Vailhé, LETTRES, vol.1, p.712

26 oct 1834 Rome, LA_GOURNERIE Eugène
Informations générales
  • V1-712
  • 0+217|CCXVII
  • Vailhé, LETTRES, vol.1, p.712
Informations détaillées
  • 1 ARCHITECTURE SACREE
    1 CLOCHER
    1 ESPAGNOLS
    1 MORT
    1 NOBLESSE
    1 PAPE
    1 PENSEE
    1 PEUPLE
    1 POLITIQUE
    1 RECONNAISSANCE
    1 REPOS
    1 REPUBLICAINS
    1 RESIDENCES
    1 SOLITUDE
    1 TRANSPORTS
    1 VETEMENT
    1 VOYAGES
    2 BOURMONT, VICTOR DE
    2 DREUX-BREZE, PIERRE-SIMON DE
    2 DUDON, PAUL
    2 LACROIX, ABBE
    2 OCHEDA, DON
    2 VALERY
    3 FLORENCE
    3 FLORENCE, PALAIS RICCARDI
    3 FLORENCE, PALAIS STROZZI
    3 FRANCE
    3 ITALIE
    3 MILAN
    3 MILAN, CATHEDRALE
    3 NAPLES
    3 ROME
    3 VENISE, BASILIQUE SAINT-MARC
  • A MONSIEUR EUGENE DE LA GOURNERIE (1).
  • LA_GOURNERIE Eugène
  • le 26 octobre 1834.
  • 26 oct 1834
  • Rome,
La lettre

Mon cher ami,

Je reçois à l’instant votre lettre de Milan. Il faut que quelque fée, sortie d’un des clochers de Saint-Marc, soit venue de sa baguette frapper votre unique malle, pour en faire sortir tous les objets que vous me dites avoir réparé les avaries de votre malle perdue. Car, si je ne me trompe, lorsque je vous dis adieu, vous aviez à peu près complètement renoncé à la robe de chambre vénitienne, vu la légèreté progressive de votre bourse. Je pense que la même fée vous aura également envoyé quelque compagnon de voyage, pour vous faire passer joyeusement votre temps. Et de cela je la remercie fort, car rien n’est plus ennuyeux, à mon gré, que de battre les grands chemins ou seul, ou, ce qui est encore pis, avec des gens qui ne vous conviennent point.

Je suis à Rome depuis quelques jours. Je suis resté à Florence bien plus de temps que je ne pensais, et cela par la faute d’un insupportable courrier, lequel m’a tenu le bec dans l’eau jusqu’au neuvième jour pour me faire partir sur le devant d’une voiture, où je n’étais protégé du chaud, du froid et de la pluie que par une méchante natte. Je suis enchanté de Florence et de ses palais. Cette architecture sévère des palais Strozzi et Riccardi me plaît infiniment. On sent, ce me semble, le républicanisme turbulent des Florentins dans la négligence des grands seigneurs, qui n’opposent aux insultes de la populace que les pierres grossièrement taillées des premiers étages. Le moment où Florence me paraissait dans sa beauté, c’était le soir, et, sur ce point, je suis de votre avis: le soleil couchant a des teintes merveilleuses pour les grands monuments et les belles vues.

Le hasard a voulu qu’à Florence j’aie habité la propre chambre qu’occupa douze ou quinze ans Don Ocheda, ce savant espagnol, que Valery dit avoir connu à la locanda della fontana. J’ignore si j’ai couché dans le lit où il est mort, mais ce que je sais, c’est que le mien était fort dur. Quoique je n’aie fait aucune visite à Florence, j’ai rencontré deux personnes, d’une opinion toute opposée: M. l’abbé Lacroix, que Brézé vous aura probablement nommé, grand admirateur du moyen âge, ami des arts, qui ne vit que pour les arts et pour l’Italie; et un secrétaire de M de Bourmont qui ne peut souffrir Florence, ni rien de ce qui se rapporte au moyen âge. Entre ces deux individus, je n’étais de l’avis ni de l’un ni de l’autre. J’avais le malheur de croire qu’à Rome il y a à étudier et admirer autre chose que ce qu’ont fait les Papes. J’avais encore le malheur de trouver le Dôme de Milan une superbe chose, quoique l’extérieur de la coupole ne soit, à mon gré, rien de bien remarquable.

J’ai trouvé par le plus grand hasard Dudon qui, depuis quelque temps déjà, est de retour de Naples. Il m’a dit être assez content de son voyage et surtout avoir vu Rome avec un certain plaisir. Pauvre jeune homme! Il va tenter de rentrer en France. Peut-être ferait-il bien d’attendre l’amnistie.

Il m’est impossible de vous donner des nouvelles; je n’en sais aucune, sinon que les Trappistes viennent enfin d’être reconnus, ce qui ne vous fera pas grand’chose, je pense. Don Mignel est ici. Mais on ne dit pas si sa présence aura quelque influence sur la politique. Je vous parle de politique. Maintenant que je vous sais au terme de votre voyage, vous ne sauriez croire quel bonheur ç’a été pour moi de la laisser reposer pendant tout le mois qui vient de s’écouler. Je trouve que ces haltes font un bien infini à la tête et au jugement. On juge ensuite les choses avec plus de sang-froid. On peut se remettre sans peine au courant des événements, et on a laissé passer assez de choses pour pouvoir…(2)

Notes et post-scriptum
1. D'après le brouillon.
2. La fin manque.