Vailhé, LETTRES, vol.1, p.21

13 dec 1828 Paris, ALZON_VICOMTE
Informations générales
  • V1-021
  • 0+007|VII
  • Vailhé, LETTRES, vol.1, p.21
Informations détaillées
  • 1 ANIMAUX
    1 COURS PUBLICS
    1 DOMESTIQUES
    1 FONCTIONNAIRES
    1 INSTRUCTION RELIGIEUSE
    1 POLITIQUE
    1 REPAS
    1 RESIDENCES
    1 SOINS AUX MALADES
    1 VISITE DES MALADES
    2 ALZON, AUGUSTINE D'
    2 ALZON, EDMOND D'
    2 ALZON, JEAN-CHARLES D'
    2 ALZON, MADAME HENRI D'
    2 BAILLY, EMMANUEL SENIOR
    2 CHRISTOL
    2 CLAUDE
    2 COMBALOT, THEODORE
    2 GRANDMAISON, GEOFFROY DE
    2 NEIRAC, FRANCOIS DE
    2 PERIVIER, MADAME
    2 ROUSSY DE SALES, FELIX DE
    2 ROUSSY DE SALES, MADAME FELIX DE
    3 MONTPELLIER
    3 PARIS, HOTEL-DIEU
    3 SAINT-PARGOIRE
    3 SAINT-PONS-DE-MAUCHIENS
    3 VENDEMIAN
  • A son père (1).
  • ALZON_VICOMTE
  • le 13 décembre 1828.
  • 13 dec 1828
  • Paris,
  • Monsieur
    Monsieur le vicomte Henri d'Alzon,
    au château de Lavagnac,
    près et par Montagnac (Hérault).
La lettre

Ma lettre sera un peu courte, mon cher père, parce que j’ai été obligé de courir toute la matinée et que l’heure me presse. Ma mère avait reçu ce matin une lettre de Mme de Roussy(2) qui lui disait que M. Combalot était ici. J’ai voulu l’aller voir, et comme il avait changé de logement, j’ai été obligé de faire un chemin inouï pour trouver son adresse. Et voyez un peu mon malheur. Dans le temps que je trottais pour le trouver, il est venu voir ma mère et est resté une heure avec elle en m’attendant. Enfin, il s’en est allé, et juste cinq minutes après, je suis arrivé. Il faut avoir du guignon! Cependant, je le verrai demain, parce qu’il viendra dîner avec nous.

Ma mère a reçu encore ce matin une lettre de Charles; elle voulait vous écrire un mot dans ma lettre, mais elle est obligée de sortir pour quelques emplettes que lui a demandées Mme de Roussy. Je vais tâcher de m’acquitter de mon mieux de ce dont elle m’a chargé pour vous. Dans la lettre de Charles, il y a un passage que je vais vous copier tout à l’heure et dans lequel il demande un congé(3). Ma mère n’a pas cru nécessaire de vous envoyer la lettre, parce qu’elle est persuadée que la personne qui a un emploi au ministère de la Guerre, et qui déjà a rendu plusieurs services à Charles, pourra lui être utile, si on lui fait parler par Mme Périvier, et dans ce cas la lettre serait nécessaire. Cependant comme de votre côté vous pourriez écrire au ministère, je vais vous copier le passage qui pourra vous donner des éclaicissements. « Il y a une ordonnance du roi que j’ai vue dans le Journal militaire, -elle est du 30 août- qui autorise le ministre à donner des congés de six mois et d’un an sans solde aux officiers, qui auraient des affaires urgentes qui les appeleraient dans leurs familles. Vous me feriez le plus grand plaisir si vous pouviez m’obtenir un de ces congés-là, mon cher oncle. Il faudrait que vous en fissiez la demande comme de vous-même, parce que de ma part elle doit passer par la filière du colonel. On dit aussi que l’on va diviser l’armée en armée active et en armée de réserve. Si cela était, ne pourriez-vous me faire passer dans l’armée de réserve? » Il ajoute qu’il écrit la même chose à sa femme. Ainsi vous devez en être déjà instruit, mais peut-être ne savez-vous pas tous les détails, dans lesquels il est entré dans votre lettre. Voilà pourquoi j’ai cru devoir vous les copier. Il est entré ensuite dans la description du pays, qui, je vous assure, donne peu envie à visiter. Toutefois, il y a beaucoup de gibier. Cela me fait penser au mien et à ce que vous m’en dites. Ne vous inquiétez ni pour les perdreaux ni pour les lièvres. Edmond doit me procurer du gibier quadrupède, qui est assez nombreux du côté de Vendémian et de Montpellier. Claude et Christol savent qu’ils me fourniront de volatiles par le moyen des gamins de Saint-Pons et de Saint-Pargoire, qui ne demandent pas mieux que d’avoir cinq ou six sols de ces animaux, quand ils sont tout jeunes(4). Et quand même ces deux ressources manqueraient, mon oncle de Neirac m’a promis de m’en procurer de l’une et de l’autre espèce. Et puis, dites que votre fils n’a pas de tête!

Je vais ce soir à une nouvelle conférence qui roule sur le droit public: elle est composée de gens sensés et raisonnables, de plusieurs magistrats, et on y discute toutes les matières politiques. Elle se tient chez M. Bailly. Elle est absolument privée. On n’y devrait admettre que les jeunes gens de troisième année de droit. Ainsi, j’en étais exclu pour deux ans, mais on m’a fait la faveur de ne pas regarder [à] mon temps, et j’en suis d’autant plus aise que, bien que je désirasse beaucoup en faire partie, je ne l’avais pas demandé et que l’on m’a proposé d’en être.

Jeudi dernier, j’ai fait ma troisième visite à l’Hôtel-Dieu; lundi, j’y avais été pour la seconde fois. Je n’ai pas encore fait l’instruction. Ce sera mon tour, jeudi prochain. Mais pendant que mon confrère vaquait à cette occupation, j’allais voir les malades au lit. Tous me donnèrent de bonnes marques, excepté un qui est bien désolant. J’eus beau le prendre de toutes les façons, il finit par me dire que ça ne lui faisait ni froid ni chaud. Je prierai le jeune homme qui vient avec moi et qui a plus d’habitude de lui parler. Voici ma méthode habituelle. Lorsque je les vois pour la première fois, je leur parle de leur santé, de leur métier, etc.; ensuite, je les exhorte un peu à la patience, et ce n’est que la seconde fois que je leur parle un peu sérieusement. Je vous donne tous ces détails, mais vous comprenez que je ne parle à personne de cette oeuvre. Ici, ma mère seule sait que j’en fais partie. J’ai pourtant été forcé de l’écrire à ma tante Rodier, parce que je compte tirer de son oeuvre des livres pour distribuer aux malades. Bien que je lui aie écrit, ma lettre n’est pas encore partie et ne partira que demain(5).

Comme un grand étourdi, j’oubliais de vous donner des nouvelles de ma mère. Elle a été purgée, il y a quelques jours, comme Augustine a dû v;ous l’écrire. Mais aujourd’hui, elle va beaucoup mieux, puisqu’elle est sortie hier soir pour faire des visites et que, comme je vous l’ai dit au commencement de ma lettre, elle est encore sortie maintenant pour faire quelques commissions.

Adieu, mon cher père. Le temps me presse. Je vous embrasse bien tendrement.

EMMANUEL.
Notes et post-scriptum
1. Voir des extrais dans *Notes et Documents*, t. Ier, p. 73, 141.
2. Née de Sales, de la famille du saint évêque de Genève, avait épousé Félix de Roussy, membre de la famille d'Alzon. Sur ce dernier, voir Grandmaison, *Op. cit.*, p. 185 et 211.
5. D'assez bonne heure, une *Société des bonnes oeuvres* fut adjointe à la Congrégation, distincte par son but spécial, mais nullement séparée. Elle avait pourtant son directeur, qui était toujours un prêtre. Elle comprenait trois sections, chargées chacune d'une mission particulière: la première visitait les malades dans les hôpitaux, la seconde les prisoniers dans les maisons de détention, la troisième veillait à l'instruction religieuse des petits ramoneurs. (Voir Grandmaison, *Op. cit.*, p. 196, sq.) Sans être agrégé à la Congrégation, Emmanuel se fit, dès son arrivée, affilier à la *Société des bonnes oeuvres*, ainsi que nous l'apprend une lettre de son père, du 12 décembre 1828.2. Née de Sales, de la famille du saint évêque de Genève, avait épousé Félix de Roussy, membre de la famille d'Alzon. Sur ce dernier, voir Grandmaison, *Op. cit.*, p. 185 et 211.
3. Suit un long passage sans intérêt, relatif à cet officier, neveu du vicomte d'Alzon, et que nous omettons. [Ce passage a été ajouté d'après T.D.19, p.1. Il se termine à : "...j'ai cru devoir vous les copier". - Avril 1996].
4. Edmond d'Alzon était le fils de l'officier Charles; Christol et Claude, des domestiques de Lavagnac.
5. D'assez bonne heure, une *Société des bonnes oeuvres* fut adjointe à la Congrégation, distincte par son but spécial, mais nullement séparée. Elle avait pourtant son directeur, qui était toujours un prêtre. Elle comprenait trois sections, chargées chacune d'une mission particulière: la première visitait les malades dans les hôpitaux, la seconde les prisoniers dans les maisons de détention, la troisième veillait à l'instruction religieuse des petits ramoneurs. (Voir Grandmaison, *Op. cit.*, p. 196, sq.) Sans être agrégé à la Congrégation, Emmanuel se fit, dès son arrivée, affilier à la *Société des bonnes oeuvres*, ainsi que nous l'apprend une lettre de son père, du 12 décembre 1828.