DERAEDT, Lettres, vol.12 p. 411

mar 1878 Rome PROPAGANDE Congrégation

Note sur les questions bulgare et russe.

Informations générales
  • DR12_411
  • 6272
  • DERAEDT, Lettres, vol.12 p. 411
  • Brouillon autographe ACR, AP 12; D'A., T.D. 40, n. 10, pp. 130-132.
Informations détaillées
  • 1 ADMINISTRATION PUBLIQUE
    1 ADOLESCENTS
    1 AFFRANCHISSEMENT SPIRITUEL
    1 ARMEE
    1 ASSOMPTIONNISTES
    1 AUMONIER
    1 AUTORITE PAPALE
    1 BAPTEME
    1 BULGARES
    1 CATHOLIQUE
    1 CERCLES CATHOLIQUES
    1 CITE
    1 CLERGE FRANCAIS
    1 CLERGE NATIONAL ORIENTAL
    1 CONGREGATION DES RITES
    1 CORRUPTION
    1 COUVENT
    1 DOUCEUR
    1 ECOLES
    1 ECOLES ASSOMPTIONNISTES D'ORIENT
    1 ECRITURE SAINTE
    1 ENFANTS
    1 ESCLAVAGE
    1 ESPRIT CHRETIEN
    1 ETUDES ECCLESIASTIQUES
    1 FEMMES
    1 FILLES DES ECOLES
    1 FORTUNE
    1 GOUVERNEMENT
    1 GUERRE
    1 HOPITAUX
    1 IDEES DU MONDE
    1 ILLUSIONS
    1 INSTRUCTION RELIGIEUSE
    1 INTELLIGENCE
    1 JEUNES RELIGIEUX
    1 LANGUE
    1 LIBERTE
    1 LITURGIE ROMAINE
    1 MAUX PRESENTS
    1 MISSION DE BULGARIE
    1 MISSION DE RUSSIE
    1 MISSIONNAIRES
    1 MOINES
    1 MORT
    1 OBLATES
    1 ORPHELINATS
    1 ORPHELINS
    1 PAPE
    1 PARLEMENT
    1 PAUVRE
    1 PENSIONNATS
    1 PENSIONS
    1 PREDICATION
    1 PREDICATIONS DE CAREME
    1 PROFESSIONS
    1 RAPPORTS DU SUPERIEUR
    1 REVOLUTIONNAIRES ADVERSAIRES
    1 RITE SLAVE
    1 RUSSES
    1 SALUT DES AMES
    1 SCHISME GREC
    1 SCHISME ORIENTAL
    1 SEMINAIRES
    1 SOUFFRANCE
    1 SPOLIATEURS
    1 TRAVAIL DE L'ETUDE
    1 TURCS
    1 VISITE DES MALADES
    1 VOCATION SACERDOTALE
    1 VOYAGES
    2 ALZON, EMMANUEL D'
    2 CORRENSON, EMMANUEL-MARIE
    2 DINSART, CELESTIN
    2 FRICERO, MADAME JOSEPH
    2 GALABERT, VICTORIN
    2 PAUL, SAINT
    2 PIE IX
    2 SEGNA, FRANCESCO
    2 SIMEONI, GIOVANNI
    3 ANDRINOPLE
    3 BULGARIE
    3 CAUCASE
    3 CONSTANTINOPLE
    3 CORINTHE
    3 GRECE
    3 ODESSA
    3 PHILIPPOPOLI
    3 RUSSIE
  • A LA CONGREGATION DE LA PROPAGANDE
  • PROPAGANDE Congrégation
  • [Rome, mars 1878](1).
  • mar 1878
  • Rome
La lettre

Note sur un projet d’évangélisation en Russie(2)

Le mardi 3 juin 1862, Pie IX, de glorieuse mémoire, chargeait Mgr Simeoni, alors secrétaire de la Propagande pour les rites orientaux, de dire au P. d’Alzon qu’il lui accorderait une audience, non demandée, le vendredi 6, vers 9 h. du matin. Dans cette audience le Saint-Père voulut bien dire au P. d’Alzon qu’il serait bien aise de le voir travailler à la conversion de la Bulgarie: 1° par la formation d’écoles catholiques; 2° par l’établissement d’un séminaire; 3° par le passage d’un certain nombre de ses religieux au rite slave.

Le P. d’Alzon, pour mieux étudier la question, alla en 1863 à Constantinople prêcher le carême, puis, fonda une école de garçons à Philippopoli, envoya des religieux à Andrinople, où, peu à peu, se formèrent des écoles pour les garçons et pour les filles.

Sans entrer dans l’histoire de ce qui s’est passé depuis quinze ans, qu’il suffise de dire qu’à Philippopoli est fondée, sous la protection de l’évêque, une école de garçons qui contient, selon les saisons, 120, 150, 200 enfants. Ces enfants, devenus plus âgés, sont maintenus dans l’esprit chrétien, grâce à un cercle catholique, et c’est parmi eux qu’on a trouvé des vocations pour le sacerdoce. Trois d’entre eux sont prêtres pauliciens, c’est-à-dire du rite latin. Les religieux sont quatre à cinq à Philippopoli. A Andrinople, le P. d’Alzon a envoyé des religieuses, au nombre de vingt environ, pour tenir un hôpital. Pendant la guerre, elles soignaient en moyenne cinquante soldats turcs et cinquante femmes bulgares. Elles ont une école pour les petites filles pauvres et un pensionnat pour les jeunes filles plus aisées. Elles ont reçu, après la guerre, le soin de recueillir les petits orphelins turcs, qui leur ont été confiés par le gouvernement: plusieurs meurent par suite des souffrances qu’ils ont endurées et, à la dernière heure, on les baptise en secret, quand ils sont encore au berceau.

Les religieux, outre l’aumônerie des religieuses, la visite des malades, l’instruction religieuse des jeunes filles, ont encore: 1° Un orphelinat agricole, où sont recueillis un certain nombre d’enfants abandonnés, et où on fait le choix des plus intelligents pour les diriger vers les études; 2° un pensionnat pour les enfants des familles plus aisées et qui paient une faible pension; 3° une école, où l’on a réuni les enfants que l’on croit destinés aux études ecclésiastiques.

Ces détails, vrais il y a quelque temps, peuvent avoir été modifiés par suite des événements. J’attends vainement, depuis plus d’un mois, un rapport du P. Galabert, supérieur de notre mission d’Andrinople et visiteur de notre mission de Philippopoli. La suspension des relations postales est cause de ce retard. Toutefois, en partant de ces données, voici ce que je me permets de proposer: former au rite slave les jeunes religieux que nous allons élever pour être prêtres; selon le désir de Pie IX, permettre à certains de nos religieux de prendre le même rite et préparer ainsi un clergé indigène doué de quelque instruction, à l’aide d’un séminaire du rite slave.

On se ferait une étrange illusion si l’on croyait que les populations sont très enthousiasmées par la domination russe. Au fond, elles veulent une autonomie impossible à réaliser, je crois, avec le nombre restreint de leur population. Mais se détachant du patriarcat de Constantinople, ne voulant pas du Saint-Synode russe, peut-être serait-il aisé de les attirer à l’Eglise catholique et à l’autorité du Saint-Siège, qui, par son éloignement, ne peut être que très douce.

Je passe à un autre ordre de considérations. Depuis que Pie IX m’eut proposé la mission de Bulgarie, mes vues se sont étendues beaucoup plus loin: la Russie est devenue ma grande préoccupation. Vers le mois de mai 1877, il y a moins d’un an, ayant été reçu en audience par le Saint-Père, je me permis de lui demander sa bénédiction et ses encouragements, pour préparer un séminaire destiné à former des missionnaires pour la Russie. Pie IX m’encouragea beaucoup, me donna ses bénédictions, et je me retirai, préoccupé de cette pensée(3). Depuis, une dame russe catholique m’a offert de m’établir dans ses terres, au Caucase(4), avec quelques jeunes gens. J’accepterais, si je savais qu’on pût y apprendre la langue russe dans toute sa pureté(5); sinon, je demanderais que l’on donnât un prêtre français à la colonie française d’Odessa, et je verrais ce que l’on peut faire dans cette ville que l’on m’assure très corrompue. Mais la corruption de Corinthe n’empêcha pas saint Paul d’aller y passer bien du temps: ce fut le centre de sa prédication en Grèce. On m’assure que si l’on établissait un couvent pour l’éducation des jeunes personnes, au bout de peu de temps, on aurait par les dames une grande influence et une certaine liberté(6).

Divers motifs me portent à croire que le moment est venu de s’occuper de la Russie.

1° L’invasion des idées révolutionnaires qui sapent ce colosse et ne lui permettent pas d’en rester à la domination par l’Eglise schismatique.

2° La diminution du clergé. Les couvents ayant été dépouillés de leurs biens, les moines y sont tous les jours moins nombreux; et quant aux popes, outre leur infériorité intellectuelle, depuis que les fils de popes ne sont pas contraints à se faire popes eux-mêmes, presque tous embrassent une carrière administrative, et le clergé paroissial n’aura bientôt plus de recrues.

3° Est-il bien imprudent de dire que la Russie est trop vaste pour rester unie?

4° Depuis longtemps, on parle de donner à la Russie un régime parlementaire. Le lendemain du jour où cet acte sera accompli, -et il est la conséquence de l’affranchissement des serfs-, la liberté des cultes devra être proclamée.

5° Après la guerre actuelle, n’est-il pas logique de penser qu’après s’être battus pour donner aux chrétiens la liberté en face des Turcs, il sera nécessaire que la Russie l’accorde aux catholiques?

Notes et post-scriptum
1. La version définitive de cette note fut remise par le P. d'Alzon à Mgr Segna, chargé de la Bulgarie à la Propagande, le 30 mars 1878 (v. *Lettre* 6277). Cependant sur certains points elle doit différer du document que nous donnons ici. Deux éléments que contient ce dernier sont en effet devenus caducs le 30 mars: 1° La mention d'un rapport du P. Galabert "vainement attendu depuis plus d'un mois", car ce rapport parvint au P. d'Alzon le 27 mars (v. *Lettre 6261); 2° L'offre faite par une dame russe de venir s'établir sur ses terres au Caucase, car, après la lettre reçue d'elle le 28 mars, il ne peut plus y compter sérieusement (v. *Lettre* 6260).
2. A Mère Emmanuel-Marie, il parle d'une "note sur les questions bulgare et russe". Ce fut sans doute le titre de la version définitive. Il est vrai que dans les rêves du P. d'Alzon, la Bulgarie est devenue un tremplin pour le Russie.
3. Audience du 2 mai 1877 (v. *Lettre* 5902).
4. C'est la proposition de Mme Fricero (v. *Lettre* 6149, n.3).
5. Voir *Lettre* 6238 et notes.
6. Idée de Célestin Dinsart (v. *Lettre* 6248).