Vailhé, LETTRES, vol.1, p.699

4 oct 1834 Rome, LAMENNAIS
Informations générales
  • V1-699
  • 0+214|CCXIV
  • Vailhé, LETTRES, vol.1, p.699
Informations détaillées
  • 1 ADOLESCENTS
    1 ADVERSAIRES
    1 AMITIE
    1 ANGLAIS
    1 ANIMAUX
    1 APOSTOLAT DE LA VERITE
    1 ATHEISME
    1 CHANOINES
    1 CHOIX
    1 CLERGE
    1 CONSTITUTION
    1 CONVERSATIONS
    1 COUVENT
    1 DEFENSE DE L'EGLISE
    1 DESOBEISSANCE
    1 DIACONAT
    1 DOGME
    1 ENCYCLIQUE
    1 ENNEMIS DE L'EGLISE
    1 EPREUVES
    1 EVECHES
    1 FRANCHISE
    1 IRLANDAIS
    1 LIVRES
    1 LOISIRS
    1 PAPE
    1 PARTI
    1 PENSEE
    1 PERSECUTIONS
    1 PEUPLES DU MONDE
    1 POLITIQUE
    1 PRESSE
    1 PROTESTANTISME ADVERSAIRE
    1 PROVIDENCE
    1 REFORME DE L'INTELLIGENCE
    1 REPUBLICAINS
    1 REVOLTE
    1 REVOLUTION
    1 ROYALISTES
    1 RUSE
    1 SALUT DES AMES
    1 SCANDALE
    1 SECTE
    1 SEMINAIRES
    1 SOLITUDE
    1 SOUMISSION DE L'ESPRIT
    1 SUPERIEURS ECCLESIASTIQUES
    1 SYSTEMES POLITIQUES
    1 THEOLOGIENS
    1 TRIOMPHE
    1 UNIVERSITES CATHOLIQUES
    1 VACANCES
    1 VOYAGES
    2 ASTROS, PAUL D'
    2 BAINES, PETER-AUGUSTINE
    2 BERRY, DUCHESSE DE
    2 BONNETTY, AUGUSTIN
    2 BRIMONT, ABBE DE
    2 COMBEGUILLE, ALEXIS
    2 DU LAC, JEAN-MELCHIOR
    2 FABRE, CESAIRE
    2 FORGUE, EUGENE
    2 FOURNIER, MARIE-NICOLAS
    2 GABRIEL, JEAN-LOUIS
    2 GERANDO, JOSEPH-MARIE DE
    2 GERBET, PHILIPPE-OLYMPE
    2 GREGOIRE XVI
    2 LAMENNAIS, FELICITE DE
    2 MAC CARTHY, CHARLES
    2 MAZZETTI, JOSEPH-MARIE
    2 MICARA, LODOVICO
    2 MONTALEMBERT, CHARLES DE
    2 O'CONNELL, DANIEL
    2 ODESCALCHI, CARLO
    2 OLIVIERI, MAURIZIO
    2 ROUSSEL, ALFRED
    2 VENTURA, GIOACCHINO
    2 VERNIERES, JACQUES
    3 ALBI
    3 ANCONE
    3 ANGLETERRE
    3 AUTRICHE
    3 BEAUVAIS
    3 BEZIERS
    3 BOLOGNE
    3 CHARTRES
    3 CHESNAIE, LA
    3 EGYPTE
    3 FLORENCE
    3 FRANCE
    3 ITALIE
    3 LYON
    3 MARCHES
    3 MARSEILLE
    3 MONTPELLIER
    3 ORIENT
    3 ORLEANS
    3 PALESTINE
    3 PAMIERS
    3 RAVENNE
    3 REIMS
    3 ROME
    3 TOULOUSE
  • A MONSIEUR L'ABBE FELICITE DE LA MENNAIS (1).
  • LAMENNAIS
  • le 4 octobre 1834.
  • 4 oct 1834
  • Rome,
La lettre

Monsieur l’Abbé,

J’ai trouvé ici, à mon retour d’une excursion que je suis allé faire du côté d’Ancône, Ravenne et Bologne deux lettres de vous, l’une du 10 août et l’autre du 3 septembre. J’ai reçu également un certain nombre de lettres de différents points du Midi de la France, dans lesquelles on me parle de vous. Je crois qu’il vous sera agréable de connaître comment vous êtes jugé dans ce pays-là.

La première est d’un directeur du Séminaire de Montpellier, qui jusqu’à aujourd’hui avait défendu chaudement votre système philosophique et vos opinions politiques. Il me parle de l’encyclique et de votre position: « Que fera-t-il? S’en tirera-t-il par une entière soumission? Du reste, il ne fera pas secte. Béziers est la ville du diocèse où il comptait le plus d’amis: tous n’ont qu’une voix pour le condamner, tous sont parfaitement soumis à l’encyclique. » Plus bas, il m’apprend qu’il a été passer quinze jours dans le diocèse de Pamiers: « J’ai vu, dit-il, des prêtres dans le diocèse de Pamiers, autrefois partisans de l’abbé de l[a Mennais]; ils pensent comme vous et tout le monde est soumis sans réserve. »(2)

La seconde est d’un prêtre qui fit avec moi le voyage de Rome, mais qui, au bout de quelque temps, fut obligé de retourner en France(3). C’est toujours de vous qu’il me parle: « Quand fera-t-il finir l’anxiété de ses amis? Aujourd’hui il est seul, tout seul. Cette solitude et l’abandon de ceux qui vivaient naguère de sa vie n’achèveront-ils pas d’exaspérer cette âme? » Le même prêtre me parlant ensuite du mandement de M. d’Astros, dans le diocèse duquel il se trouvait quand il fut publié, s’exprime en ces termes: « Il n’en est résulté que le scandale et le mépris de tout ce qu’il faut aimer, pour n’être pas séparé de la vigne. » Plus loin, il ajoute: « Nous sommes sous l’empire de la terreur; la délation a des yeux partout, et partout gloire et honneur lui sont acquis. »

La troisième lettre est d’un ex-directeur du Séminaire de Montpellier, qui vient d’être renvoyé en grande partie pour avoir propagé dans le Séminaire les doctrines de l’Avenir; -les autres raisons que l’évêque lui a données de son renvoi sont qu’il formait des ecclésiastiques trop religieux, trop dévoués et pas assez curés. Comment trouvez-vous cela? -Ce prêtre a profité des vacances dernières pour parcourir les diocèses de Marseille, Lyon, Orléans, Beauvais et Chartres: « Pendant mes voyages, me dit-il, j’ai été constamment entre les mains des adversaires de M. de l[a Mennais]. On le regarde comme entièrement perdu. Je n’ai pas eu de langue(4). Si le temps et l’argent ne m’eussent manqué, j’aurais tenté d’aller jusqu’à La Chênaie consoler, adoucir et même ramener, s’il le fallait, ce grand infortuné. Dès que je saurai si vous êtes de cet avis, je me mettrai en rapport avec cette grande âme. Je ne sais si c’est une illusion, une présomption, il me semble que je puis lui être utile. » Ce prêtre s’appelle M. Vernière. Je le connais depuis cinq ans; j’ai vu peu d’âmes aussi fortes au milieu des épreuves par lesquelles ses supérieurs l’ont fait passer. Je me suis permis de l’engager à vous écrire. Il m’a été si utile en certaines circonstances que j’ai pensé que sa voix pourrait vous apporter quelques consolations.

Aujourd’hui même, j’ai reçu deux lettres. L’une [est] de du Lac, qui me reproche de vous avoir transmis des détails, d’après lesquels vous paraissiez, dit-il, ne pas regarder la décision du Saint-Père comme dogmatique. Je me serai probablement mal expliqué. Je sais que M. M[ac-Carthy] vous apprît, dans le temps, que, dans une conversation avec un Dominicain de son pays, celui-ci lui avait fait part des murmures des théologiens. Moi-même, je vous ai appris que le P. V[entura], le P. Mazzetti, le P. Ol[ivieri], le c[ardinal] M[icara] étaient très mécontents. une foule d’autres théologiens (une personne m’a assuré en connaître trente des plus distingués et du même avis) paraissent se plaindre des procédés du Pape, mais tous se soumettent. Il n’y a pas quatre jours encore, je vis le p. Olivieri qui vous est toujours vivement attaché; il me répétait son observation sur le blâme de votre système de philosophie. Il était persuadé que l’on avait voulu parler de vous, mais il voyait une permission de la Providence dans l’absence de toute note qui eût rapport à vos opinions; cependant, il ne s’en disait pas moins soumis à la décision pontificale, quelle quelle fût. Ce que j’ai pu vous dire du c[ardinal] Odescalchi n’a trait qu’à votre système philosophique, et sur ce point, il y a unanimité dans les personnes que je vois.

Du Lac voudrait encore que je vous engageasse à une soumission publique. Quelque poids qu’ait pour moi l’opinion de ce jeune [homme], dans un moment surtout où il vient de faire un si beau sacrifice à Dieu, je ne puis être de son avis, au moment où je ne puis prendre sur moi, dans une question aussi difficile, de vous décider à quelque démarche que ce soit, bien que je sache combien peu de chose est mon sentiment personnel.

Si même je suis entré dans de pareils détails, j’ai cru le devoir à l’amitié d’un jeune homme qui montre par sa conduite combien son désir de faire le bien est grand et qui, de plus, vous est si profondément attaché. Voici un fragment de sa lettre. « Il paraît qu’à Rome vous ne vous rendez pas compte de la position de cet homme. Catholiques et incrédules, tout le monde s’accorde à le regarder comme rebelle à l’Eglise. Les impies le portent aux nues, les chrétiens gémissent et prient pour sa conversion. Une telle position n’est pas tenable: il aurait cent fois raison qu’il devrait se soumettre pour faire cesser ce scandale. Je vous le répète, son silence cause un mal infini. Que ses amis ne s’abusent pas: ils répondront devant Dieu de tout ce mal, si au lieu de l’adoucir par leurs conseils, au lieu de l’exhorter à la soumission par leurs paroles et par leurs exemples, ils cherchent à l’aigrir par des récriminations au moins inutiles. Certes, personne plus que moi n’éprouve du dégoût pour les viles intrigues et les persécutions de nos ennemis; personne ne trouve plus infâme le côté humain de tout cela; mais, comme me le dit l’abbé Gerbet, `l’essence de l’institution divine, c’est qu’au milieu des circonstances humaines qui l’entourent et l’assiègent, elle produit un résultat divin, la promulgation de la vraie doctrine.’ Voilà notre règle invariable. »

Un autre jeune homme du diocèse d’Albi(5) m’écrit en ces termes: « C’est un fait que l’abbé est seul en France de son avis, et c’est une effrayante position pour un homme qui a si longtemps crié: Vae soli! L’opinion générale de tous ses disciples et de tous ceux qui s’intéressent à lui dans ce pays, comme celle de tous ses adversaires vraiment religieux, est qu’il doit se soumettre purement et simplement. On ne se dissimule nullement les rigueurs, les torts, les outrages peut-être, dont il a à se plaindre; on présume même qu’une telle soumission de sa part paraîtra à plusieurs une pure jonglerie; mais le devoir passe avant tout, et dans les circonstances actuelles, à la vue des inductions que les ennemis de l’Eglise tirent du silence de l’abbé, il ne saurait sous aucun prétexte s’empêcher de s’expliquer. Voilà ce que je vous donne comme le résultat de discussions entre quelques jeunes gens religieux, tous pleins d’admiration et de respect pour l’abbé, dont l’autorité n’est rien, sans doute, mais qui voudraient, au prix de ce qu’ils ont de plus cher, adoucir un peu la douleur de ce noble coeur et prévenir surtout des malheurs qui ne sont que trop menaçants. »

Tel est, Monsieur l’abbé, l’ensemble des opinions de ceux de vos amis que je puis connaître. Vous voyez que tous vous sont sincèrement attachés, que tous partagent la même indignation contre la manière dont on a pu agir quelquefois à votre égard; cependant, tous se soumettent et désirent ardemment que vous vous soumettiez avec eux.

Pour moi, je ne sais que penser. Voilà que toutes ou presque toutes vos idées débordent de toutes parts. Le Pape, approuvant l’admission des protestants dans l’université que M. Banes va fonder en Angleterre, fait un pas dont probablement, comme simple chrétien, il ne comprend pas toute la porté. M. Banes, avec qui j’en ai causé, y voit la reconnaissance d’un nouveau mode de défendre le catholicisme et l’aveu formel qu’il ne faut plus se contenter de le conserver, mais le resemer de nouveau. La manière dont M. O’Connell tranche dans la Constitution anglaise au nom des catholiques irlandais est bien terrible; il ne le fait que d’après des principes, conformes aux vôtres. On ne lui dit rien. On m’assure que M. de Gérando entre au Séminaire et qu’il sera diacre avant la fin de l’année(6). On verra un prêtre défendre impunément les mêmes principes politiques que vous; seulement, il emploiera pour la défense d’un parti les mêmes armes dont vous usiez pour le triomphe de la religion.

Tout ceci me paraît devoir être examiné avec calme et sans prévention, et, dès lors, il me paraît facile de voir que l’on condamne moins vos principes que l’exagération [de] ces principes; que, de plus, on poursuit en vous un homme qui a voulu heurter les partis et les coteries sans aucun ménagement. Mais, si cela est, c’est moins le sacrifice de vos opinions que le sacrifice de vous-même que l’on vous demande, et l’habileté de vos adversaires me paraît avoir atteint son but, quelque parti que vous preniez. Si vous persistez à ne pas vous soumettre, ceux qui réclament le monopole de la défense de l’Eglise triompheront, parce qu’ils vous auront écarté; si vous vous soumettez, ils triompheront encore, parce que, quoi que vous fassiez, ils vous trouveront en contradiction avec quelqu’un de vos actes ou de vos ouvrages et qu’ils jouiront du plaisir de vous voir pris dans leurs filets. Mais pour vous, la question ne me semble pas là. Il s’agit, ce me semble, de savoir si vous vous retirerez pour jamais dans votre tente ou si vous vous replacerez, malgré les criailleries des Thersites modernes, à la tête du camp des catholiques.

Il est deux observations que je ne dois pas oublier. La première est qu’on donne comme très positif que le Pape a entre les mains la copie d’une lettre de vous, dans laquelle vous diriez que vous espérez être toujours chrétien, pour catholique…, des points. Le Pape a reçu en audience, il y a quatre jours, les abbés des différents couvents de la Trappe, dont il vient enfin d’approuver la réforme; il leur a dit qu’il vous regardait comme un sanglier blessé et que, sous peu, vous reparaîtriez avec quelque ouvrage terrible. Ce sont ses expressions, comme on me les a rapportées.

La seconde (observation) est que j’ai eu, dans mon voyage, occasion de voir de jeunes républicains français de la couleur du National. Dans ce parti, on vous admire beaucoup, mais on ne vous croit pas sincère; on ne vous croit que le désir de faire du bruit. Cependant, on vous louera, parce que vous pouvez être un auxiliaire utile. Selon ces Messieurs, vous voulez du bruit et l’on vous en fera pour vous attirer.

Je suis tout étonné de ma franchise. Certes, si je ne comptais sur votre grande bonté pour moi, il y aurait presque de l’impertinence à vous parler ainsi.

Le peu que j’ai vu des Marches est dans un état d’effervescence incroyable. Le joug autrichien pèse horriblement. Bologne ronge ses fers. Est-ce pour longtemps? Je ne sais; mais si la politique française était de balancer les forces autrichiennes en doublant la garnison d’Ancône, la révolution ne tarderait pas à éclater. Les minutieuses vexations de la police qui ne permettent pas aux habitants de bouger sans les plus grandes précautions de surveillance exaspèrent les esprits. Joignez à cela une disposition générale à trouver mal tout acte du pouvoir, même les dispositions les plus matériellement favorables, au pays, et vous comprendrez qu’un changement est imminent dans cette partie de l’Italie.

J’ai rencontré à Florence un agent de la duchesse de Berry, qui m’a dit que le plan adopté pour défendre la cause légitimiste était la logique et la presse. Je doute que ce moyen réussisse mieux que les autres.

Pour terminer cette longue lettre par quelques nouvelles consolantes, nous nous transporterons, si vous voulez bien, en Orient, où il paraît que le catholicisme commence à renaître. J’ai vu dernièrement un chanoine de Reims, l’abbé de Brimont, qui vient de passer dix-huit mois en Egypte, en Palestine et à…(7)

Notes et post-scriptum
1. D'après un brouillon inachevé. Voir des extraits dans *Notes et Documents*, t. Ier, p. 475-480.
7. La fin manque. Cette lettre ne paraît pas avoir obtenu de réponse. Avant même de la recevoir, ému des indiscrétions de la censure romaine qui se permettait parfois d'examiner sa correspondance, La Mennais avait décidé de ne plus rester en relation avec ses amis de Rome. Il écrivait, en effet, à Montalembert le 14 octobre 1834: "J'ai écrit a Rome que, toutes mes lettres étant ouvertes, je priais qu'on ne m'en envoyât plus; de sorte, que j'ignore maintenant ce qui s'y passe et ne m'en inquiète guère." (Forgues *Op. cit*. p. 337.) La manière dont lui parvint la lettre de l'abbé d'Alzon, du 4 octobre, n'était pas pour le faire changer d'avis. Ordinairement, l'abbé de la Mennais ne correspondait pas directement avec l'abbé d'Alzon. Des neuf lettres conservées qu'il lui adressa à Rome, entre le 5 mars et le 3 septembre 1834, les deux premières seulement, celles des 6 et 29 mars, portent l'adresse suivante: "Monsieur Emmanuel d'Alzon, à Rome"; une troisième n'a pas d'adresse; deux autres, celles du 28 mai et du 28 juin, portent l'adresse suivante: "Monsieur Emmanuel d'Alzon, chez Mme la Vicomtesse d'Alzon, rue de Grenelle F. G. n° 50, Paris"; les quatre dernières enfin, celles des 18 et 22 juillet, du 10 août et du 3 septembre, sont adressées à *Monsieur Bonnetty, au bureau des Annales de philosophie chrétienne, rue Ft Guilaume, n° 23. F. G. Paris. Pour M. Emmanuel d'Alzon*. C'était donc, en dernier lieu, Bonnetty qui servait d'intermédiaire entre La Mennais et, le jeune d'Alzon. Or, l'abbé Roussel a publié, d'après l'original, dans *le Mois littéraire et pittoresque*, 1902, t. VII, p. 372, ce fragment de lettre de Bonnetty à La Mennais qui ne peut viser que notre lettre du 4 octobre:
"Paris, le 27 octobre 1834.
Je viens de recevoir, dans une lettre de notre cher d'Alzon, une lettre à votre adresse. En vous la faisant passer à La Chênaie, je crois devoir vous prévenir que je l'ai reçue dans l'état où elle se trouve, c'est-à-dire portant la marque qu'elle a été *décachetée*. Celle dans laquelle elle était renfermée a été ouverte en même temps. Je me perds en conjectures pour savoir à qui attribuer cette violation du secret de la poste, et je veux en prévenir Emmanuel, afin qu'il se conduise en conséquence. Peut-être est-ce lui-même qui aura eu à ajouter quelque chose...
Bonnetty."
Ainsi se termina sans froissement et sans rupture la correspondance proprement dite du jeune clerc avec l'abbé de la Mennais, correspondance qui, du reste, si elle était entièrement conservée, ne comprendrait pas plus d'une vingtaine de lettres.1. D'après un brouillon inachevé. Voir des extraits dans *Notes et Documents*, t. Ier, p. 475-480.
2. Il s'agit de l'abbé Fabre, dont nous possédons encore la lettre, écrite de Béziers les 23 juillet et 12 août 1834.
3. L'abbé Gabriel.
4. C'est-à-dire j'ai gardé le silence.
5. Alexis Combeguille, dans sa lettre écrite de Castres le 22 septembre 1834. C'était un grand ami de l'abbé d'Alzon et de du Lac; nous avons encore de lui, avec la lettre dont parle Emmanuel, plusieurs lettres de la même époque. Il mourut en 1855.
6. Ce bruit n'était pas fondé.
7. La fin manque. Cette lettre ne paraît pas avoir obtenu de réponse. Avant même de la recevoir, ému des indiscrétions de la censure romaine qui se permettait parfois d'examiner sa correspondance, La Mennais avait décidé de ne plus rester en relation avec ses amis de Rome. Il écrivait, en effet, à Montalembert le 14 octobre 1834: "J'ai écrit a Rome que, toutes mes lettres étant ouvertes, je priais qu'on ne m'en envoyât plus; de sorte, que j'ignore maintenant ce qui s'y passe et ne m'en inquiète guère." (Forgues *Op. cit*. p. 337.) La manière dont lui parvint la lettre de l'abbé d'Alzon, du 4 octobre, n'était pas pour le faire changer d'avis. Ordinairement, l'abbé de la Mennais ne correspondait pas directement avec l'abbé d'Alzon. Des neuf lettres conservées qu'il lui adressa à Rome, entre le 5 mars et le 3 septembre 1834, les deux premières seulement, celles des 6 et 29 mars, portent l'adresse suivante: "Monsieur Emmanuel d'Alzon, à Rome"; une troisième n'a pas d'adresse; deux autres, celles du 28 mai et du 28 juin, portent l'adresse suivante: "Monsieur Emmanuel d'Alzon, chez Mme la Vicomtesse d'Alzon, rue de Grenelle F. G. n° 50, Paris"; les quatre dernières enfin, celles des 18 et 22 juillet, du 10 août et du 3 septembre, sont adressées à *Monsieur Bonnetty, au bureau des Annales de philosophie chrétienne, rue Ft Guilaume, n° 23. F. G. Paris. Pour M. Emmanuel d'Alzon*. C'était donc, en dernier lieu, Bonnetty qui servait d'intermédiaire entre La Mennais et, le jeune d'Alzon. Or, l'abbé Roussel a publié, d'après l'original, dans *le Mois littéraire et pittoresque*, 1902, t. VII, p. 372, ce fragment de lettre de Bonnetty à La Mennais qui ne peut viser que notre lettre du 4 octobre:
"Paris, le 27 octobre 1834.
Je viens de recevoir, dans une lettre de notre cher d'Alzon, une lettre à votre adresse. En vous la faisant passer à La Chênaie, je crois devoir vous prévenir que je l'ai reçue dans l'état où elle se trouve, c'est-à-dire portant la marque qu'elle a été *décachetée*. Celle dans laquelle elle était renfermée a été ouverte en même temps. Je me perds en conjectures pour savoir à qui attribuer cette violation du secret de la poste, et je veux en prévenir Emmanuel, afin qu'il se conduise en conséquence. Peut-être est-ce lui-même qui aura eu à ajouter quelque chose...
Bonnetty."
Ainsi se termina sans froissement et sans rupture la correspondance proprement dite du jeune clerc avec l'abbé de la Mennais, correspondance qui, du reste, si elle était entièrement conservée, ne comprendrait pas plus d'une vingtaine de lettres.