Périer-Muzet, Lettres, Tome XIV, p. 510

19 may 1849 Nîmes MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Certaines de ses paroles l’attristent parfois, mais lui-même se reproche sa raideur – Son voyage à Paris est retardé -Il désirerait avoir des vocations dès que le noviciat serait constitué – Ses raisons d’être plus à l’Assomption qu’aux Carmélites.

Informations générales
  • PM_XIV_510
  • 0+618|DCXVIII
  • Périer-Muzet, Lettres, Tome XIV, p. 510
  • Orig.ms. ACR, AD 647; V. *Lettres* III, pp. 439-441 et D'A., T.D. 20, pp. 91-92.
Informations détaillées
  • 1 ASSOMPTION
    1 BONTE
    1 CAPITAUX EMPRUNTES
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 COMMUNAUTE RELIGIEUSE
    1 CONFESSION SACRAMENTELLE
    1 CONGREGATION DES AUGUSTINS DE L'ASSOMPTION
    1 COUVENT
    1 DISTINCTION
    1 FIERTE
    1 GLOIRE DE DIEU
    1 MAITRES
    1 NOVICIAT DES ASSOMPTIONNISTES
    1 PARDON
    1 PENSEE
    1 RECONNAISSANCE
    1 RELIGIEUSES DE L'ASSOMPTION
    1 REVOLUTION ADVERSAIRE
    1 SENTIMENTS
    1 SEVERITE
    1 SOUFFRANCE
    1 TIERS-ORDRE DE L'ASSOMPTION
    1 TRISTESSE
    1 VOCATION
    1 VOYAGES
    2 GAUDE, MARIE-RODRIGUEZ
    2 PUYSEGUR, MADAME ANATOLE DE
    2 RAYNAUD, POSTULANT
    2 THERESE, SAINTE
    3 NIMES, EVECHE
    3 PARIS
  • A LA MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • Nîmes, le 19 mai 1849.
  • 19 may 1849
  • Nîmes
  • Institution de l'Assomption
La lettre

Ma chère fille,

Votre lettre du 14 et du 15 m’arrive. Quoique un peu pressé aujourd’hui, je veux vous dire deux mots.

Premièrement, laissez-moi vous assurer que vous vous méprenez complètement sur les sentiments que m’inspirent vos paroles un peu douloureuses que vous m’adressez quelquefois. J’en suis bien triste, mais non pas ennuyé. L’ennui n’a que faire ici. Mais quant à la tristesse, voudriez-vous que je n’en eusse pas, lorsque je vous vois dans le chagrin? Il me semble qu’au fond de mon être il y a quelque chose de si immuablement à vous que je ne puis admettre toutes les idées que vous me manifestez quelquefois. Peut-être y a-t-il aussi quelque chose de trop fier et qui ne veut pas assez souvent prendre la peine de se justifier, parce que dans vos doutes il y a bien, vous le comprenez, quelque petit peu de blessure pour moi. Mais cette fierté n’est pas bonne et je vous en demande pardon. Vous êtes un peu comme les enfants qui égratignent leur mère. Le mal n’est pas bien grand, et je dois l’accepter pour assouplir cette vilaine raideur que je vous porte partout. Mais j’avais désiré ne pas revenir là-dessus, jusqu’à ce que je vous voie. Ce sera plus tard que je ne croyais. Je me vois retardé probablement jusqu’au 12 juin pour mon départ, si, d’ici là, il n’y a pas de révolution qui m’empêche de quitter ma maison. Je m’arrangerai pour être de retour vers le 1er juillet, car cette course devra être courte cette fois-ci. Je serai un peu plus long l’hiver prochain. Ce n’est pas la peine de m’envoyer les 4.000 francs; je les prendrai à mon voyage. Je vais m’informer si Mme de Puységur sera à Paris, vers cette époque. J’aimerais autant qu’elle n’y fût pas; car je devrais lui donner un certain temps qui me sera nécessaire soit pour vous, soit pour quelques visites indispensables, malgré le peu de jours que je me propose de rester à Paris.

Je vous remercie de toute la peine que vous prenez pour me donner des sujets. Je ne suis pas précisément pressé de les avoir avant dix mois à peu près. Ce n’est pas que, si nous pouvions en trouver, nous n’en profitassions pas. Mais l’urgence ne se fait pas précisément sentir en ce moment, parce que je voudrais que le noviciat pût commencer d’abord avec les quelques maîtres que nous avons et qui me semblent en très bonne disposition. A mesure que le pli serait pris par eux, les autres viendraient avec bien plus de facilité. Je désire toujours beaucoup l’abbé Raynaud; j’ai envie de lui écrire pour lui rappeler ce que nous nous proposons.

Vous avez quelque raison de dire que nos Messieurs ne sont pas tous très aimables. Cependant, il y a chez eux une grande disposition de bonté. Ils manquent quelquefois de formes, et j’avoue que je fais de vains efforts pour en donner à quelques-uns. Du reste, nous aurons encore, si vous le voulez bien, à causer là-dessus.

Comment avez-vous pu me dire: « Maintenant, je vous sens tout à l’Assomption? » Est-ce que ce n’est que d’aujourd’hui que vous sentez cela? Il y a deux raisons principales, à part bien d’autres, qui font que je suis plus à l’Assomption qu’aux Carmélites. C’est, premièrement, que je crois l’oeuvre de l’Assomption, dans son ensemble, destinée à glorifier Dieu plus que ne le pourrait faire un seul couvent du Carmel; secondement, que vous avez au moins des idées et que, chaque jour, je découvre que les filles de sainte Thérèse, que je connais, mettent tout leur esprit à en avoir de saugrenues. Je vous demande pardon de baser ma préférence sur un pareil motif; mais il est très vrai que j’ai dû prendre mon parti de les laisser faire à leur guise, dans tout ce qui ne serait pas une offense à la loi de Dieu. Est-ce que je ne vous avais pas dit, dans le temps, que, si je continuais à confesser des femmes, c’était uniquement afin de vous trouver des vocations et de fonder ici un Tiers-Ordre? Mais vous n’êtes guère bonne, vous, ma chère fille, de rester si longtemps avant de comprendre ce que je suis, ou, du moins, ce que je voudrais être pour votre communauté.

Je vous laisse. Ma lettre, commencée hier, a été interrompue, et aujourd’hui, forcé de dire deux messes et d’aller à l’évêché, je ne pourrai la finir avant le départ du courrier, si je ne m’arrête pas. Devenez un peu bonne pour votre père. Croyez-moi, vous vous faites bien du mal gratuitement.

Adieu, bonne et chère fille. Tout vôtre en Notre-Seigneur.

Mlle Gaude est forcée de retarder son départ de quatre ou cinq jours.

Notes et post-scriptum