Vailhé, LETTRES, vol.2, p.72

• V2-072
• 0+305|CCCV
• Vailhé, LETTRES, vol.2, p.72

• 1 ACTION DE DIEU DANS L'AME
  1 CHOIX
  1 COLLEGE DE NIMES
  1 CONVERSION SPIRITUELLE
  1 CRAINTE
  1 INFIDELITE
  1 LACHETE
  1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
  1 MISERICORDE
  1 OEUVRES DE PIETE
  1 ORDRE SURNATUREL
  1 PATIENCE
  1 PENITENCES
  1 REFORME DU CARACTERE
  1 RESISTANCE A LA GRACE
  1 SOUFFRANCES DE JESUS-CHRIST
  1 VIE DE SACRIFICE
  2 CARBONNEL, MESDEMOISELLES
• A MADEMOISELLE ANAIS CARBONNEL (1).
• CARBONNEL Marie-Vincent ra
• [début de 1843.]
• 1843

Je vous remercie de votre lettre, ma chère enfant; je l’attendais et je n’ai qu’un regret, c’est de n’y avoir pas répondu sur-le-champ. J’en ai été réellement empêché; je vous conjure d’en être bien persuadée.

L’effroi que vous inspire votre nouveau genre de vie n’a rien de surprenant. On ne change pas toute son existence sans y regarder à deux fois. Dieu lui-même veut qu’on éprouve ces émotions, ces craintes, ces troubles, qui font partie du sacrifice qu’on doit lui offrir. Sous ce rapport, il faut donc bien compter que vous n’êtes pas au bout de toutes vos terreurs. Vous vous abandonnez à Dieu, dites-vous, par un sentiment de crainte, et cela vous humilie. Quel mal voyez-vous à être humiliée? Et puis, la crainte du Seigneur n’est-elle pas le commencement de la sagesse? Surnaturalisez cette crainte qui peut avoir quelque chose d’humain dans son principe, et tout ira bien.

Je n’ai jamais cru que votre activité pût beaucoup nous aider pour le genre d’oeuvre à laquelle vous voulez vous consacrer; mais n’importe. Si Dieu vous veut telle que vous êtes, pourquoi ne vous laisseriez-vous pas prendre? Vous voyez parfaitement les choses, si vous les voyez toujours à travers les souffrances de Jésus-Christ, et je ne comprends plus ce qui, à ce point de vue, pourrait vous décourager. Maintenez-vous y donc toujours et soyez sûre que, tant que vous y serez, l’oeuvre de Dieu s’accomplira en vous. Je n’ignore pas les oppositions de caractère de toutes les trois; mais qu’importe? Vous aurez à souffrir? Mais ne souffrez-vous pas depuis vingt ans? Soyez certaine que vous n’aurez dans l’avenir rien de plus que dans le passé.

Vos infidélités vous feront le plus grand bien, pourvu qu’elles ne vous découragent pas: elles vous donneront de l’indulgence pour les autres, du mépris pour vous et un plus profond sentiment que vous ne pouvez rien sans l’aide de Dieu. J’accepte (bien volontiers) de nouveau ce que j’ai accepté depuis longtemps déjà, la charge de vous immoler à Dieu. Croyez que je n’y épargnerai pas ma peine, pourvu que quelque chose de bon en doive résulter. Ne croyez pas que je me décourage. Pourquoi serais-je plus pressé que Dieu, qui connaît ses moments? Quant à vos résistances qui vous humilient si fort, elles font partie des moyens de perfection que Dieu vous donne, puisqu’elles vous fournissent l’occasion de combattre. Profitez-en pour apprendre à connaître tout le mauvais côté de votre nature et pour vous attacher davantage à celui qui veut vous réformer par les voies que lui seul connaît(2).

Adieu, ma chère enfant. Je prie pour toutes les trois du fond du coeur, et j’espère que Dieu vous tiendra compte de toutes vos tribulations.