DERAEDT, Lettres, vol.13 , p. 80

31 mar 1879 Nîmes MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

L’affaire du prieuré.

Informations générales
  • DR13_080
  • 6656
  • DERAEDT, Lettres, vol.13 , p. 80
  • Orig.ms. ACR, AD 1793; D'A., T.D. 24, n. 1337, p. 103-104.
Informations détaillées
  • 1 BAVARDAGES
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 CONFESSEUR
    1 CRITIQUES
    1 MALADES
    1 PARLOIR
    1 PRIEURE DE NIMES
    1 REPRESSION DES ABUS
    2 BAILLY, EMMANUEL
    2 BOUVY, EDMOND
    2 COURCY, MARIE-GABRIELLE DE
    2 DUMAZER, ALEXIS
    2 HUMMEL, MARIE-PAUL
    2 LAURENT, CHARLES
    2 WITMANN, FRANCOIS
    2 WITMANN, THERESE
  • A LA MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • Nîmes, 31 mars [18]79.
  • 31 mar 1879
  • Nîmes
La lettre

Ma chère fille,

Vous me recommandez de ne pas m’impatienter. Je m’impatiente trop souvent pour les petites choses, pas du tout quand l’affaire en vaut la peine. Mère M.-Gabrielle sort de chez moi; elle ne s’est certainement pas aperçue à quel point elle était fatigante, en sortant toujours de la question. J’en suis revenu à ceci, et je doute qu’elle l’ait compris: « J’ai dû choisir tout à coup entre le P. Laurent et Soeur M.-Paul. Vous voulez Soeur M.-Paul, le P. Laurent ne reparaîtra plus chez vous. A tort ou à raison, avec le P. Laurent, le P. Emmanuel, le P. Edmond, le P. Alexis attribuent à cette religieuse tous les blâmes du collège, en ce qu’ils viennent du prieuré. Ils se plaignent que les critiques de Soeur M.-Paul passent du parloir aux parents par les élèves; ils se plaignent que l’action que les religieux cherchent à exercer est paralysée par les plaisanteries sur les prédications, les oppositions à la direction spirituelle donnée, et la faiblesse de mille concessions faites aux familles des élèves du prieuré, en face de notre vigueur à observer le règlement pour nos garçons. Ce n’est pas telle ou telle parole que l’on reproche, c’est l’ensemble, et au fond, le dernier jour, devant l’indignation du P. Laurent, j’ai dû m’emparer de l’affaire. La goutte d’eau avait fait verser le vase, et mon étonnement a été grand, quand j’ai vu tous les religieux et d’autres personnes qui gardaient leur langue, venir me dire une foule de détails inconnus de moi. Alors j’ai eu la conscience d’avoir bien fait ».

Cette façon de parler me semble claire. Mère M.-Gabrielle m’a-t-elle compris? J’en doute, par sa persévérance à m’opposer des détails hors de saison, sans jamais réfuter directement une seule de mes raisons. J’ai éclairci ce qu’elle m’a dit sur les deux petits Witmann, qu’il faut, dit-elle, avoir le temps de caser. J’offre de garder François, et Thérèse peut suivre sa tante. Tout est donc arrangé, quoi qu’on en dise. François se lève depuis trois jours et va de mieux en mieux. Mais Soeur M.-Paul partie, Mère M.-Gabrielle ne tiendra plus au prieuré. Tenez cela pour certain. Elle m’a signifié qu’elle ne se confesserait plus au P. Laurent. Je lui ai dit qu’avant-hier encore le P. Edmond était venu me conjurer de le débarrasser de la confession des Soeurs. Je lui ai déclaré, à mon tour, que désormais je ne confesserais plus personne au prieuré, pour rentrer dans les règles.

Je conclus deux choses: 1° que quand même le P. Laurent aurait eu tort de prendre ainsi la mouche, sa résolution a révélé, au prieuré, un état très grave, et qu’il était juste temps d’y porter remède; 2° qu’il faut profiter de l’occasion pour relever cette maison, en la débarrassant de quelques abus et de quelques Nîmoises, par trop cancanières avec leurs familles; enfin, que Mère M.-Gabrielle est trop faible, -c’est l’opinion universelle- , mais qu’elle n’a peut-être pas les torts que vous lui reprochez. Ce que vous attribuez à son mauvais esprit vient, c’est triste à dire, de son inintelligence. Elle s’embrouille, se perd et dit successivement blanc et noir, à un quart d’heure de distance, comme elle l’a fait aujourd’hui encore.

Adieu, ma chère fille. A lundi, si je puis arriver.

E.D'ALZON.
Notes et post-scriptum