Vailhé, LETTRES, vol.2, p.210

20 dec 1844 Nîmes, MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Il lui offre ses souhaits et ses prières à l’occasion de sa profession perpétuelle. -Pratiques de mortification. -Pour les Constitutions, garder le plus possible les expressions qui choqueront le moins et réserver le reste pour le Directoire. -Autres points de la règle. -De la pauvreté religieuse. -Quand il eut pris les ordres, il ne vit plus clair dans son avenir, aujourd’hui l’étoile reparaît. -Nouvelles diverses.

Informations générales
  • V2-210
  • 0+364|CCCLXIV
  • Vailhé, LETTRES, vol.2, p.210
Informations détaillées
  • 1 ACTION DE DIEU
    1 ANGE GARDIEN
    1 AUSTERITE
    1 CELEBRATION DE LA MESSE PAR LE PRETRE
    1 CONCILE DE TRENTE
    1 CONGREGATION DES EVEQUES ET REGULIERS
    1 CONSTITUTIONS DES RELIGIEUSES DE L'ASSOMPTION
    1 CRECHE DE JESUS-CHRIST
    1 DEGOUTS
    1 DIRECTION SPIRITUELLE
    1 DIRECTOIRE DES RELIGIEUSES DE L'ASSOMPTION
    1 ELECTION
    1 ENFANCE SPIRITUELLE
    1 EXERCICES RELIGIEUX
    1 JOIE
    1 LIBERTE
    1 LUTTE CONTRE LE MONDE
    1 MANQUEMENTS A LA REGLE
    1 MARIE NOTRE MERE
    1 MESSE DE MINUIT
    1 MORTIFICATION
    1 NOTRE-SEIGNEUR
    1 ORAISON
    1 ORDRES SACRES
    1 PARENTE
    1 PAUVRETE DE JESUS-CHRIST
    1 PENITENCES
    1 POSTULAT
    1 PROFESSION PERPETUELLE
    1 PROVIDENCE
    1 RELIGIEUSES DE L'ASSOMPTION
    1 RESPONSABILITE
    1 SAINTE COMMUNION
    1 SOLITUDE
    1 SUPERIEURE GENERALE
    1 SUPERIEURS ECCLESIASTIQUES
    1 VOCATION RELIGIEUSE DU PERE D'ALZON
    1 VOEU DE PAUVRETE
    1 VOLONTE DE DIEU
    1 VOYAGES
    2 BEVIER, MARIE-AUGUSTINE
    2 COMMARQUE, MARIE-THERESE DE
    2 DUBOSC, MADEMOISELLE
    2 GABRIEL, JEAN-LOUIS
    2 GAUME, JEAN-ALEXIS
    2 MILLERET, MARIE-EUGENIE
    2 O'NEILL, THERESE-EMMANUEL
    2 SAINT-MARTIN, MARIE-CATHERINE
    2 THIERS, ADOLPHE
    3 MARSEILLE
  • A LA R. MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS (1).
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • le 20 décembre 1844.
  • 20 dec 1844
  • Nîmes,
La lettre

Je bénis Dieu de tout mon coeur, ma chère enfant, de ce qu’il fait pour votre oeuvre. Voilà donc que les quatre premières pierres vont être posées sur la crèche de l’Enfant-Jésus(2). Je vais, tous ces jours-ci, demander à ce cher petit Enfant de vous prendre et de vous faire grandir avec lui. Je demanderai à sa mère de le placer dans votre coeur comme dans un berceau, et, quand il y sera, ma fille, examinez bien ce qu’il aime le plus; c’est ce qu’il est lui-même un enfant. Vous deviendrez donc bien enfant pour l’amour de lui et vous prendrez la simplicité, la candeur, l’absence de toute duplicité des enfants. Vous serez bien pauvre, comme l’enfant Jésus dans la crèche. Oh! ma fille, que de choses je vois pour vous dans ce beau jour!

Je dirai à votre intention une messe, à 7 heures du matin. J’irai dire la messe de minuit aux Carmélites et, comme elles doivent me donner leurs communions, je les prendrai pour vous les donner. Si ensuite vous voulez faire part de ces petits cadeaux à vos Soeurs, libre à vous. C’est vous que j’envisage d’abord et pour qui je prierai particulièrement; mais vous ne trouverez pas mauvais que je pense à vos soeurs, dont l’oeuvre m’est si chère.

J’arrive à vos questions. Je pense que vous ne devez pas avoir grand scrupule de vos lâchetés pour la mortification, pendant qu’il faisait si froid. Nos pauvres Carmélites ont bien pris, elles aussi, des précautions. Je suis bien plus fâché de vos manquements à l’oraison, pendant un temps où il vous importait tant de prier. Qui sait si un peu plus de prières n’eût pas disposé un peu mieux l’esprit de M. Gaume?

Mon opinion bien formelle relativement à la partie de la règle, où l’on vous charge de disposer la forme, est que vous devez rester le plus possible derrière les expressions qui choqueront le moins et réserver le reste pour le Directoire, de façon toutefois que, lorsqu’il s’agira de faire approuver les articles à Rome, le Directoire puisse dans les points décisifs être placé dans la règle. Cette marche me paraît avantageuse. M. Gaume n’est pas éternel et, pourvu que votre Directoire maintienne votre esprit, le reste est peu de chose. Vous pourrez, d’ici là, vous emparer de M. Gabriel et, s’il s’attache à vous, il pourra vous être fort utile pour un voyage à Rome, dans le cas où je ne pourrais pas me charger de le faire. L’approbation sous l’autorité de l’évêque, selon le saint Concile de Trente, est une perfection.

La réélection de la supérieure tous les six ans n’est pas précisément un mal, tant que vous serez une simple communauté. Plus tard, vous pourrez faire des expériences. Je ne m’inquiète pas beaucoup de cet article.

Tous les pouvoirs que le supérieur peut avoir ne m’inquiètent pas bien précisément, parce que tout dépend du pli que vous laisserez prendre et des antécédents que vous établirez. Le recours au supérieur, etc., me paraît un peu gênant; il serait bon de mettre beaucoup d’expressions de respect et de déférence.

J’entre tout à fait dans les troubles que vous avez dû éprouver pendant cette discussion. Que voulez-vous? Dieu arrive à ses fins par les moyens qu’il sait et que nous ignorons. Les obstacles que vous avez rencontrés vous fortifieront peut-être davantage dans l’esprit que vous voulez prendre pour vous et donner à vos filles.

Ne vous tracassez point trop sur l’article pauvreté. En ce moment même, à Rome, on est un peu effrayé sur cette question. Il faut laisser passer cette terreur panique. L’esprit de pauvreté, voilà l’essentiel, et cet esprit peut se communiquer par le Directoire. Mais, à propos de Directoire, faudra-t-il que vous le montriez? Il me semble que vous pourrez le préparer lentement, silencieusement surtout, et, dès lors, vous pouvez attendre une occasion favorable de le faire approuver.

Je suis réellement bien touché de la manière dont vous me paraissez entrer en esprit de souplesse. Il paraît que vous avez eu besoin de quelque effort, mais on aperçoit une victoire généreuse. Courage, ma bonne fille! Hélas! vous vous retrouverez encore quelquefois la même après vos voeux; mais n’importe! Dieu vous aidera, si vous voulez être sienne.

J’aborde maintenant une autre question, que vous pourrez laisser de côté jusqu’après vos voeux, si vous le jugez convenable, mais dont vous pouvez aussi vous occuper sur-le-champ, si bon vous semble. Il ne s’agit que de moi. Je suis très préoccupé, depuis quelque temps, de ce qui m’est personnel dans l’ordre où la Providence peut vouloir me faire marcher. Lorsque je pris les saints ordres, il y a dix ans, je fus comme aveuglé en ce sens que je ne vis plus clair dans mon avenir. Aujourd’hui, il me paraît que l’étoile reparaît, et je crois découvrir quelque chose, vers quoi je dois marcher. Des répugnances furieuses se soulèvent parfois au fond de mon coeur, mais il me paraît que ma volonté n’y est pour rien ou pour bien peu de chose. Je suis prêt à tout. D’autre part, certaines circonstances extérieures paraissent bien disposer toutes choses pour me faciliter les moyens d’accomplir les projets que je crois ceux de Dieu. Il faut laisser Dieu agir. Pour ma part, je suis, il me semble, quoi qu’il m’en coûte, prêt à tout.

Je n’ai pas grande confiance en M. Thiers, mais il est toujours bon de savoir son opinion, si tant est qu’il la dise(3). Mlle Dubosc me paraît assez remuée. Si elle se donne à vous, ce sera tout de bon, et elle est fille, quand elle a pris un parti, à ne pas reculer. Je vais lui écrire. J’ai réclamé à Marseille les lettres que j’y ai adressées; on ne m’a pas répondu. Ne vous inquiétez point de ce que vous me dites de mon attachement aux miens; il me semble du moins que je suis encore assez maître de moi-même sur ce point. Je crois que vous pouvez absolument garder des reliquaires en argent; cependant, il est des règles où c’est positivement défendu. J’aimerais assez la suppression des boucles d’oreilles en or.

Adieu, ma chère enfant. Vous ne sauriez croire avec quelle liberté et quelle joie de coeur j’accepte la responsabilité de votre âme, tant que Dieu voudra que vous soyez mienne pour lui. Je vous accompagne dans votre solitude et je charge mon bon ange d’aider le vôtre à vous maintenir dans le recueillement, la prière et la mortification. Je vous donne liberté pour l’heure où vous accomplirez vos pénitences.

Adieu, et que Notre-Seigneur soit désormais votre tout! Il sait que vous l’aimez.

Notes et post-scriptum
1. D'après une copie. Voir des extraits dans *Les origines de l'Assomption*, t. II, p. 283, et dans *Notes et Documents*, t. II, p. 567, 603.1. D'après une copie. Voir des extraits dans *Les origines de l'Assomption*, t. II, p. 283, et dans *Notes et Documents*, t. II, p. 567, 603.
2. Le 25 décembre 1844, la Mère Marie-Eugénie de Jésus devait prononcer ses voeux perpétuels, ainsi que les Soeurs Thérèse-Emmanuel, M.-Augustine, M.-Thérèse et la Soeur M.-Catherine, converse.
3.Il était question d'obtenir de lui le plein exercice pour la maison de Nîmes.