Vailhé, LETTRES, vol.2, p.397

14 dec 1845 Nîmes, MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Quand il ne lui écrit pas, c’est qu’il est dans l’impossibilité de le faire. -Il lui recommande les quatre postulantes. -A Nîmes, c’est le *daemonium meridianum* qui agit contre elles, sans pouvoir les retenir.

Informations générales
  • V2-397
  • 0+436|CDXXXVI
  • Vailhé, LETTRES, vol.2, p.397
Informations détaillées
  • 1 ALLEMANDS
    1 COLERE
    1 CONFESSION SACRAMENTELLE
    1 DILIGENCE
    1 PAIX DE L'AME
    1 PATIENCE
    1 POSTULANT
    1 PUNITION DES ELEVES
    1 REFUGE LE
    1 VOCATION RELIGIEUSE
    2 EVERLANGE, LEON D'
    2 EVERLANGE, MARIE-EMMANUEL D'
    2 EVERLANGE, PIERRE-EMILE-LEON D'
    2 GAUME, JEAN-ALEXIS
    2 JARRAS, DOCTEUR
    2 JARRAS, MADEMOISELLE
    2 ROUX
    2 ROUX, MARIE-MARGUERITE
    3 MIDI
    3 NIMES
    3 PARIS, EGLISE NOTRE-DAME DES VICTOIRES
  • A LA R. MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS (1).
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • le 14 décembre 1845.
  • 14 dec 1845
  • Nîmes,
La lettre

Vous êtes disposée à m’en vouloir, ma chère enfant, parce que je ne vous ai pas écrit assez tôt l’autre jour. Je voudrais que vous fussiez bien convaincue que je suis dans l’impossibilité absolue de le faire, quand je retarde plus que je ne semblerais le devoir. Hier et aujourd’hui, par exemple, je me suis trouvé si souvent dérangé qu’avec la meilleure volonté je n’ai pu prendre avant ce moment-ci un instant pour vous adresser quelques mots. Hier, ce fut le Refuge et les confessions. Aujourd’hui, ne devant dire la messe qu’à 7 heures, je comptais, depuis hier, vous donner depuis 6 heures ma première pensée après Dieu. Mais non; cinq ou six personnes ont eu à se confesser. Il a fallu les entendre, et l’heure s’est écoulée. Depuis, je suis à gronder des élèves, à les faire pleurer, à obtenir des renseignements, à faire des menaces, à exiger des promesses. A quoi tout cela aboutira-t-il? J’espère à quelque chose de bien. Mais il faut une fameuse dose de patience, que je n’ai pas toujours, pour répondre à tous et pour continuer à posséder son âme en paix. Jugez si c’est un bonheur pour moi de venir reposer quelquefois ma pauvre nature en vous écrivant, et si c’est mauvaise volonté, si je n’ai pas recours à ce moyen d’apaisement de coeur, aussi souvent que je le voudrais.

Nos filles partent ce soir. C’est à 10 h. moins 1/4 qu’il faut les envoyer prendre. Je tâcherai de leur remettre encore pour vous un paquet; mais je veux que celui-ci parte aujourd’hui, afin que vous soyez assez bonne pour les envoyer prendre. Mlle d’Everlange ne vous a pas écrit, parce qu’elle était absente de Nîmes quand vous me demandâtes de voir l’écriture de vos futures filles. Je crois que vous trouverez ma pauvre Elisa une tige un peu délicate, mais sur laquelle on peut cueillir de belles fleurs et de beaux fruits, en la prenant du côté du coeur.

Ai-je besoin de vous recommander ces pauvres enfants? On ressemblerait assez à quelqu’un qui dirait à une mère: « Au moins, ayez bien soin de Monsieur votre fils. » Je crains quelquefois que notre genre méridional n’effraye un peu votre raison allemande, j’allais dire tudesque. Mais non, les lettres que vous leur avez adressées sont parfaites; elles en sont ravies, et si M. Gaume ne demandait jamais rien de plus inopportun, je serais toujours de son avis. Mlle Roux consent à ce que vous lui donniez le nom de Soeur ajoutée, pourvu qu’à ce nom vous ajoutiez celui de sainte. C’est la seule chose dont elle veut, dit-elle, conserver l’envie. Si ses dispositions durent, vous en serez contente.

Les scènes auxquelles ces pauvres enfants sont ici exposées ne sont pas croyables. C’est la fureur méridionale dans tous ses emportements, le vrai daemonium meridianum. Vous vous rappelez d’avoir vu Mlle Jarras(2). Son père, croyant que sa fille pourrait bien être du complot, est allé trouver M. Roux et s’est livré à l’accès de colère le plus violent. Le frère de Mlle d’Everlange, tout prêtre qu’il est, lui a fait subir pendant quinze jours mort et passion. Quant au second qui est chez moi, il le prend plus philosophiquement: « Puisqu’elle veut partir, dit il, bon voyage! Et si elle est renvoyée elle n’aura que ce qu’elle sera allée chercher. Je m’en console. » Comment trouvez-vous cette tendresse? Du reste, si la joie est une marque de vocation, les pauvres enfants l’ont bonne.

Mais il me faut arrêter, puisque je veux faire partir cette lettre avant midi. Je vous écrirai plus longuement tout à l’heure. Ainsi, jeudi soir, à 10 h. moins 1/4, veuillez les faire attendre à la diligence de Notre-Dame des Victoires.

Notes et post-scriptum
1. D'après une copie. Voir des extraits dans *Les origines de l'Assomption*, t. II p. 386 sq., et dans *Notes et Documents*, t. III, p. 294 sq.1. D'après une copie. Voir des extraits dans *Les origines de l'Assomption*, t. II p. 386 sq., et dans *Notes et Documents*, t. III, p. 294 sq.
2. Fille d'un médecin très dévoué aux oeuvres.