions posées pour la réception aux alumnats. Il a dernièrement envoyé un bâtard, qui ne pourra être dès lors que religieux. Du reste, j’irai à Nice plus tôt que je ne croyais. J’ai eu une petite rechute et j’ai besoin de chaleur.

La supérieure générale, arrivée hier soir, y viendra avec ou avant moi.

Adieu, et bien tendrement vôtre.

E.D’ALZON.

Ne regrettons pas trop les incertitudes de Bensa. Je vous dirai pourquoi. Le P. Emmanuel m’affirme que, dans sa dernière au P. Joseph, il a expressément recommandé à celui-ci de s’entendre avec le P. V[incent] de Paul pour prendre sa direction(2).

E.D'ALZON
Notes et post-scriptum
1. Dans cette affaire, le P. d'Alzon nous semble inconsciemment victime de l'emprise qu'exerce sur lui le P. Emmanuel. Car, à considérer les diverses pièces du dossier (échange de lettres entre E. Bailly, Vincent de Paul et Picard entre le 8 et le 13 novembre), ce ne sont ni la fatigue ou l'entêtement de Vincent de Paul, ni le défaut de mémoire ou l'habileté du P. Joseph que nous incriminerions avant tout, mais l'autoritarisme du "petit Père de Nîmes" et sa prétention d'agir en tout et toujours au nom du P. d'Alzon.
Voici un passage de la lettre du 8 novembre d'Emmanuel à son frère : "Le P. d'Alzon tient à ce que le P. Joseph avec sa bande ne séjourne pas à Paris et qu'il ne la promène pas dans la capitale. Il désire qu'arrivant le mardi matin, le P. Joseph reparte après messe et déjeûner avec sa bande pour Arras afin d'y arriver dans l'après-midi. Vous aurez à empêcher que le P. Halluin détourne le P. Joseph de l'alumnat et l'alumnat de son vrai but. [...] Il faudra le maintenir dans son alumnat et rien qu'à son alumnat..."
Cette lettre a été mise sous les yeux du P. Picard. Il dit à Emmanuel ce qu'il en pense: "Le P. d'Alzon donne rarement des ordres, il trace une direction, il sait fort bien que nous sommes tous disposés à l'accueillir [...]. Or votre lettre [...] est un *sic jubet* d'Alzon d'un bout à l'autre. "Le P. d'Alzon *veut*... le P. d'Alzon *ordonne*... le P. d'Alzon *tient à*... les petits *devront*... *Vous aurez à empêcher*... *il faudra maintenir*...". Vous qui connaissez si bien la littérature, n'oubliez pas le *videtur* de Cicéron. Les ordres multipliés font une impression désagréable. Vous avez une grande qualité, celle de voir les détails en même temps que l'ensemble. De près tenez aux détails et à l'ensemble. De loin, exigez l'ensemble et signalez aimablement les détails" (13 novembre).
2. Que le P. Joseph aille chercher ses directives auprès du P. Vincent de Paul (rien à voir avec Bensa).