Périer-Muzet, Lettres, Tome XIV, p. 249.

9 oct 1846 Nîmes MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Nouvelles et avis divers – Projets au sujet de ses bâtisses – Restera-t-il à Nîmes ? – La retraite des religieux – Portrait de quelques novices.

Informations générales
  • PM_XIV_249
  • 0+491|CDXCI
  • Périer-Muzet, Lettres, Tome XIV, p. 249.
  • Orig.ms. ACR, AD 459; V. *Lettres* III, pp. 144-147 et d'A., T.D. 19, pp. 129-130.
Informations détaillées
  • 1 BATIMENTS DES COLLEGES
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 CORPS ENSEIGNANT
    1 CREANCES A PAYER
    1 DOT
    1 EVEQUE ORDINAIRE DU DIOCESE
    1 FORMATION A LA VIE RELIGIEUSE
    1 INSENSIBILITE
    1 NOVICES ASSOMPTIONNISTES
    1 NOVICIAT DES ASSOMPTIONNISTES
    1 PENSIONNATS
    1 PREDICATION DE RETRAITES
    1 RAPPORTS SUR LES NOVICES
    1 RETRAITE DES RELIGIEUX
    1 SURVEILLANTS
    1 TRAITEMENTS
    1 VENTES DE TERRAINS
    1 VOCATION RELIGIEUSE
    2 BEVIER, MARIE-AUGUSTINE
    2 CARDENNE, VICTOR
    2 CEILLIER, ABBE
    2 CHARPENTIER
    2 DECKER, FRANCOIS-JOSEPH
    2 GAIRAUD, ABBE
    2 HENRI, EUGENE-LOUIS
    2 IMLE, HENRI-JOSEPH
    2 LAURENT, CHARLES
    2 MONNIER, JULES
    2 PRADEL, ABBE
    2 ROUX, MARIE-MARGUERITE
    2 SURREL, FRANCOIS
    2 THIBAULT, CHARLES-THOMAS
    3 MONTPELLIER
    3 NIMES
    3 PARIS
    3 STRASBOURG
  • A LA MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • Nîmes, le 9 octobre 1846.
  • 9 oct 1846
  • Nîmes
  • Institution de l'Assomption
  • *Madame*
    *Madame la Supérieure de l'Assomption*
    *n° 76 rue de Chaillot*
    *Paris.*
La lettre

Je suis en retard envers vous, ma chère enfant, mais j’ai une bonne excuse, ma retraite. Cependant il me semble que, si j’eusse bien voulu, j’aurais pu être bien exact, et il faut que je m’en confesse pour que votre générosité me le pardonne.

1° J’ai été frapper à une porte pour vos deux protégées gouvernantes, on ne m’a pas ouvert; j’irai frapper ailleurs.

2° Je suis bien aise que vous soyez contente de Cardenne, et que vous ayez pu juger par lui et par Monnier, comme par deux échos, que, ce n’est pas précisément ce dédain que vous me reprochez, que vos paroles expriment, quand je suis loin de vous. Cardenne fera un religieux excellent, mais il n’est encore complet que par ses désirs.

3° Ce que vous me dites de Soeur M.-Marguerite m’afflige. Je voudrais bien qu’on la plaçât en effet aux dames de Saint-Thomas; elle se disait appelée à soigner les malades. Ne pourriez-vous pas la mettre en rapport avec l’abbé Ceillier, ancien secrétaire de l’évêque de Montpellier? Il s’est brouillé avec lui, et est en ce moment à Paris. C’est une tête un peu légère; aussi je ne hasarde cette proposition qu’avec crainte. Mr Ceillier avait dû la faire entrer chez les Ursulines de Montpellier, sans dot. J’aimerais assez qu’elle ne revînt pas à Nîmes. Du reste, je ne plaide pas pour elle. Mais ce que vous me dites de sa grossièreté m’éclaire sur bien d’autres personnes et d’autres choses.

4° Quant au jeune homme présenté par M. Imlé, voici ma proposition. J’ai tous les professeurs qu’il me faut; j’ai également un nombre suffisant de surveillants. Dois-je payer quelqu’un qui ne viendrait que pour se préparer à la vie religieuse? S’il a des dettes, ceci est différent; mais donnant comme je le fais, une somme assez considérable aux dettes de ceux qui sont ici déjà, il me paraît que je puis commencer à m’arrêter dans une voie qui finirait par devenir ruineuse et qui, finissant par passer en règle, serait très nuisible à l’esprit religieux. A cet égard donc je pense qu’il faudrait savoir dans quel but on voudrait un traitement et combien de temps on l’exigerait.

J’aborde une question très grave, celle de mes bâtisses. Et tout d’abord, je vous avoue que, probablement, je ne bâtirai pas avant trois ans, et voici pourquoi. Je puis, par une assez heureuse combinaison, me procurer des dortoirs pour environ 80 à 100 élèves, sans donner un sou. Il est vrai qu’il me faut vendre un terrain. Mais, comme je ne l’occupe pas, il m’est entièrement inutile. Je le vendrai à un entrepreneur, qui y construira les quatre murs d’une maison à deux ou trois étages; le rez-de-chaussée me servira d’étude et les étages supérieurs de dortoirs. Avec cette simple disposition, je ne pense pas avoir besoin, d’ici à longtemps, de m’occuper de bâtir. En second lieu, j’ai fait disposer par M. Charpentier, qui a passé avec moi presque toute la journée d’avant-hier, le plan dont je vous envoie le croquis, de manière à ce que l’on pourrait loger 360 élèves et les maîtres dans la moitié du bâtiment. La chapelle provisoire serait très suffisante et il y aurait à dépenser pour 400 000 francs. Quant à bâtir, je n’y songe pas tout d’abord, mais je ne sais pourquoi j’espère bien en venir à bout.

Je vous remercie de revenir sur la question du noviciat. Non, je n’ai pas la pensée d’avoir jamais un noviciat à Nîmes; mais je songe à avoir un point d’appui hors de Paris, afin de pouvoir résister à quelques ennuis que pourrait me susciter un archevêque, qui me croirait forcé de rester dans son diocèse. Rien n’est plus fort que celui qui peut se passer de ceux à qui il a affaire. Je crois qu’avec l’archevêque il faut se tenir dans ces termes. Du reste, un million ne m’effraie pas. M. Charpentier va retourner à Paris; tâchez de le voir. Pour moi, je regrette beaucoup l’ogive et je voudrais bien pouvoir y revenir par quelque bout.

Mais ce qui est bien autrement important pour moi, c’est la question de savoir si je resterai dans Nîmes ou si je bâtirai hors de la ville, et, si je vais hors de la ville, à quelle distance je m’établirai. Toutes les recherches que je fais faire ne sont pas croyables, et vous ne pouvez pas vous faire une idée de la platitude de nos plaines. Les coteaux qui nous environnent sont d’une aridité désolante. Je ne sais à quoi me résoudre. Du reste, j’ai à présent le temps de voir venir et je ne me presse pas, tout en m’occupant très activement de mes projets de plans et des terrains à trouver.

Vous voulez des détails sur ma retraite: ils sont assez bien, du moins il me le semble. J’espère qu’une autre année on aura prévu certains préparatifs qui nous dérangent beaucoup cette année-ci.

Dimanche, [11 octobre].

Je suis désolé du retard qu’a subi cette lettre, mais il faut me le pardonner à cause de la retraite. Elle est terminée. Dans un instant, je vais dire la messe d’action de grâces. Je crois qu’elle aura eu bon effet; je l’ai prêchée avec calme, sérieux et confiant dans ceux à qui je m’adressais. Je me suis fait donner par écrit la promesse de consentir à se laisser former à la vie religieuse. M. Gairaud reste du Tiers-Ordre. L’abbé Henri ne m’a pas d’abord contenté; cependant, je l’ai ramené à bien(1). Mais il est pénible de voir qu’on se trompe sur le compte de certaines gens. L’abbé Pradel fera, s’il persévère, un sujet de premier ordre, indépendant pour le moins autant que Soeur Marie-Aug[ustine], avec une foi aussi grande, plus d’amabilité, aussi bavard qu’elle, mais faisant d’inouïs efforts pour se guérir, généreux, avec une grande délicatesse [et] des moyens naturels. Voilà à peu près son portrait. Son obéissance, qui s’était peu manifestée d’abord, se développe par esprit de foi d’une manière étonnante. Son ouverture de coeur est très grande; il s’offre pour tout. Si Dieu le maintient ainsi, il fera un excellent religieux. Decker va aussi à merveille; il se donnera, je crois, avant peu tout entier à l’Assomption. L’abbé Laurent va décidément loger en ville.

Il faut fermer ma lettre. Adieu, chère enfant. Donnons-nous bien à Dieu. Tout vôtre. Je vais prier pour vous.

E.D’ALZON.

Pour le Strasbourgeois(2), je crois qu’il vaut mieux que je m’en rapporte complètement à vous. Décidez donc ce que vous croirez le meilleur.

E.D'ALZON
Notes et post-scriptum
1. Nous avons retrouvé l'engagement écrit du P. Eugène Henri, celui des premiers novices qui était le plus hésitant, après l'éloignement des PP. Surrel et Laurent.
2. Un protégé d'Imlé.