Vailhé, LETTRES, vol.1, p.441

2 nov 1833 [Lavagnac], ESGRIGNY Luglien de Jouenne
Informations générales
  • V1-441
  • 0+143|CXLIII
  • Vailhé, LETTRES, vol.1, p.441
  • Orig.ms. ACR, AB, 19.
Informations détaillées
  • 1 AMITIE
    1 BONHEUR
    1 CHANT
    1 DIRECTION SPIRITUELLE
    1 EFFORT
    1 JOIE
    1 LIBERTE
    1 NOTRE-SEIGNEUR
    1 PAQUES
    1 PERSEVERANCE
    1 PRESSE
    1 REFORME DU COEUR
    1 RENONCEMENT
    1 SERMONS
    1 TRAVAIL DE L'ETUDE
    1 VIE DE FAMILLE
    1 VIE SPIRITUELLE
    1 VOYAGES
    2 FOISSET, JOSEPH-THEOPHILE
    2 GOURAUD, HENRI
    2 LAMENNAIS, FELICITE DE
    2 LERMINIER, JEAN-LOUIS-EUGENE
    2 PIERRE, SAINT
    3 FRANCE
    3 ITALIE
    3 MUNICH
    3 ROME
  • A MONSIEUR LUGLIEN DE JOUENNE D'ESGRIGNY (1).
  • ESGRIGNY Luglien de Jouenne
  • le 2 novembre [1833].
  • 2 nov 1833
  • [Lavagnac],
La lettre

Je suis, mon bien cher ami, à la veille de mon départ. Je ne puis dire que j’entreprends mon voyage avec joie; non. On a eu trop soin de m’en faire calculer tous les inconvénients. C’est pour moi une peine plus grande que vous ne sauriez penser de quitter la France. Je ne croyais pas être aussi attaché à mon pays. Je renonce pour quelque temps, pour plusieurs années peut-être, à cette vie de famille qui était si douce pour moi, à l’espoir de revoir mes amis. C’est, je vous l’assure, assez pénible.

Viendrez-vous me voir, et votre voyage en Italie se réalisera-t-il? Non, j’en suis sûr. Vous irez étudier à Munich, et si, dans deux ans, je vais aussi payer mon tribut à la ville munichoise, vous verrez que tout s’arrangera pour que vous alliez à Rome. Eh bien! ainsi soit-il! Ce sera un désappointement de plus. Un de plus ou de moins, ce n’est pas grand’chose. Faites-moi un plaisir, apprenez-moi où vous en êtes avec Dieu. Avez-vous persévéré dans les belles résolutions que vous aviez prises vers Pâques? Je désire que vous répondiez simplement à cette question, parce que ce me serait un grand bonheur de causer quelquefois avec vous de Dieu et de Notre-Seigneur, et je ne voudrais pas vous parler ainsi, si mes paroles n’étaient pas en harmonie avec l’état de votre âme. J’aurais l’air de chercher à vous faire un sermon, ce qui n’est pas mon genre. Répondez-moi, mon cher ami. Vous me causeriez une grande joie, si j’apprenais que je puis vous parler sur ce sujet en toute liberté.

Il y a longtemps que je n’ai reçu de vos nouvelles. Faut-il vous répéter encore qu’elles me font toujours du bien? Comme depuis près d’un an je n’ai pas reçu de lettre de Gouraud, je lui envoie une lettre que j’insérerai dans celle-ci, afin que vous vouliez bien mettre l’adresse. Mes amis ne me gâtent pas. J’ai écrit plusieurs fois à Gouraud, sans qu’il m’ait répondu. Il n’est pas le seul, dont je puis dire la même chose.

Encore une fois, mon ami, j’ai bonne envie de vous voir. Je vous en donne ma parole; et franchement, si nous pouvions causer vingt-quatre heures, je crois que nous aurions bien des choses à nous dire. Vous me gronderiez beaucoup, parce que, si j’ai changé, ce n’est pas en bien; mais j’aimerais vos gronderies. Allons, puisque je ne puis aller vers vous, venez vers moi; mais je vois bien que c’est comme si je chantais. Il faut vous dire que jamais je ne chante à l’église, de peur de faire fuir tous mes voisins et de faire le vide autour de moi. Mes lettres ont, il paraît, un effet pareil.

Dites-moi un peu ce qui a pris à la Revue [européenne] d’affecter cette guerre à coups d’épingles avec M. de la Mennais. Je trouve qu’elle n’a pas le sens commun sur ce point, comme sur bien d’autres. L’article de Foisset sur Lerminier, excellent du reste, est plein de ces attaques mesquines qui font hausser les épaules. On peut n’être pas de l’avis de M. de la Mennais, mais il me semble qu’on se fait tort en l’attaquant ainsi.

Adieu, mon ami. Priez pour moi pendant mon voyage. Ecrivez-moi ce que vous voulez que je demande à saint Pierre de votre part. Adieu, adieu, mon ami.

Emmanuel.

Vous ferez bien de lire ma lettre à Gouraud, parce que j’y parle de vous.

E.D'ALZON
Notes et post-scriptum
1. Voir des extraits dans *Notes et Documents*, t. Ier, p. 332 sq.