Vailhé, LETTRES, vol.1, p.554

8 may 1834 Rome, CLERGE_ET_FIDELES
Informations générales
  • V1-554
  • 0+174|CLXXIV
  • Vailhé, LETTRES, vol.1, p.554
Informations détaillées
  • 1 APOSTOLAT DE LA CHARITE
    1 ASSISTANCE A LA MESSE
    1 ATHEISME
    1 BASILIQUE
    1 BENEDICTION
    1 BONHEUR
    1 CELEBRATION DE LA MESSE PAR LE PRETRE
    1 CHAPELET
    1 CHAPELLE
    1 CLERGE
    1 CORRUPTION
    1 DEPENSES
    1 DOULEUR
    1 EDIFICE DU CULTE
    1 EGLISE
    1 EMBARRAS FINANCIERS
    1 ENTERREMENT
    1 EVEQUE
    1 FIDELES
    1 FOI
    1 FORTUNE
    1 FRANCAIS
    1 INDULGENCES
    1 JOIE
    1 MYSTERE
    1 NOTRE-SEIGNEUR
    1 OFFERTOIRE
    1 ORDRES MINEURS
    1 ORDRES SACRES
    1 ORNEMENTS
    1 PAIX
    1 PAUVRETE
    1 PECHES
    1 PERSECUTIONS
    1 PROPRETE
    1 PURIFICATION
    1 RENOUVELLEMENT
    1 SACRIFICE DE JESUS CHRIST
    1 SAINTE COMMUNION
    1 SANG DE JESUS-CHRIST
    1 SEMINAIRES
    1 SIMPLICITE
    1 SOUS-DIACONAT
    1 STATUE DE LA SAINTE VIERGE
    1 TRIOMPHE
    1 VERTU D'OBEISSANCE
    1 VIE CONTEMPLATIVE
    1 VOLONTE DE DIEU
    2 AOUST, ABBES
    2 BENOIT, PAUL
    2 CONSTANTIN LE GRAND
    2 DAVID, BIBLE
    2 GABRIEL, JEAN-LOUIS
    2 HOLOPHERNE
    2 JUDAS
    2 JULIEN L'APOSTAT
    2 NERON
    2 SOULAS, ANDRE
    2 TOBIE, BIBLE
    2 VERNIERES, JACQUES
    3 BABYLONE
    3 FRANCE
    3 ROME, BASILIQUE SAINT-JEAN DU LATRAN
  • A UN SEMINARISTE DE MONTPELLIER (1).
  • CLERGE_ET_FIDELES
  • jour de l'Ascension (= 8 mai) 1834.
  • 8 may 1834
  • Rome,
La lettre

Voici, mon cher ami, toutes les indulgences que j’ai pu obtenir pour la Congrégation. Toutes celles que vous demandiez n’y sont pas, mais elles sont cependant assez nombreuses. Je n’ai point fait agréger la Congrégation de la Sainte-Enfance à celle de la Sainte-Vierge, par la même raison que l’on n’agrège point la Confrérie du Saint-Sacrement à celle du Scapulaire, ni les Capucins aux Chartreux. L’on m’a refusé une indulgence pour le parvulus. Cependant, si je puis l’avoir plus tard par une autre voie, je vous l’enverrai. A cela près, je pense que vous serez content de la manière dont j’ai fait vos commissions. Je n’ai point demandé pour M. Benoît la permission de bénir des chapelets, parce qu’il me semble la lui avoir déjà envoyée par M. Gabriel. Si je l’ai oubliée, vous n’aurez qu’à me prévenir.

Quand vous recevrez cette lettre, vous serez bien près, je crois, de recevoir le sous-diaconat, si tant est que vous soyez appelé. Vos longues absences du Séminaire vous seront peut-être un obstacle, mais plusieurs congréganistes recevront les ordres. Soulas fera le pas(2), Aoust prendra les quatre moindres; moi, je ne prendrai rien, quoique plusieurs personnes me pressent. Mais M. Vernière m’a engagé d’attendre, et je pense que, pour ces choses-là, mieux vaut lui obéir que de suivre les avis de toute la terre. Quand le moment sera venu, je ne puis pas dire que je n’avancerai pas avec joie.

Dieu, aujourd’hui, veut que le sacrifice de son Fils soit renouvelé fréquemment. Plus les péchés souillent la terre, et plus il faut la purifier par le sang de la victime. Et puis, j’ai la confiance de trouver, dans la célébration de la messe, la consolation à bien des douleurs qui naissent de la vue de l’état présent des choses. Je servais ce matin la messe à un évêque et j’étais obligé de me tenir à côté de lui depuis l’offertoire jusqu’à la Communion. Il me semblait que le bonheur de contempler quelques minutes Notre-Seigneur, de le tenir dans ses mains, devait donner de grandes forces à qui sait apprécier ce mystère.

Je dois répondre à la demande que vous me faites d’une statue de la Sainte Vierge par un non bien positif, pour plusieurs raisons, dont la première dispense des autres: c’est que dans ce moment je n’ai pas d’argent de reste. Mais quand bien même j’en aurais, ce n’est pas en statues que je le dépenserais. Nous ne sommes pas à une époque où il faille demander pour les églises plus que de la simplicité et de la propreté. Je n’ai jamais compris la nécessité d’orner des temples vides. Il faut songer à les remplir et laisser aux fidèles le soin de les embellir.

Et puis, pensez-vous qu’à l’époque où nous sommes, l’Eglise de France doive prendre des emblèmes de joie et de triomphe? Je ne me suis pas aperçu que les premiers chrétiens revêtissent de marbre les chapelles des catacombes où ils se réunissaient. Or, si nous ne touchons pas à la persécution de Néron, nous revenons, je pense, à celle de Julien et à quelque chose de pire. Le clergé a aujourd’hui besoin de pauvreté, et les églises sont une partie de son luxe, luxe louable quand on n’a rien de mieux à faire de l’argent destiné aux bonnes oeuvres.

Dieu ne voulut pas que David lui bâtît un temple parce qu’il avait eu à combattre. Tobie, pendant la captivité de Babylone, employait sa fortune à enterrer les morts. Nous devons employer la nôtre à les ressusciter. La basilique mère et maîtresse de toutes les églises, Saint-Jean de Latran, a été bâtie par Constantin quand la paix fut rendue; pas avant.

Je voudrais bien vous convertir sur un chapitre dont, je me le rappelle, j’ai parlé autrefois avec vous. Les merveilles que je vois ici me confirment dans ma manière de penser. Le peuple romain a la foi; le peuple français ne l’a pas ou plutôt ne l’a plus, ce qui est bien autrement terrible. Un peuple croyant peut être aidé par les sens à s’élever vers Dieu; un peuple incrédule supputera toujours l’argent que l’on dépense en cérémonies; il dira comme Judas: Utquid perditio haec? Aussi, vous voyez combien Notre-Seigneur ménage sa parcimonieuse charité et comment il lui répond: Pauperes semper vobiscum habetis(3). Oui, nous avons des pauvres, et des pauvres bien plus à plaindre que ceux dont parlait Judas.

A l’indigence du corps succède l’indigence de l’âme, indigence dont les immenses progrès ne peuvent être réparés que par la charité du clergé, mais une charité éclairée, proportionnée aux maux qu’elle est appelée à réparer. Et ce ne sont pas des statues, ni tout un appareil extérieur qui toucheront ces pauvres âmes; ce sera plutôt la pauvreté, l’humilité. Même dans le lieu saint, cette disposition ne saurait manquer d’être agréable à Dieu. Quand les prêtres de Jérusalem apprirent que le roi d’Assyrie envoyait Holopherne contre eux, ils couvrirent l’autel du Temple d’un cilice. Depuis longtemps, Holopherne a planté de nouveau ses tentes sur les terres d’Israël. Que fait-on pour implorer la juste miséricorde d’en haut?

Je vous ai parlé avec toute la franchise que m’inspire mon immense amitié pour vous. Je désire que vous compreniez bien mes paroles et que vous ne leur donniez pas un sens que je n’ai pas voulu leur donner.

Adieu, je joins ici quelques lignes pour la Congrégation.

Notes et post-scriptum
1. D'après le brouillon. Voir des extraits dans *Notes et Documents*, t. Ier p. 570-574.1. D'après le brouillon. Voir des extraits dans *Notes et Documents*, t. Ier p. 570-574.
2. Le vénérable André Soulas, fondateur des *Soeurs gardes-malades de Notre-Dame Auxiliatrice*, mort le 4 mai 1857, et dont la cause de béatification fut introduite en 1904. L'abbé Aoust devint ensuite agrégé de l'université.3. *Matth.*, XXVI, 8, 11.