Vailhé, LETTRES, vol.1, p.459

14 dec 1833 [Rome, ALZON_AUGUSTINE
Informations générales
  • V1-459
  • 0+149|CXLIX
  • Vailhé, LETTRES, vol.1, p.459
  • Orig.ms. ACR, AB 25.
Informations détaillées
  • 1 CLERGE
    1 CLOITRE
    1 COMMUNAUTE RELIGIEUSE
    1 COUVENT
    1 EPISCOPAT
    1 ETRANGER
    1 GRECS
    1 JARDINS
    1 OFFICE DIVIN
    1 OFFICE EN CHOEUR
    1 REPAS
    1 REPOS
    1 RESIDENCES
    1 SANTE
    1 SOLITUDE
    2 ALZON, HENRI D'
    2 ALZON, MADAME HENRI D'
    2 DREUX-BREZE, PIERRE-SIMON DE
    2 DURAND, PERE
    2 GABRIEL, JEAN-LOUIS
    2 LAMENNAIS, FELICITE DE
    2 MONTPELLIER THEODORE-JOSEPH DE
    2 PHILIPPE DE MACEDOINE
    3 CIVITAVECCHIA
    3 FRANCE
    3 GENES
    3 LAVAGNAC
    3 LIVOURNE
    3 LYON
    3 ROME
    3 ROME, BASILIQUE SAINT-JEAN DU LATRAN
    3 ROME, BASILIQUE SAINT-PAUL-HORS-LES-MURS
    3 ROME, BASILIQUE SAINTE-MARIE MAJEURE
    3 ROME, COLISEE
    3 ROME, COLLEGE DES NOBLES
    3 ROME, COLLEGE ROMAIN
  • A SA SOEUR AUGUSTINE (1).
  • ALZON_AUGUSTINE
  • le 14 décembre 1833].
  • 14 dec 1833
  • [Rome,
La lettre

Enfin, ma chère Augustine, après bientôt trois semaines d’attente, j’ai reçu ce soir deux nouvelles de France; j’ai eu deux lettres, l’une de Lavagnac et l’autre de Paris. Il est vrai qu’elles ont mis à venir un temps raisonnable: celle de maman vingt-deux jours, quand elle n’en devait mettre que douze; celle de mon père dix-huit, quand elle n’en devait mettre que dix. Enfin, je sais, aujourd’hui 14 décembre, que tu te portais bien le mois dernier. N’est-ce pas agréable à penser? Je t’avoue que je commençais un peu à vous bouder. J’avais l’espoir de trouver de vos nouvelles à Rome; il m’a fallu les attendre trois semaines. Mais vous, de votre côté, avez-vous reçu mes lettres de Gênes, de Livourne et [de] Civita-Vecchia?

Je suis, comme je te l’ai écrit, dans un couvent. Les religieux, font bonnes gens du reste, font peu de bruit dans la maison. Ils n’y sont que pour leur office, qu’ils disent au choeur, ensuite pour manger, boire et dormir. Je ne me serais pas mis dans un couvent, si mon père ne m’en avait pressé avec des instances que je comprenais peu. J’y suis avec M. Gabriel, qui laisse aller son imagination au milieu des vapeurs d’or dont Rome se couvre chaque soir.

Tu veux sans doute savoir comment je suis logé. Nous occupons quatre chambres au second. Le couvent est un bâtiment carré, bâti autour du cloître, dont l’intérieur est planté d’orangers. Nos fenêtres, sans donner sur le cloître, sont très bien, parce que nous avons vue sur un jardin planté d’orangers également. Le portier de la maison fait nos chambres. C’est un Grec, et, plus encore, il est de Macédoine, et, pour prouver sa descendance en ligne directe de Philippe, il est borgne comme lui. Jusqu’ici, nous avons été obligés d’aller manger au restaurant, mais dès demain, un traiteur doit nous porter nos repas chez nous.

Je suis les cours du Collège Romain, où j’ai trouvé M. de Brézé et un jeune prêtre belge qui continue ses études; c’est M. de Montpellier, dont me parlait le P. Durand dans sa lettre. Ces Messieurs m’ont fait beaucoup d’accueil, M. de Brézé surtout. Ils sont seuls étrangers au Collège des nobles, ou ils ont un appartement a part. Ils me pressent beaucoup d’aller avec eux, mais comme les Jésuites se sont prononcés d’une manière trop tranchante sur certaine question(2), je ne sais si je ne finirais pas par me mettre dans une position fausse en allant chez eux. C’est ce qui me serait fort désagréable. D’un autre côté, quand M. Gabriel, qui change d’idée comme de chemise, sera parti -ce qui aura lieu plus tôt qu’il n’avait d’abord décidé,- je me trouverai assez ennuyé d’être seul. Les Jésuites ont des préventions incroyables contre tout ce qui vient de France, et ces braves gens ne voient pas que toutes ces préventions sont autant d’obstacles à leur retour dans ce pays. Ils sont bien fiers, parce qu’à Lyon ils ont une maison publiquement ouverte. Je ne sais s’ils pourront en ouvrir ainsi dans beaucoup d’endroits avec le mépris..-le mot n’est pas trop fort,- qu’ils ont et pour les évêques et pour le clergé. Ils ont ici une opposition terrible, et plusieurs personnes pensent qu’ils finiront par succomber.

Je commence à parcourir Rome à mon aise. C’est prodigieux. Il faut plus d’un an pour visiter Rome en gros. Sainte-Marie Majeure, Saint-Jean de Latran, Saint-Paul hors les murs, le Colisée et un grand nombre d’autres monuments, que j’ai vus en courant et que je suis obligé de revoir, si j’en veux bien apprécier les détails, sont tout ce que tu peux t’imaginer de plus beau. Nous faisons ordinairement nos courses le jeudi, parce que nous avons alors tout le jour à courir. Nous parcourons les monuments les plus rapprochés peu a peu.

Adieu, ma chère petite soeur. Il est convenable que j’écrive à maman, et c’est pour cela que je m’arrête. Adieu. Ecris-moi souvent.

Emmanuel.
Notes et post-scriptum
1. Voir des extraits dans *Notes et Documents*, t. Ier, p. 346.2. Dans l'affaire de La Mennais.