DERAEDT, Lettres, vol.13 , p. 298

6 apr 1880 Nîmes BRICHET CSSp

Les décrets m’obligent à différer mon départ – Procès-verbal d’une réunion de supérieurs – La situation politique.

Informations générales
  • DR13_298
  • 6916
  • DERAEDT, Lettres, vol.13 , p. 298
  • Orig.ms. ACR, AN 196; D'A., T.D. 39, n. 21, pp. 118-119.
Informations détaillées
  • 2 SIMON, HENRI
  • AU PERE HENRI BRICHET
  • BRICHET CSSp
  • Nîmes, 6 avril [18]80.
  • 6 apr 1880
  • Nîmes
La lettre

Bien aimé Père,

Lorsque je vous écrivis que j’irais à Rome, vers le 20, les décrets n’étaient pas encore publiés. Je crois ma présence utile et même nécessaire en France et je dois différer mon départ jusqu’en novembre.

Je crois vous faire plaisir en vous priant de faire parvenir au plus tôt la note ci-jointe à Mgr Mercurelli, afin que vous puissiez en prendre lecture avant de la lui remettre. Cette sorte de procès-verbal a été rédigé dans une lettre du P. Picard. Je la fais copier et je vous l’envoie. Après-demain, j’en aurai probablement une autre de la séance qui se tient cet après-midi. C’est le P. Picard qui, dans une première réunion, a déclaré qu’il fallait faire cause commune avec les Jésuites. Tous les supérieurs, du premier coup, n’étaient pas de cet avis, puis ils s’y sont rendus. Les tertiaires de Saint- Dominique n’ont pas paru. Sauf le P. Lécuyer, ils sont tous si libéraux! Les femmes sont aussi menacées.

Si l’on veut mon opinion, la voici. Grévy déclare son ministère fini et se préparerait à prendre Jules Simon. C’est tout simple. Il voit Gambetta vouloir le renverser, il n’a que Simon à lui opposer. Toutefois Grévy, sauf l’argent qu’il y gagne, s’ennuie horriblement à la présidence. Il ne peut plus aller aux ventes de tableaux, se promener sur les boulevards, jouer au billard. Il disait cela à M. de Choiseul, en le forçant à passer cinq heures à jouer avec lui aux échecs. Moi, j’aimerais mieux Clemenceau. L’opinion se prononcerait plus vite entre la révolution et l’Eglise. On croit qu’après Clemenceau les élections seraient pour l’Eglise. Tous les honnêtes impérialistes se détachent de Plonplon(1). Or si les élections sont catholiques, il est naturel de penser que les catholiques sentiront le besoin d’appeler l’homme qui défendra le mieux leurs intérêts. La conclusion est rigoureuse.

Adieu, cher Père. Bien tendrement vôtre et aux vôtres.

E. D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Le prince Napoléon, dit Plonplon, fils de Jérôme Bonaparte, venait de convier les bonapartistes à soutenir la politique des décrets du gouvernement.