DERAEDT, Lettres, vol.12 p. 29

30 jan 1877 Rome DUGAS Jeanne de Chantal oa

Méditez souvent sur les défauts à corriger et les vertus à acquérir – Oubli de soi et ferveur – Les Soeurs – Les fonds que vous voudriez avoir – Ce que doit être une Oblate supérieure en missions étrangères.

Informations générales
  • DR12_029
  • 5842
  • DERAEDT, Lettres, vol.12 p. 29
  • Orig.ms. ACR, AM 5; D'A., T.D. 36, n. 5, pp. 18-21.
Informations détaillées
  • 1 ABUS DES GRACES
    1 AMITIE
    1 AMOUR DU CHRIST
    1 AMOUR FRATERNEL
    1 BIEN SUPREME
    1 CONGREGATION DE LA PROPAGANDE
    1 DEFAUTS
    1 DISCIPLINE INSTRUMENT
    1 DON DE SOI A DIEU
    1 DOUCEUR
    1 EMPLOI DU TEMPS
    1 EPOUSES DU CHRIST
    1 ESPRIT CHRETIEN
    1 ESPRIT D'INITIATIVE
    1 ETERNITE
    1 FIDELITE A L'ESPRIT DE LA REGLE
    1 LUTTE CONTRE LE PECHE
    1 MALADIES MENTALES
    1 MANQUEMENTS A LA REGLE
    1 MAUVAISES CONVERSATIONS
    1 OBLATES
    1 ORAISON
    1 OUBLI DE SOI
    1 PAPE
    1 PATERNITE SPIRITUELLE
    1 PECHE MORTEL
    1 PIETE
    1 PROGRES DANS LA VIE SPIRITUELLE
    1 PRUDENCE
    1 PUNITIONS
    1 RELATIONS ENTRE RELIGIEUX
    1 REPRESSION DES ABUS
    1 RESSOURCES FINANCIERES
    1 SAINTETE
    1 SALUT DES AMES
    1 SCANDALE
    1 SEVERITE
    1 SUPERIEURE
    1 VERTUS
    1 VIE RELIGIEUSE
    2 BRESSON, JUSTINE
    2 BRUN, AUGUSTINE
    2 CAMPREDON, GABRIELLE
    2 GALABERT, VICTORIN
    2 MILLOT, MONIQUE
    2 PIE IX
    2 SABATIER, MARTHE
    2 SALZE, THERESE
    3 ANDRINOPLE
    3 ROME
  • A SOEUR JEANNE DE CHANTAL DUGAS
  • DUGAS Jeanne de Chantal oa
  • Rome, le 30 janvier 1877.
  • 30 jan 1877
  • Rome
La lettre

C’est de Rome que je vous écris, ma chère fille, et je vous annonce que les Oblates ont eu, avant-hier soir, une bénédiction du Saint-Père. Vous pouvez le dire au P. Galabert.

Quant à vous, ma bien chère enfant, je voudrais que vous pussiez faire souvent votre méditation, que je vous recommande de faire la plus longue possible, sur vos défauts, sur le moyen de les corriger, sur les vertus que vous n’avez pas et que vous devez chercher à acquérir. Je m’en rapporte parfaitement au P. Galabert pour vous faire des observations sur le détail de votre vie, mais il y a un fond général sur lequel je crois devoir appeler votre attention; ce sera pour tout à l’heure.

Ce que vous me dites des Soeurs ne me surprend pas. Aussi je voudrais que vous prissiez pour grande résolution de rendre votre ou plutôt vos communautés les plus ferventes du monde. Vous n’y arriverez pas tout de suite, mais vous y arriverez, si vous savez vous oublier complètement vous-même. Soeur Thérèse n’a pas toujours bien sa tête. Quant à Soeur Marthe, je crois qu’il faut lui tenir un grand langage de foi, éviter les plaisanteries. Quant à Soeur Augustine, elle m’a écrit une lettre de folle, mais je crois lui avoir bien rabattu le caquet. Soeur Monique et Soeur Gabrielle seront toujours de pauvres têtes, mais faites leur comprendre qu’il y a peu de profit à se faire détester de ses Soeurs. Si on ne mate pas Soeur Justine, on aura bien de l’ennui avec elle plus tard. Mais au-dessus de tout il faut, d’une part, aux yeux de tout le monde, vous entendre parfaitement avec le P. Galabert et qu’au dehors on ne voie jamais les différents points de vue et tiraillements que vous pouvez avoir, supposé que vous en ayez. Dites-lui que je ne lui écris pas, parce que je ne sais pas où il est et que j’aurais bien voulu avoir le mémoire que je lui avais demandé. J’attendrai quelques jours avant d’aller à la Propagande. Quant aux fonds que vous voudriez avoir, je ne demanderais pas mieux que de vous les envoyer, mais on me les subtilise à chaque instant. J’espère pourtant pouvoir disposer de quelque chose avant le mois de septembre, et peut-être plus tôt.

Faites tous mes compliments les plus affectueux à vos Soeurs et croyez-moi bien paternellement vôtre en N.-S.

E.D’ALZON.

Je joins ici quelques observations sur ce que, selon moi, doit être une supérieure à Andrinople. Faites longtemps votre méditation là-dessus et prenez trois fois la discipline pour obtenir de bien comprendre.

Note sur ce que doit être une Oblate supérieure en missions étrangères.

1° Son but avant tout est de se sanctifier par l’oubli le plus complet d’elle-même, afin de mettre toujours l’esprit de Notre-Seigneur à la place du sien et n’être que son instrument dans ce qu’elle peut faire pour le salut des âmes.

2° Elle doit renouveler le plus souvent possible le don d’elle-même à Jésus-Christ, son époux, se souvenant qu’elle n’est pas seulement sa servante, mais son épouse, et pour cela demander sans cesse son amour le plus ardent dans tous les plus simples détails de la vie.

3° Elle n’est pas seulement épouse de N.-S. en tant que religieuse, elle est encore mère en tant que supérieure, et elle doit avoir pour les âmes de ses Soeurs la tendresse la plus maternelle. Pour en remplir les devoirs, elle doit faire observer et la règle et l’esprit de la règle, ne laissant jamais rien passer des violations qui peuvent être faites, mais surtout inspirant le désir de prendre cet esprit, que l’on perd si facilement quand il n’est pas l’objet d’une application toute particulière.

4° Elle doit punir, mais avec circonspection, avec grand calme, douceur et fermeté.

5° Elle est obligée d’être toujours un modèle vivant, de façon que les Soeurs puissent dire sans cesse: « Notre supérieure est une vraie sainte ». Si elle ne le devient pas, son action sera nulle.

6° Mais il ne faut pas qu’elle soit une sainte pour elle, il faut qu’elle le soit pour les autres en ce qu’elle doit avoir les vertus d’une supérieure. Ces vertus consistent surtout:

1° Dans l’oubli d’elle-même, de façon à ce qu’on voie Dieu à travers elle;

2° Dans la tendresse maternelle;

3° Dans la prévoyance de tout ce qui peut arriver;

4° Dans une grande prudence;

5° Dans une certaine initiative pour le bien à faire au dehors;

6° Dans le maintien de la charité entre les Soeurs;

7° Dans la répression des abus qui commencent, afin d’éviter de pénibles désordres;

8° Dans l’application à empêcher que les Soeurs ne perdent leur temps, surtout en conversations inutiles. La supérieure qui ne veille pas à la suppression de ces conversations est très coupable à cause des péchés, souvent mortels, qu’elle n’empêche pas;

9° Dans la pensée de l’éternité et de la folie, quand on [est] religieuse, de ne pas tout faire pour Dieu, et du compte terrible qu’elle aura à rendre des grâces dont elle abuse;

10° Enfin, dans la pensée du ciel et de la récompense, qui est réservée à la religieuse qui aura bien combattu.

E.D'ALZON
Notes et post-scriptum