DERAEDT, Lettres, vol.12 p. 240

17 nov 1877 Nîmes BARAGNON_NUMA

La joie que me cause votre succès – A la Chambre, il n’y a que vous – Mettez-vous entre les mains de Dieu et agissez – Profitez du mouvement ascensionnel pour arriver au bon moment avec *tout* le pouvoir et pour *longtemps* – Loulou.

Informations générales
  • DR12_240
  • 6081
  • DERAEDT, Lettres, vol.12 p. 240
  • Orig.ms. ACR, AL 93; D'A., T.D. 34, n. 92, pp. 214-215.
Informations détaillées
  • 1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
    1 ACTION POLITIQUE
    1 AMITIE
    1 BETISE
    1 COLERE
    1 DEFENSE DE L'EGLISE
    1 ENERGIE
    1 GOUVERNEMENT
    1 JOIE
    1 MAITRISE DE SOI
    1 MINISTRE
    1 PARDON
    1 PARLEMENT
    1 POUVOIR
    1 REFLEXION
    2 BARAGNON, LOUIS
    2 BESSON, LOUIS
    2 BLANCHARD, ADOLPHE
    2 CASSAGNAC, PAUL DE
    2 KELLER, EMILE
    2 MAC-MAHON, PATRICE DE
    2 MUN, ALBERT DE
    3 ALSACE
    3 BELFORT
    3 FRANCE
    3 FRANCHE-COMTE
    3 GERS, DEPARTEMENT
    3 HAUT-RHIN
    3 HERAULT, DEPARTEMENT
    3 NIMES
  • A MONSIEUR NUMA BARAGNON
  • BARAGNON_NUMA
  • Nîmes, le 17 nov[embre] 1877.
  • 17 nov 1877
  • Nîmes
  • Evêché|de Nîmes
La lettre

Mon cher ami,

Je n’ai pas besoin de vous dire la joie que me cause votre succès. Mais parce que, si d’autres vous aiment peut-être plus, j’ai la prétention que personne ne vous aime mieux que moi, permettez-moi de vous dire mes réflexions sur tout ce qui se passe. Evidemment, à la Chambre, il n’y a que vous et Paul de Cassagnac(1). Or Cassagnac est impérialiste. En voudra-t-on? De Mun, Keller(2) feront des discours préparés. Donc, à la Chambre, il n’y a que vous. Evidemment, on va vous offrir un portefeuille. Pour l’amour de Dieu, soyez assez énergique pour refuser, si le maréchal ne vous laisse pas carte blanche et s’il vous impose les influences occultes. Moi, je ne vous dis pas: Faites ceci, faites cela; je vous dis: Mettez-vous sous la main de Dieu plus que jamais, et, après ce que vous m’avez dit ici, à Nîmes, agissez. Votre discours a relevé toute la France. Entendez bien; ce n’est pas un compliment paternel, c’est un sentiment partagé par Blanchard(3), par l’évêque, par toute la Franche-Comté, par l’Hérault d’où j’arrive. Soyez maître de vous, ne vous mettez pas en colère et allez de l’avant, selon ce que vous m’avez dit.

Votre position est unique. Ne permettez pas qu’on vous balaye au bout d’un mois. Il est si évident que le mouvement ascensionnel commence à se dessiner que ce serait péché de n’en profiter pas. Vous êtes assez comme influence morale et oratoire, pour n’avoir besoin d’être influence officielle que quand vous serez le maître dans le gouvernement. Me permettrez-vous de vous rappeler que j’ai eu raison de vous donner deux ou trois bons conseils? Vous n’en avez pas tenu compte; vous aviez de très bonnes raisons, j’avais la bonne. J’ai pour vous l’instinct des nourrices qui me fait vous crier: N’allez pas trop vite pour arriver au bon moment; avec tout le pouvoir et pour longtemps, voilà l’essentiel.

Loulou m’a dit hier quelques impertinences; il est venu me demander pardon, il voulait me donner des raisons, elles n’étaient pas bonnes, je n’ai pas discuté et il s’est retiré content. Adieu, cher ami. Je prie bien que Dieu fasse de vous le défenseur durable de l’Eglise et de la France.

Votre vrai père.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Cassagnac (1842-1904), impérialiste, rédacteur en chef du *Pays*, duelliste invétéré, député du Gers, invalidé mais réélu.
2. Emile Keller (1828-1909). Le P. d'Alzon était en rapport avec lui depuis longtemps. Il le fut spécialement à l'époque du concile. Député du Haut-Rhin avant 1871, de Belfort après la perte de l'Alsace.
3. Maire de Nîmes.