- V1-178
- 0+057|LVII
- Vailhé, LETTRES, vol.1, p.178
- 1 AMITIE
1 AUMONE
1 CONFESSEUR
1 CREANCES A PAYER
1 DEPENSES
1 LIBERAUX
1 MESSE DE MINUIT
1 NOEL
1 PAUVRE
1 PRESSE
1 ROYALISTES
1 VIE DE PRIERE
2 BAILLY, EMMANUEL SENIOR
2 DREUX-BREZE, PIERRE-SIMON DE
2 DU LAC, JEAN-MELCHIOR
2 LAMENNAIS, FELICITE DE
2 REY-LACROIX
2 SALINIS, ANTOINE DE
3 MONTAGNAC
3 PARIS - A MONSIEUR LUGLIEN DE JOUENNE D'ESGRIGNY.
- ESGRIGNY Luglien de Jouenne
- vendredi, 10 heures du soir [24 décembre 1830].
- 24 dec 1830
- [Lavagnac],
- Monsieur
Monsieur Luglien de Jouenne d'Esgrigny,
rue Duphot, n° 11.
Paris.
Dans deux heures, c’est la Noël, et je veux attendre avec mon cher ami, la Messe de minuit. Je serai court, parce que je veux écrire aussi à du Lac; mais je veux que vous vous souveniez de moi par l’entremise d’une lettre écrite quelques instants avant le jour de ma fête, et avant une Messe où je vais bien prier le bon Dieu pour vous. Oui, je le prierai bien pour qu’il vous décide à suivre le conseil que je vous donnais dans ma dernière lettre. Voyez un peu. Il semble que je vous aie deviné. Vous m’apprenez que vous auriez besoin d’un confesseur, et, dans le temps que votre lettre est en route, je pense à l’utilité qu’il résulterait pour vous d’être bien guidé.
Pourriez-vous me dire si Brézé est de retour à Paris? Je ne sais pourquoi je vous adresse cette question. Cependant, elle m’importe beaucoup, parce que Brézé est un bon enfant qui vous donnerait des conseils. Mais j’oubliais que vous n’aimiez pas son genre. Il ne faut pas faire certaines choses avec répugnance.
A présent, vous ne vous fâcherez plus de mon silence. Peut-être serait-ce du contraire. Mais je vous l’ai dit, c’est ma façon d’aimer. Quelquefois, je me sens un violent besoin de le dire; d’autres fois, je compte sur la connaissance que mes amis ont de moi. Il est vrai qu’il est difficile d’en trouver qui ne confondent pas le silence avec l’oubli. J’aurais dit: « Tant pis pour eux! » s’il n’y a pas bien longtemps encore vous n’aviez presque douté de mon amitié. Mais vous n’en êtes plus là, mon cher ami, j’en suis sûr. Vous êtes à présent prévenu.
Le mandat de cent francs, que vous trouverez ci-joint est destiné à quelques dettes que je vous prie d’acquitter. Par oubli un abonnement au Correspondant n’est pas encore payé; c’est celui de M. Rey-Lacroix, à Montagnac. Il y a trente-six francs à donner. Vous remettrez à M. Bailly trente-cinq francs, qui sont le produit des amendes de la Conférence littéraire. Je crois bien que quelques dépenses que j’ai payées pour cette Société diminueraient la somme, mais j’aime mieux payer plus que moins, puisque dans tout l’embarras du déménagement j’ai perdu les preuves des dépenses faites par moi.
Il vous restera quelque argent. Si vous jugez à propos de m’abonner à l’-Agence, abonnez-moi, mais prévenez-m’en, parce qu’alors je ferai abonner mon père. Bien des abonnements destinés à l’Association parviendront à l’Agence(1). Il me semble pourtant qu’elle est bien maladroite de parler des 30 000 francs qu’il lui faut. Bien des gens refuseront de faire les premiers frais. Et puis, la couleur de l’Avenir, ses attaques contre les royalistes fermeront bien des bourses et n’ouvriront pas celles des libéraux.
Adieu, cher ami. priez pour moi. Un pauvre alla trouver un prêtre de ma connaissance et lui avoua comme une peine d’esprit que, depuis plusieurs années qu’il passait la moitié de la journée en prière, il n’avait pensé qu’aux personnes qui lui faisaient l’aumône, sans penser jamais à lui. C’était pourtant le comble de la charité. Vous ne pouvez priez pour vous, priez pour moi. Cela plaira toujours à Dieu. A Dieu.
Emmanuel.