Vailhé, LETTRES, vol.2, p.145

1 may 1844 Lavagnac, MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Des Constitutions: articles divers relatifs au voeu de pauvreté. -L’usage strict des choses nécessaires. -Des legs et des héritages. -Des études et du déplacement des religieuses. -Conseils de direction.

Informations générales
  • V2-145
  • 0+333|CCCXXXIII
  • Vailhé, LETTRES, vol.2, p.145
Informations détaillées
  • 1 ABANDON A LA MISERICORDE DE DIEU
    1 AUMONES RECUES
    1 AUTORITE RELIGIEUSE
    1 COMMUNAUTE RELIGIEUSE
    1 CONSTITUTIONS DES RELIGIEUSES DE L'ASSOMPTION
    1 HERITAGES
    1 HUMILITE
    1 MALADES
    1 MALADIES
    1 NOVICIAT
    1 PARENTE
    1 PENSIONNATS
    1 PORTEMENT DE LA CROIX PAR LE CHRETIEN
    1 PRATIQUE DE LA PAUVRETE
    1 TRAVAIL DE L'ETUDE
    1 VENERATION DE RELIQUES
    3 NIMES
  • A LA R. MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS (1).
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • le 1er mai 1844.
  • 1 may 1844
  • Lavagnac,
La lettre

J’ai reçu hier, ma chère enfant, vos articles, et puisque vous êtes pressée de les ravoir, je vais vite y répondre. Je ne puis d’abord vous dire l’espèce d’effroi que j’ai éprouvé, en voyant que plusieurs idées que je vous avais indiquées avaient été adoptées par vous pour ce qui concerne le chapitre de la pauvreté. Il me semblait que je prenais sur moi la responsabilité de tout ce que je vous disais. Il est bien différent de donner un avis ou une décision personnelle, ou bien une décision qui influera sur une communauté tout entière. Enfin, j’ai tâché de vous parler de mon mieux et il en sera ce que Dieu voudra.

Vous dites à l’article pauvreté que tout doit être en commun. Je pense que vous mettrez quelque part un article relatif au linge des malades. Vous savez que, faute d’attention, bien des maladies se prennent par là, surtout pour les poitrinaires.

Vous voulez que les maisons soient bâties simplement et pauvrement. Ne faites-vous point de distinction entre la communauté proprement dite et le pensionnat? Il y a là deux écueils: d’une part, un pensionnat trop pauvre éloigne les parents et un pensionnat somptueux dégénère bientôt en hôtel, comme cela se voit en une foule d’endroits. Et quoique je sorte un peu du sujet, à propos de pensionnat, aurez-vous des dames pensionnaires? C’est une oeuvre très bonne pour les dames, et, je crois, des plus ingrates et des plus dangereuses pour les religieuses.

L’usage strict des choses nécessaires: c’est parfait et c’est pour cela que vous feriez bien de développer un peu, car là est tout l’esprit pratique du voeu; le reste touche plus à des dispositions matérielles.

Si une soeur venait à sortir: bien entendu après sa profession.

Ce qui suit et ce qui a rapport aux aumônes, dons et à leur emploi, pourrait, ce me semble, être dit plus clairement. Qu’en pensez-vous? Il faut, sur ces articles-là, se souvenir qu’après la mort des Soeurs des parents pourraient venir chicaner. Avez-vous dans quelque chapitre indiqué qui fixerait la destination des aumônes, dons, faits sans but déterminé? Est-ce la supérieure seule, la Supérieure générale ou le Conseil? Je penche pour le Conseil, excepté le cas où une religieuse, en entrant, l’aura déterminé elle-même. Et encore alors faudra-il l’approbation de la supérieure, comme vous le dites. Vous ne dites rien des héritages qui pourraient subvenir à une religieuse. Il est vrai que ce que vous dites en général peut suffire. Mais cependant vous feriez bien de prévoir le cas. Vous parlez des legs faits à une parente. Plusieurs soeurs peuvent-elles être religieuses dans la même communauté? Aux Carmélites, on n’en tolère que deux, et j’ai un exemple touchant d’une religieuse, qui a quitté sa communauté pour venir à Nîmes, afin de faire place à une troisième soeur qui voulait entrer dans son Ordre.

L’article des études me paraît assez bon. Seulement je voudrais savoir qui fixera les classes à faire. Sera-ce la supérieure seule? Sera-ce le Conseil? Il est bien difficile que ce soit le Conseil, parce qu’il y aura là toujours quelques Soeurs des classes, et, d’autre part, la supérieure se met sur le dos une fameuse responsabilité. Qu’en pensez-vous? Quand il y aura plusieurs communautés, la Supérieure générale pourra fixer les postes avec l’aide de son Conseil. Mais pour cela il faudra que le noviciat fût sous ses yeux. Je vois pour tout cela des difficultés qu’il faut laisser résoudre au temps et qu’il vaut mieux ne pas se hâter de trancher, car ce à quoi vous devez vous appliquer surtout, c’est à disposer vos règles de manière à ce qu’elles puissent s’adapter plus tard aux éventualités que la Providence vous ménagera et que vous ne pouvez encore prévoir.

Il paraît, d’après votre lettre du 20 avril, que vous commencez à entrer un peu dans la souplesse et l’abandon. Dieu fasse que ces excellentes dispositions continuent! Je les lui demande pour vous de toute mon âme et j’espère qu’elles ne vous seront pas toujours refusées. Ne cédez jamais, croyez-moi, et puisque vous êtes venue à vous bien reprendre sur ce point, ne vous laissez plus désarçonner. Que le souvenir du passé vous tienne en toute humilité et bassesse sous la main de Dieu! Mais puisque votre coeur a besoin de dilatation, ne sophistiquez plus sur ce qui a pu arriver et bénissez Dieu de ce que vous savez, au moins, que vous ne valez pas grand chose(2).

Il est vrai, ma chère enfant, je n’ai jamais cherché qu’à vous mettre sur la croix. Mais puisque dans le temps vous ne vous êtes pas senti la force de la prendre telle que je croyais devoir vous l’offrir, ce n’est pas une raison pour vous décourager. Ce que vous n’avez pas pu autrefois, vous le pourrez plus tard.

Mais on vient chercher ma lettre pour le courrier. Il faut donc vous quitter, sans même avoir le temps de vous dire un mot de votre lettre d’hier. Adieu, ma chère fille. Que Notre-Seigneur soit à jamais votre unique tout!

Merci de votre relique.

Notes et post-scriptum
1. D'après une copie. Voir des extraits dans *Notes et Documents*, t. II, p. 446 sq.1. D'après une copie. Voir des extraits dans *Notes et Documents*, t. II, p. 446 sq.
2. Ceci doit s'entendre au sens strict de la perfection.