DERAEDT, Lettres, vol.11 , p. 247

11 sep 1875 Le Vigan PICARD François aa

L’abbé Delalleau – Le noviciat du P. Hippolyte – Les exigences d’un vrai noviciat – L’alumnat du Vigan.

Informations générales
  • DR11_247
  • 5457
  • DERAEDT, Lettres, vol.11 , p. 247
  • Orig.ms. ACR, AF 118; D'A., T.D.26, n.506, pp.100-102.
Informations détaillées
  • 1 ALUMNATS
    1 AMOUR DES AISES
    1 CHOIX
    1 CONSTITUTIONS DES ASSOMPTIONNISTES
    1 CRITERES D'ADMISSION AU POSTULAT
    1 CURE
    1 DECADENCE
    1 DEPARTS DE RELIGIEUX
    1 DISSIMULATION DE RELIGIEUX
    1 EMPLOI DU TEMPS
    1 ESPRIT RELIGIEUX
    1 ETUDIANTS EN PHILOSOPHIE
    1 ETUDIANTS EN THEOLOGIE
    1 EXAMEN DES CANDIDATS
    1 EXERCICES RELIGIEUX
    1 EXPULSION
    1 FORMATION DES NOVICES
    1 FRANCHISE
    1 GENEROSITE DE L'APOTRE
    1 IDEES DU MONDE
    1 INTELLIGENCE
    1 LUXURE
    1 MAITRE DES NOVICES
    1 MANQUEMENTS A LA VIE RELIGIEUSE
    1 NOVICE
    1 NOVICIAT
    1 NOVICIAT DES ASSOMPTIONNISTES
    1 PELERINAGES
    1 POSTULANT
    1 RENVOI D'UN ELEVE
    1 REPRESSION DES ABUS
    1 SCANDALE
    1 SUPERIEUR GENERAL
    1 SURVEILLANCE PAR LE SUPERIEUR
    1 TRAVAIL
    1 VIE RELIGIEUSE
    1 ZELE APOSTOLIQUE
    2 BAILLY, EMMANUEL
    2 BRUN, HENRI
    2 DELALLEAU, GERY
    2 DESCAMPS, PIERRE
    2 DUMAZER, ALEXIS
    2 GERMER-DURAND, JOSEPH
    2 JOULE, JEAN-MARIE
    2 SAUGRAIN, HIPPOLYTE
    3 NICE
    3 NIMES
    3 PARIS
    3 SALETTE, LA
    3 VIGAN, LE
  • AU PERE FRANCOIS PICARD
  • PICARD François aa
  • Le Vigan, 11 sept[embre 18]75.
  • 11 sep 1875
  • Le Vigan
La lettre

Mon cher ami,

Vous vous montez un peu la tête à propos de l’abbé Delalleau(1), comme vous vous l’étiez montée à propos de la Salette. Je n’avais jamais eu l’idée que vous fussiez allé à la Salette, il y a un mois. Je n’avais pas l’idée de faire faire à l’abbé Delalleau son noviciat à Nîmes. Seulement, pour tourner la difficulté avec ses supérieurs de Saint-Bertin, il m’avait prié d’être son directeur, et j’avais trouvé bon, non seulement de lui écrire, mais de le voir. Maintenant, s’il y a inconvénient à ce que le supérieur général voie non pas les novices, non pas les postulants au noviciat, mais les gens qui parlent d’entrer et qui demandent de décider en dernier ressort, je n’ai plus rien à dire. Avez-vous les diverses lettres que l’abbé Delalleau m’a écrites?

Pour revenir une fois pour toutes sur le noviciat dirigé par le Père Hippolyte, établissons:

1° Que quelques sujets ont été retirés trop tôt;

2° Que l’on avait trop confondu l’alumnat avec le noviciat;

3° Que l’on avait reçu au Vigan comme à un alumnat quelconque des gens trop âgés;

4° Que le noviciat était à peu près nul.

Si l’on eût surveillé un peu plus les novices, on n’aurait pas eu à déplorer hors du noviciat des abus que le noviciat renfermait, parce qu’on ne surveillait pas. Voilà ce que je constate à la suite de l’affaire de l’ex-Père Jean-Marie. Inutile de récriminer, mais le noviciat renfermait des immoralités épouvantables, et jamais je n’en ai su le premier mot. Pourquoi? Ou bien l’on ne surveillait pas, et alors qu’était le noviciat? Ou l’on surveillait, on savait et l’on ne me disait rien. C’est l’un des deux. Et s’il faut vous dire toute ma pensée, le P. Hippolyte qui jouissait d’une estime et d’une considération universelles avait trop à faire au dehors pour faire bien au dedans, et le noviciat ne se faisait pas mieux au Vigan qu’à Nîmes. En s’en allant, le P. Jean-Marie a laissé une lettre, où il déclare qu’il n’est tombé dans ces désordres que parce que, depuis longtemps, ses exercices de piété étaient extrêmement abandonnés. Tel était le socius du maître des novices, et le maître des novices ne disait rien. Qui surveillait le noviciat, quand le maître et le socius faisaient défaut?

Ceci n’est point pour récriminer, mais pour bien établir que le noviciat ne pouvait être grand-chose avec un système pareil. Si j’y songe, je vous porterai à Paris une lettre du P. Emmanuel remontant à deux ou trois ans et jugeant les abus du noviciat. Vous verrez ce que c’était. Consultez le P. Germer; je serais bien étonné si, comme le P. Alexis et le P. Emmanuel, il ne vous disait pas que l’esprit religieux se prenait plus à Nîmes qu’au Vigan. Un exemple sur cent. Le P. Alexis savait que des novices donnaient des rendez-vous à des personnes du dehors dans le porche qui est sous la chapelle. Quel remède y a-t-il apporté? Le P. Jean-Marie le savait. On m’a assuré qu’il en savait bien d’autres, mais que les menaces de certains novices lui fermaient la bouche. J’ai recueilli cette assertion très catégorique, mais je n’ai pu la vérifier. Convenez que ce n’était pas la peine de demander qu’on formât des novices pendant un certain temps pour les former ainsi. Je n’insiste pas, mais croyez qu’il est bon qu’on sache tout. Peut-être cela ferait-il cesser certaines plaintes!

Je crois qu’au bout d’un mois, deux au plus, un jeune novice est ou doit être connu et que, s’il ne marche pas, il faut le renvoyer. Vous parlez de 7 ans pour les jeunes novices et religieux. Entendons-nous. Moi, je parle de 9 ans, s’ils sont capables, 2 ans de noviciat, 3 ans de philosophie, 4 ans de théologie; mais s’ils ne sont pas capables, 5 ans doivent suffire, 2 ans de noviciat, un an de philosophie, 2 de théologie. C’est le système des Jésuites. Nos Constitutions portent un an de noviciat au noviciat et un an dans une maison de la Congrégation. Veuillez vérifier. Du reste, j’irai passer le mois d’octobre à Paris, et si vous avez à faire quelques excursions vers Pâques, j’irai vous suppléer et je ne dis pas le temps que je resterai à Paris, si je ne suis pas mort.

Le P. Brun vient de me répéter, il y a un moment, l’horreur du P. Alexis pour le noviciat de Paris. Ce n’est donc pas à moi seul qu’il l’a confiée. Le P. Brun ne pense pas que ses enfants puissent marcher aussi vite que ceux du P. Pierre. Je le comprends, le choix a été moins bien fait. J’estime qu’il importe de ne verser le bienfait d’une éducation gratuite que sur des enfants d’élite. Ici encore, ceux qui veulent être curés sont plus nombreux. Je ne cherche pas à attirer les moins intelligents, à qui un presbytère sourit. Ici, les études sont moins fortes, la tenue extérieure à la chapelle et ailleurs est préférable. Avec plus de formes, il y a moins de vie et de dévouement. Evidemment, nous rendrons les deux Niçards à l’évêque de Nice; ils sont gracieux, mais trop humains et trop mous pour la vie religieuse.

Totus tibi.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Voir *Lettre* 5452 et n.1.