DERAEDT, Lettres, vol.11 , p. 21

13 jan 1875 Nice MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Vous êtes mille fois bonne – L’influence de la mer – Ma vieille machine qui se disloque – Une instruction à vos filles sur l’esprit de l’Assomption et mes souvenirs sur vos commencements – La conclusion de l’affaire de Lourdes – A propos de religieuses.

Informations générales
  • DR11_021
  • 5212
  • DERAEDT, Lettres, vol.11 , p. 21
  • Orig.ms. ACR, AD 1677; D'A., T.D.24, n.1196, pp.224-225.
Informations détaillées
  • 1 ACCIDENTS
    1 ACHAT DE TERRAINS
    1 CURES D'EAUX
    1 ESPRIT DE L'ASSOMPTION
    1 MISSIONS ETRANGERES
    1 RELIGIEUSES DE L'ASSOMPTION
    1 SANTE
    1 SERMONS
    1 SUPERIEURE
    1 VERTUS
    2 COMMARQUE, MARIE-THERESE DE
    2 HORE, MARIE DE L'INCARNATION
    2 JOURDAN, CESAR-VICTOR
    2 LANGENIEUX, BENOIT-MARIE
    2 NIEPCE, DOCTEUR
    2 PICARD, FRANCOIS
    2 ROGIER, MARIE-ADRIENNE
    2 VITTE, PIERRE-FERDINAND
    3 AIGUES-MORTES
    3 LOURDES
  • A LA MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • Nice, 13 janvier 1875.
  • 13 jan 1875
  • Nice
La lettre

Vous êtes mille fois bonne, ma chère fille, de m’écrire comme vous le faites, et de me proposer de prolonger mon séjour ici. Mais M. Niepce a tranché la difficulté; il m’a demandé de rester jusqu’au 1er février, et je le lui ai accordé. Rester davantage aurait de graves inconvénients. J’ai passé ici un temps charmant, et pourtant voilà quelques jours que je sens une surexcitation nerveuse, que je ne puis expliquer que par l’air de la mer. Cet air m’a toujours été très mauvais. Quatre ou cinq bains de mer m’ont rendu malade pour deux mois. Et comme l’expérience s’est répétée rien que pour avoir été ou prendre un seul bain, ou respirer le soir sur la plage d’Aigues-Mortes, par de belles soirées d’été, je crains que cette crispation nerveuse, qui s’est traduite ou par des crampes d’estomac ou par des engourdissements de la moitié du corps, ne viennent de là. Du reste, ce qui me rassure, c’est que cela voyage. Aujourd’hui, pour la première fois, j’ai souffert du foie. Dans tous les cas j’ai été admirablement soigné. La faute en est à ma vieille machine qui se disloque. Cela fait du bien, en rendant sans cesse présente la pensée de la mort.

Mère Marie-Thérèse sort d’ici. Hier j’avais fait, à vos filles seulement, une instruction sur l’esprit de l’Assomption; elles en ont paru satisfaites, et le P. Picard m’en a remercié, parce que cela va aussi aux religieux. Mère M.-Thérèse me prie de continuer, et, de plus, de l’aider à refaire les commencements de l’Assomption, qu’elle est chargée d’écrire par vous. Je tâcherai de leur être agréable sous ce rapport. Il a été convenu que je raconterai ce que je sais, aux récréations.

Je vous félicite de la conclusion de l’affaire de Lourdes. Le P. Picard est convaincu que M. Langénieux n’aurait pas agi ainsi, si M. Jourdan ne tenait pas à être bien avec vous. Je présume que vous aurez la passerelle, et dans ce cas votre situation sera réellement très belle. Vous aurez le terrain, vous n’aurez plus à vous presser(1).

Maintenant pour Soeur M. de l’Incarnation, si elle m’écrit, que dois-je lui répondre? Vous savez que je la crois toquée et ne tiens pas du tout à me mêler d’elle. Soeur M.-Thérèse croit qu’elle ne veut qu’une chose, être supérieure. Je crois quelquefois que Soeur M.-Adrienne ferait bien pour là-bas(2). Elle a maintenant bon esprit; elle est plus Soeur de la Charité qu’Assomptiade par une certaine vulgarité, qui a son avantage là-bas. Elle n’a aucun lien de famille, elle a gouverné longtemps l’intérieur de son grand-père, elle sait se suffire à elle-même, elle a tous les petits talents de ménage et met la main à tout. La confiance de Mgr Vitte la comblera de bonheur. Elle a beaucoup souffert. Je crois que si cela vous va, c’est à moi à la disposer.

Laissez-moi vous dire que je prierai bien pour vous dimanche, et que je lui(3) demanderai cette grande sainteté d’une ancienne religieuse et d’une fondatrice.

Bien tendrement vôtre.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Mgr Langénieux avait demandé pleins pouvoirs pour acheter le terrain de Lourdes qu'il réservait aux R.A., et Mère Marie-Eugénie et son conseil avaient répondu affirmativement (lettre au P. d'Alzon du 9 janvier). Il faudra cependant attendre 1882 pour que la fondation de Lourdes se fasse (*Origines de l'Assomption*, IV, p.293). - Mgr Langénieux, évêque de Tarbes depuis 1873 seulement, venait d'être appelé au siège archiépiscopal de Reims. Mgr César-Victor Jourdan (1813-1882) lui succédait à Tarbes; nommé et élu en 1874, il allait recevoir l'ordination épiscopale le 24 février suivant. M. Jourdan avait été le supérieur ecclésiastique des Religieuses de l'Assomption à Paris en 1867.
2. En Nouvelle-Calédonie, d'où Sr Marie de l'Incarnation vient de revenir.
3. A Jésus, en la fête de son Saint Nom, que l'on célèbre en ce deuxième dimanche après l'Epiphanie et qui est celle de Mère Marie-Eugénie de Jésus.