DERAEDT, Lettres, vol.13 , p. 306

22 apr 1880 Nîmes PICARD François aa

Soumettez à la Propagande le cas du Fr. Jean – Le P. Galabert va mieux – Mouvement en faveur des congrégations – Les Augustins – Vincent de Paul est écrasé – Nos novices.

Informations générales
  • DR13_306
  • 6928
  • DERAEDT, Lettres, vol.13 , p. 306
  • Orig.ms. ACR, AF 402; D'A., T.D. 26, n. 785, pp. 340-340 bis.
Informations détaillées
  • 1 AUMONIER
    1 CARACTERE
    1 CEINTURE AUGUSTINIENNE
    1 CHAPELET
    1 CLERGE BULGARE
    1 CONGREGATION DE LA PROPAGANDE
    1 CONGREGATION DES EVEQUES ET REGULIERS
    1 CONTRARIETES
    1 FRANC-MACONNERIE
    1 GUERISON
    1 INSTITUTS RELIGIEUX
    1 NOVICES ASSOMPTIONNISTES
    1 PELERINAGES
    1 PHILOSOPHIE CHRETIENNE
    1 PIETE
    1 POLITIQUE
    1 PROJET D'UNION AVEC LES ERMITES DE SAINT-AUGUSTIN
    1 RADICAUX
    1 REPUBLICAINS
    1 REVOLUTION ADVERSAIRE
    1 SOINS AUX MALADES
    1 SPOLIATEURS
    1 SUPERIEUR DE COMMUNAUTE
    1 THEOLOGIE DE SAINT THOMAS D'AQUIN
    1 THEOLOGIE MYSTIQUE
    1 TRAVAIL DE L'ETUDE
    2 BAILLY, VINCENT DE PAUL
    2 DOMENICI, BENEDETTO
    2 FARRE, JEAN-JOSEPH
    2 FERRY, JULES
    2 GALABERT, VICTORIN
    2 GAMBETTA, LEON
    2 IZVOROV, NIL
    2 LEON XIII
    2 LEPERE, CHARLES
    2 NICETAS, JEAN
    2 NICETAS, STEPHAN
    3 ANDRINOPLE
    3 BULGARIE
    3 FRANCE
    3 NIMES
    3 ROME
    3 ROME, SEMINAIRE FRANCAIS
  • AU PERE FRANCOIS PICARD
  • PICARD François aa
  • Nîmes, 22 avril 1880.
  • 22 apr 1880
  • Nîmes
La lettre

Mon cher ami,

Quand vous recevrez ma lettre, vous aurez eu votre audience(1). Vous aurez donc un peu de temps. Voici quelques commissions que je vous donne:

1° Voyez à la Propagande si le Frère Jean Nicétas ou Nikita peut être admis parmi nous, et supposé qu’il le soit, s’il peut être considéré comme novice depuis qu’il est au noviciat. Vous savez qu’on ne l’a pas considéré comme novice, parce qu’on ignorait s’il ne vaudrait pas mieux le rendre à son père, supérieur d’une communauté bulgare. Mais il a vingt-quatre ans et tient avant tout à rester avec nous, après les ennuis que son père a eus avec l’évêque d’Andrinople. Le Père Galabert le désire pour le soigner. Frère Jean préférerait rester en France, mais il est peu apte aux études, ne saura jamais plus qu’il ne sait. Il a un excellent caractère, beaucoup de piété, de ferveur même, et il soigne parfaitement les malades et s’occupe bien des soins matériels. C’est pour cela que le Père Galabert le réclame, et comme les religieux étrangers sont menacés d’être expulsés, peut-être est-il bon de prendre les devants.

Le P. Galabert va mieux, sauf pour ses yeux. Mais il est si utile que, puisqu’il désire rester en Bulgarie, je préfère l’y laisser, jusqu’à ce que j’aie quelqu’un pour le remplacer, tant qu’il sera capable de donner des conseils, former par sa présence et initier son successeur aux affaires.

2° Veuillez être assez bon pour m’apporter une provision de ceintures de saint Augustin et de chapelets de la ceinture. Je vous en tiendrai compte.

Le mouvement en faveur des Congrégations se développe. Les républicains honnêtes passent de notre côté, Ferry et Lepère(2) se brouillent. Les radicaux trouvent que la question congréganiste est un trompe-l’oeil inventé par Gambetta, et dans l’armée Farre commence à exaspérer son monde de la plus belle façon(3). On sent la dégringolade.

Je pense que vous verrez les Augustins(4). Parlez-leur de moi et de mon désir d’aller à Rome, si c’est possible. A quelle époque pensez-vous être à Nîmes? Décidément les Dominicains de France lâchent le P. Benedetto, comme un homme à qui l’on ne peut pas se fier. Quelques-uns l’accusent d’être franc-maçon, je crois qu’il faut peu l’attirer.

J’écris lettres sur lettres au P. V[incent] de Paul. Pas de réponse, Il est écrasé. De grâce, que ce soit le dernier pèlerinage! Vous avez pour prétexte la Révolution qui menace. Je suis frappé du développement intellectuel de nos novices. Evidemment, l’an prochain, la philosophie leur sera facile, et la théologie plus tard, préparés comme ils le seront par la théologie mystique d’après saint Thomas.

Point de nouvelles. Adieu, et bien à vous. Mes compliments au Séminaire français.

E. D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. "Nous sortons de l'audience privée, le Pape a été aussi aimable que possible et n'a pas craint de dire son sentiment. L'unanimité des religieux lui fait grand plaisir et le mouvement épiscopal lui est très agréable. Il l'a inspiré sans en avoir l'air. "Ces décrets sont mauvais, nous a-t-il dit, nous ne pouvons que les réprouver et les condamner. J'ai exprimé mon sentiment à l'ambassadeur de France. Je n'ai pas tenu à ce que ce fût publié, parce qu'il valait mieux laisser agir les religieux et les évêques. Il valait mieux qu'ils ne parussent pas obéir au mot d'ordre [...] il faut rester unanimes et combattre. La religion sera victorieuse..." Il se rappelle fort bien que vous êtes à Nîmes et vous envoie sa bénédiction, ainsi qu'à toute l'Assomption et à toutes nos oeuvres" (Picard, 24 avril).
Du même P. Picard, le lendemain après l'audience générale : "L'adresse fort anodine a reçu une réponse très, très aimable et très ferme. [...] "Qu'on ne s'y trompe pas. Nous n'oublierons jamais les devoirs de Pontife et nous serons fidèles à *conserver* et à *défendre les droits* de l'Eglise". Pas un mot qui puisse attaquer nos gouvernants, mais une fermeté nette et douce contre laquelle on n'osera pas aller."
2. Respectivement ministre de l'Instruction publique et ministre de l'Intérieur et des Cultes.
3. Le général J.-Joseph Farre (1816-1887) est ministre de la Guerre depuis la fin de 1879. Son passage au ministère fut très marqué politiquement et il adhéra notamment à la proposition de suppression des aumôniers militaires.
4. Le P. Picard ne tarit pas d'éloges sur l'accueil des Augustins, qu'il dit très désireux de l'union, mais il n'a encore rien appris de bien neuf sur l'état de l'affaire à la Congrégation des Evêques et Réguliers.