DERAEDT, Lettres, vol.12 p. 426

7 apr 1878 Rome COLLEGE de l'Assomption

Considérations sur le choix d’une carrière.

Informations générales
  • DR12_426
  • 6286
  • DERAEDT, Lettres, vol.12 p. 426
  • Orig.ms. ACR, AK 442; D'A., T.D.33, n.32, pp. 368-370; publiée dans l'Assomption, 4e année, n°8 (15 avril 1878), p.57.
Informations détaillées
  • 1 ADMINISTRATION PUBLIQUE
    1 CARACTERE
    1 CHRETIEN
    1 EFFORT
    1 EMPLOI DU TEMPS
    1 ETERNITE
    1 FECONDITE APOSTOLIQUE
    1 FIDELITE
    1 FOI
    1 FORTUNE
    1 GENEROSITE
    1 INTELLIGENCE
    1 LIBERTE
    1 LOI DIVINE
    1 MORT
    1 PAQUES
    1 PARENTS D'ELEVES
    1 PARESSE
    1 PECHE
    1 PERFECTION
    1 PROFESSIONS
    1 PROVIDENCE
    1 RENOUVELLEMENT
    1 RESPECT
    1 SACERDOCE
    1 SAINTS
    1 SENSIBILITE
    1 TRAVAIL
    1 VACANCES
    3 NIMES
  • AUX ELEVES DU COLLEGE DE L'ASSOMPTION A NIMES
  • COLLEGE de l'Assomption
  • Rome, 7 avril 1878.
  • 7 apr 1878
  • Rome
La lettre

Mes chers enfants,

J’espère être de retour à Nîmes pour vous recevoir, à la fin de vos vacances de Pâques. Mais puisque vous passerez des journées plus libres avec vos parents, permettez-moi, avant de vous revoir, de vous adresser quelques conseils.

Rien de plus important pour vous que de réfléchir sur votre future carrière. Vous savez que, pour mon compte, je n’en trouve pas de plus belle que celle du sacerdoce, puisque je l’ai embrassée. On comprend que tout le monde ne partage pas ma manière de voir, c’est pour cela que je veux vous en proposer d’autres.

Je suis épouvanté de la manière dont une quantité de gens se précipitent dans les administrations. On est chef de bureau, sous-chef de bureau, surnuméraire, aspirant au surnumérariat, et puis? Et puis, on a des chefs qui changent à tout instant, je parle des chefs supérieurs, -et il faut avoir la souplesse en partage pour se faire à des transformations où la beauté du caractère n’a rien à gagner. Croyez-moi, créez-vous des occupations qui vous mettent à même d’avoir une vie indépendante, et pour cela que faut-il faire? Vous dire à vous-mêmes que les cailles ne tombent pas toutes rôties, et que l’homme qui veut se faire une position indépendante doit surtout travailler. Vous aurez beau faire, à moins que la Providence ne vous ait traités en enfants gâtés, vous serez tous obligés à faire quelque chose. Eh bien! une règle de vie excellente est celle-ci: Je ferai le plus possible et le mieux possible.

Je ferai le plus possible, je serai un travailleur, je ne perdrai pas mon temps, je fuirai les flâneurs, les paresseux, les propre-à-rien, et je me proposerai de mettre ma fortune dans l’emploi de mon temps. Plus je travaillerai, plus j’aurai la chance de me créer une position considérée. Je ne permettrai jamais à l’oisiveté d’affaisser mon intelligence et mon coeur.

Après avoir donné à mon esprit la saine habitude du travail, je chercherai à travailler le mieux possible. Il n’y a pas de sot métier; toutes les positions sont honorables, si on les honore, et cela tient uniquement à la dignité avec laquelle on les occupe. Il en résulte qu’au fond on est ce que l’on s’est fait soi-même. Or tout ce que l’on a pu se faire disparaît, quand on meurt. L’essentiel, au grand moment du passage à l’éternité, est de s’être fait un vrai chrétien, un saint; mais vous pouvez être des chrétiens et des saints dans toutes les carrières qui n’impliquent pas l’obligation d’offenser Dieu. Vous deviendrez tout ce que votre foi vous commande, et vous serez surpris de voir comment se trouve, dans l’observation intelligente de la loi de Dieu, un principe de puissance morale à laquelle on ne pense pas toujours assez.

Croyez-moi, prenez la résolution de vous donner, non pas aux carrières faciles, mais aux carrières fécondes, d’arriver non par tous les moyens, mais par les bons moyens, non en acceptant tout ce qui vous procurera de l’or, mais ce qui vous fera conquérir un nom honoré. Trop de gens, aujourd’hui, pourvu qu’ils arrivent, consentent à passer par tous les chemins, dussent-ils se mettre dans la fange jusqu’au cou. Respectez-vous avant tout, et vous serez surpris comment, si vous êtes fidèles à vous-mêmes et à Dieu, votre position s’élèvera à la hauteur de votre caractère, et comment votre caractère, s’il est ce que je souhaite, vous attirera la confiance, le respect et la vraie considération.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum