Vailhé, LETTRES, vol.1, p.794

24 mar 1835 Rome, VERNIERE Abbé
Informations générales
  • V1-794
  • 0+243|CCXLIII
  • Vailhé, LETTRES, vol.1, p.794
Informations détaillées
  • 1 ADOLESCENTS
    1 AMITIE
    1 AUGUSTIN
    1 CHAIRE
    1 CHAPELET
    1 CHRISTIANISME
    1 CLERGE
    1 CONNAISSANCE
    1 CRAINTE
    1 EGLISE
    1 ERREUR
    1 FOI
    1 GLOIRE DE DIEU
    1 IGNORANCE
    1 MINISTRES PROTESTANTS
    1 PAGANISME
    1 PREDICATION
    1 PRESSE
    1 PROTESTANTISME ADVERSAIRE
    1 SAINTETE
    1 SAINTS
    1 SALUT DES AMES
    1 SEMINAIRES
    1 THOMAS D'AQUIN
    1 TRAVAIL DE L'ETUDE
    1 VERTU D'OBEISSANCE
    1 VERTUS DE L'APOTRE
    1 VIE DE PRIERE
    2 ATHANASE, SAINT
    2 BOSSUET
    2 CHAFFOY, CLAUDE-FRANCOIS DE
    2 DU LAC, JEAN-MELCHIOR
    2 FRANCOIS DE SALES, SAINT
    2 GREGOIRE XVI
    2 LAMENNAIS, FELICITE DE
    2 MONTPELLIER THEODORE-JOSEPH DE
    2 PICOT, MICHEL-PIERRE-JOSEPH
    2 PIERRE, SAINT
    2 VENTURA, GIOACCHINO
    2 WELD, THOMAS
    3 FRANCE
    3 NIMES
  • A MONSIEUR L'ABBE VERNIERE (1).
  • VERNIERE Abbé
  • le 24 mars 1835.
  • 24 mar 1835
  • Rome,
La lettre

Mon cher Monsieur Vernière,

Permettez-moi de m’étonner des craintes que vous me manifestez, à la fin de votre lettre au sujet de la manière dont je puis recevoir vos paroles. Il semblerait que je ne pourrais être d’un avis opposé au vôtre, sans que mon amitié pour vous en fût diminuée. Je ne comprends pas trop une pareille crainte.

Vous voulez que je me consacre aux protestants. Je ne demande pas mieux. Vous voulez que je m’y prenne d’une certaine façon. Je vous fais observer que je crois qu’une méthode différente serait meilleure. Comme ni vous ni moi ne sommes infaillibles, c’est l’expérience qui seule peut juger. Je ne crois pas qu’avec l’instruction de certains ministres protestants, il faille se risquer à les attaquer, si l’on n’est soi-même bien préparé. Je crois qu’une des plaies de l’Eglise est le peu de science du clergé. Je crois encore que ce n’est pas en se fiant à l’inspiration du moment que l’on pourra faire quelque chose. Je suis convaincu avec vous qu’il faut, outre cela, prier et beaucoup prier, mais qu’aujourd’hui la prière seule ne suffit pas.

Voilà ma conviction, fondée sur une foule de raisons, dont une entr’autres est que, depuis l’établissement du christianisme, nous voyons toujours les peuples païens convertis par des gens qui, avant tout, étaient des saints, mais plutôt inspirés que savants, tandis que pour la conversion des hérétiques vous voyez des saints plutôt savants qu’inspirés. Depuis saint Augustin et saint Athanase jusqu’à Bossuet et saint François de Sales, en passant par saint Thomas, nous voyons parfaitement cette marche.

Chacun part d’un point de vue différent. Mais plus je réfléchis à l’état de notre protestantisme, plus je me confirme dans ma pensée. Je vous prie de bien la comprendre. Je ne dis point que la science seule fera tout. Je dis qu’il faut s’efforcer d’acquérir la science et la sainteté de front, et que le meilleur moyen de l’acquérir est d’aller étudier sur les lieux où le protestantisme est le plus vivace. J’avoue que je ne suis pas de ceux qui pensent que les connaissances nécessaires à un homme apostolique se communiquent avec l’imposition des mains et que, pour prêcher avec fruit, il suffit de monter en chaire sans préparation aucune. Je ne suis pas, non plus, de ceux qui font consister le mérite de leurs instructions dans des périodes plus ou moins ronflantes. Le véritable amour de la gloire de Dieu ne se perd pas dans le son de quelques phrases sonores, mais cet amour bien entendu ne veut pas que, lorsqu’on va attaquer des hérétiques. on se présente sans la préparation nécessaire.

Du reste, tout ce que je dis là est assez inutile, car mon plans unique est d’aller, en arrivant à Nîmes, trouver l’évêque et lui exposer mes idées: s’il les approuve, les suivre; sinon, faire ce qu’il me dira. Je puis avoir mes opinions que je soutiens comme opinions, mais je ne pense pas qu’il y ait de voie plus sure que celle de l’obéissance, et c’est celle que je suis résolu de suivre.

La déclaration que vous avez lue dans les journaux a été faite pour moi seul. Que voulez-vous que je vous dise? Je ne répondrai pas à l’Ami, mais j’ai suspendu mes relations avec l’abbé de Montpellier(2). Je ne puis vous rien dire sur M. de la M[ennais]. Si j’en crois du Lac il a perdu la foi, mais ne sait pas encore bien que mettre à la place de l’Eglise; si j’en crois un de mes amis, le cardinal Weld aurait reçu une lettre d’un ami intime de l’abbé, dans laquelle on lui dit que celui-ci est dans l’erreur, mais qu’il est sans cesse en prière et qu’il dit son chapelet du matin au soir.

Voilà mes nouvelles. Mon projet est toujours d’aller en France, au mois de juin. Je voudrais m’y trouver avant la Saint-Pierre, afin de voir au séminaire quelques-uns de nos jeunes gens… (3).

Notes et post-scriptum
2. Il s'agit de la déclaration que l'abbé d'Alzon avait dû signer avant sa promotion au sous-diaconat et dont s'occupaient quelques revues ou journaux. La formule, que nous avons cité plus haut, était parvenue, nous ignorons comment, à la connaissance d'un ami d'Emmanuel, l'abbé de Montpellier, qui l'avait fait passer au *Journal historique et littéraire de Liége*, et celui-ci l'inséra en février 1835, p. 533 sq., 551 sq. L'*Ami de la religion*, de Picot, toujours ennemi de La Mennais et de tout ce qui touchait à son école, s'était empressé de reproduire la nouvelle, ainsi que la formule latine avec une traduction française, en l'agrémentant d'un commentaire à l'adresse des amis de l'abbé Féli. Le tout parut dans son numéro des 2 et 3 février 1835, p. 454 et sq., et nous avons retrouvé, dans les papiers de notre fondateur, la copie faite de sa main, et évidemment à cette époque, de l'article presque en entier de l'*Ami de la religion*. Voici cet article *in extenso*, tel que le donnat l'*Ami de la religion*.
"Le *Journal historique*, de Liége, publie une pièce importante: c'est une déclaration de soumission aux Encycliques qu'on exige à Rome de tout ecclésiastique étranger qui aspire à recevoir les ordres, et dont les sentiments sont assez connus. L'auteur du *Journal* déclare qu'il tient cette formule de la source la plus sûre et qu'il en garantit l'authenticité. Comme nous savons que c'est un écrivain exact et consciencieux, qu'il a des rapports fréquents avec Rome, et comme d'ailleurs ce qu'il annonce est tout à fait d'accord avec ce que nous avons appris nous-même, nous ne faisons aucune difficulté de citer cette formule. (Suit la formule latine, avec la traduction française donnée par le *Journal historique* de Liége; l'abbé d'Alzon les a omises dans sa copie, ainsi que le passage précédent, à partir de: L'auteur du *Journal...*)
"Il faut espérer que cette formule si expresse, si précise, fera tomber les vaines chicanes qu'on oppose encore aux Encycliques. Qui croirait qu'il est encore des gens qui en contestent le sens et l'autorité? On vous cite des lettres de Rome, qui disent que le Pape a voulu condamner dans la deuxième Encyclique, non la philosophie du sens commun, mais la philosophie allemande. Cela est bien sûr, car c'est le P. V[entura] qui l'a écrit. Et l'on dit cela sérieusement! Quel homme de bon- ne foi pourrait être dupe d'un semblable subterfuge? Quoi! Dans la même Encyclique qui condamne les *Paroles d'un croyant*, le Pape condamne un *nouveau système de philosophie*, et, plutôt que de convenir que ce système est celui de l'auteur même des *Paroles d'un croyant*, on va chercher la philosophie allemande! On dirait aussi bien que c'est la philosophie indienne ou chinoise. Nous savons qu'à Rome cette misérable défaite est appréciée à sa valeur, et qu'on y regarde en pitié ces illusions de l'esprit de parti. On nous a cité à cet égard des faits et des paroles venant d'une source très sûre; mais nous ne voulons point mêler de grands noms à une discussion qui ne peut venir que d'un profond aveuglement. Qu'il nous suffise de dire que l'on rencontre des gens qui ont adhéré, ont-ils dit, à l'Encyclique, mais qui ne sont changés sur rien, qui défendent encore leur philosophie prétendue catholique, qui excusent même les *Paroles d'un croyant*, et qui ne souffrent pas qu'on doute le moins du monde de la pureté de la foi de leur chef."1. D'après le brouillon inachevé.
2. Il s'agit de la déclaration que l'abbé d'Alzon avait dû signer avant sa promotion au sous-diaconat et dont s'occupaient quelques revues ou journaux. La formule, que nous avons cité plus haut, était parvenue, nous ignorons comment, à la connaissance d'un ami d'Emmanuel, l'abbé de Montpellier, qui l'avait fait passer au *Journal historique et littéraire de Liége*, et celui-ci l'inséra en février 1835, p. 533 sq., 551 sq. L'*Ami de la religion*, de Picot, toujours ennemi de La Mennais et de tout ce qui touchait à son école, s'était empressé de reproduire la nouvelle, ainsi que la formule latine avec une traduction française, en l'agrémentant d'un commentaire à l'adresse des amis de l'abbé Féli. Le tout parut dans son numéro des 2 et 3 février 1835, p. 454 et sq., et nous avons retrouvé, dans les papiers de notre fondateur, la copie faite de sa main, et évidemment à cette époque, de l'article presque en entier de l'*Ami de la religion*. Voici cet article *in extenso*, tel que le donnat l'*Ami de la religion*.
"Le *Journal historique*, de Liége, publie une pièce importante: c'est une déclaration de soumission aux Encycliques qu'on exige à Rome de tout ecclésiastique étranger qui aspire à recevoir les ordres, et dont les sentiments sont assez connus. L'auteur du *Journal* déclare qu'il tient cette formule de la source la plus sûre et qu'il en garantit l'authenticité. Comme nous savons que c'est un écrivain exact et consciencieux, qu'il a des rapports fréquents avec Rome, et comme d'ailleurs ce qu'il annonce est tout à fait d'accord avec ce que nous avons appris nous-même, nous ne faisons aucune difficulté de citer cette formule. (Suit la formule latine, avec la traduction française donnée par le *Journal historique* de Liége; l'abbé d'Alzon les a omises dans sa copie, ainsi que le passage précédent, à partir de: L'auteur du *Journal...*)
"Il faut espérer que cette formule si expresse, si précise, fera tomber les vaines chicanes qu'on oppose encore aux Encycliques. Qui croirait qu'il est encore des gens qui en contestent le sens et l'autorité? On vous cite des lettres de Rome, qui disent que le Pape a voulu condamner dans la deuxième Encyclique, non la philosophie du sens commun, mais la philosophie allemande. Cela est bien sûr, car c'est le P. V[entura] qui l'a écrit. Et l'on dit cela sérieusement! Quel homme de bon- ne foi pourrait être dupe d'un semblable subterfuge? Quoi! Dans la même Encyclique qui condamne les *Paroles d'un croyant*, le Pape condamne un *nouveau système de philosophie*, et, plutôt que de convenir que ce système est celui de l'auteur même des *Paroles d'un croyant*, on va chercher la philosophie allemande! On dirait aussi bien que c'est la philosophie indienne ou chinoise. Nous savons qu'à Rome cette misérable défaite est appréciée à sa valeur, et qu'on y regarde en pitié ces illusions de l'esprit de parti. On nous a cité à cet égard des faits et des paroles venant d'une source très sûre; mais nous ne voulons point mêler de grands noms à une discussion qui ne peut venir que d'un profond aveuglement. Qu'il nous suffise de dire que l'on rencontre des gens qui ont adhéré, ont-ils dit, à l'Encyclique, mais qui ne sont changés sur rien, qui défendent encore leur philosophie prétendue catholique, qui excusent même les *Paroles d'un croyant*, et qui ne souffrent pas qu'on doute le moins du monde de la pureté de la foi de leur chef."
3. La suite manque.