Vailhé, LETTRES, vol.2, p.21

25 aug 1837 Nîmes, BROCHET Mère Marie de Jésus

Deux sortes de confiance et deux sortes de terreur. -Distractions à l’oraison. -Indulgences pour les morts. -Les infirmités des supérieures. -La mort à soi est surtout l’ouvrage de la grâce.

Informations générales
  • V2-021
  • 0+276|CCLXXVI
  • Vailhé, LETTRES, vol.2, p.21
Informations détaillées
  • 1 ACTION DE DIEU DANS L'AME
    1 AMES DU PURGATOIRE
    1 CONSENTEMENT
    1 CORPS
    1 CRAINTE
    1 DESESPOIR
    1 DETACHEMENT
    1 DISTRACTION
    1 HUMILITE
    1 ILLUSIONS
    1 INDULGENCES
    1 JOUR DES MORTS
    1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
    1 ORAISON
    1 PECHE MORTEL
    1 PURGATOIRE
    1 PURIFICATION
    1 REFORME DU COEUR
    1 SAINT-ESPRIT
    1 SATAN
    1 SUPERIEURE
    1 VERTUS THEOLOGALES
    2 DAVID, BIBLE
    2 LE VALOIS, LOUIS
    2 THERESE, SAINTE
  • A LA R. MERE MARIE DE JESUS (1).
  • BROCHET Mère Marie de Jésus
  • le 25 août 1837.
  • 25 aug 1837
  • Nîmes,
La lettre

Madame,

Les quatre questions que vous m’adressez me paraissent assez simples à résoudre, la quatrième exceptée.

1° Il y a une confiance que Dieu met dans le coeur comme une récompense: celle-là ne dépend pas de nous. C’est une récompense ou un encouragement, quelquefois une illusion. Lorsqu’elle est retirée, on ne doit pas se plaindre, car l’état dans lequel elle laisse l’âme est bien plus parfait, parce qu’il la fait souffrir.

Il y a encore une confiance fondée sur la foi et la charité, qui n’est autre que l’espérance: c’est une vertu théologale, et tout chrétien qui ne l’a pas est en état de péché mortel. Cette confiance, vous l’avez certainement; les terreurs qui vous accablent ne servent qu’à la fortifier très sûrement, et c’est ce dont je vous félicite.

De même, il y a deux sortes de terreurs qui ne sont mauvaises ni l’une ni l’autre. La première est un peu de désespoir, et parce qu’elle est involontaire, elle n’est point coupable tant qu’on n’y adhère pas. Le démon l’inspire et Dieu la permet. C’est un état que Dieu veut pour achever de purifier une âme; c’est une espèce de purgatoire fait en ce monde.

Le second genre de terreur est avantageux, puisque David le demandait à Dieu comme une grâce: Percez ma chair de votre crainte, lui disait-il(2). C’est le Saint-Esprit même qui inspire cette terreur-là. Remarquez ces paroles: Percez ma chair. Cela ne se rapporterait-il pas à l’horreur que le bon Dieu vous a donnée de votre corps?

2° Je vois que, dans l’état où vous êtes, vous n’avez pas à vous inquiéter. A l’oraison, dites à Dieu: Mon coeur est prêt, ou bien: Allumez ma lampe. Dieu agit en nous à notre insu; laissez-le faire. Je vous ai permis de lire pendant l’oraison, parce que cela peut paraître humiliant, et l’humilité ne gâte jamais rien; les distractions ont le même avantage.

3° Je ne partage pas l’opinion de ce prêtre. Sainte Thérèse réglait toujours, le jour des morts, les indulgences qu’elle destinait aux âmes du purgatoire, et le P. de Valois avait renoncé en leur faveur à toutes celles qu’il pouvait gagner,comptant sur leur protection quand elles seraient dans le ciel.

4° Sainte Thérèse dit qu’on se fait quelquefois illusion sur le chapitre des infirmités. D’autre part, l’exemple des supérieures fait beaucoup. Il me paraîtrait plus surnaturel de faire taire la délicatesse. Je crains cependant de décider. Je ne sais quel mouvement me porte à vous engager à surmonter ce que nous appelons le vieil homme et à donner l’exemple de l’exactitude…. Je tremble en donnant cette décision… Si vous vous aperceviez au bout de deux ou trois fois que vous êtes réellement incommodée, écoutez un peu la délicatesse, mais je serais bien aise que vous fissiez quelques efforts. Ayez soin de me rendre compte du résultat.

5° La mort à soi-même est encore plus l’ouvrage de la grâce que le nôtre. Le meilleur moyen est de se dépouiller de tout ce à quoi on a de l’attachement, d’une croix, d’une image, que sais-je? d’un lien. J’ai reçu bien des grâces pour avoir renoncé à une image de deux liards. Vous savez que le coeur se prend aux petites choses. L’oraison faite sur ce sujet produit le même effet.

Je ne sais vraiment ce que je dois penser de cette décision donnée sur la quatrième question… Je prends votre trouble, mais je serai bien heureux si à ce prix vous en êtes délivrée.

Que l’amour de Dieu soit toujours avec vous! Votre tout dévoué en Notre-Seigneur.

Notes et post-scriptum
1. D'après une copie. Les points de suspension sont dans la copie.2. *Ps*. CXVIII, 120.