- V3-127
- 0+485|CDLXXXV
- Vailhé, LETTRES, vol.3, p.127
- 1 AMITIE
1 AUMONIERS SCOLAIRES
1 BATIMENTS DES COLLEGES
1 CHAPELLE
1 CONVERSION SPIRITUELLE
1 JOIE
1 NATIVITE DE MARIE
1 NOVICIAT
1 PAIX
1 PENITENCES
1 REGLE DE SAINT-AUGUSTIN
1 SALUT DES AMES
1 VOEU D'OBEISSANCE
1 VOEUX PRIVES DU PERE D'ALZON
2 AFFRE, DENIS
2 CARBONNEL, MESDEMOISELLES
2 CART, JEAN-FRANCOIS
2 MICHEL, ERNEST
3 FRANCE
3 MIDI
3 NORD
3 PARIS
3 PARIS, COLLEGE STANISLAS - A LA R. MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS (1).
- MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
- le 8 septembre 1846.
- 8 sep 1846
- Lavagnac,
J’avais réservé pour vous ma chère enfant, toute cette matinée: elle m’a été prise par un nouveau maître, dont je compte faire un sujet précieux. Il est venu me voir et vous savez qu’il n’est pas facile de se débarrasser des gens à la campagne, et puis, il faut bien avoir quelques sacrifices à faire à Dieu. Et pourtant, je n’aurais pas voulu passer cette journée sans vous dire quelque chose.
Depuis plusieurs jours, je me préparais à cette fête, et, comme je vous le disais, je crois, dans ma dernière lettre, j’aurais voulu qu’elle fût pour moi comme une seconde naissance. C’était la pensée qui me frappait le plus. Or, pour me mettre à même de bien entrer dans le mystère de la naissance de Marie, j’ai passé, tous ces jours-ci, plusieurs heures à réfléchir. Les choses qui m’ont le plus frappé sont la nécessité d’un dévouement sans bornes, d’une grande délicatesse de conscience, et puis un grand remords de ne vous avoir pas assez poussée au bien. Aussi, ma chère enfant, je tiens à vous en demander pardon, et, si je ne le fais pas à genoux, c’est parce que la règle de saint Augustin le défend. Je voulais vous proposer de jeûner pendant un mois et quelques autres petites pratiques pour réparer, autant que je le pourrai, ma négligence à votre égard; mais j’ai pensé que la détermination à laquelle je me sentais poussé était préférable. Ce matin, à la messe, j’ai renouvelé les voeux que vous savez que j’ai faits. J’en ai fait un de plus, celui de me dévouer entièrement à votre perfection. J’avais hésité, il y a quelque temps, à le faire. Il me semblait que les liens d’un voeu gênaient les libres allures de l’affection, mais il m’a paru que la charité s’alimentait de tout ce qu’il y a de meilleur. Vous voyez, ma chère enfant, que me voilà engagé envers vous, autant que vous pourriez le vouloir, car si vous m’êtes liée par votre obéissance, je vous suis lié par tout ce qui vous rapprochera de Dieu et de notre divin Maître. Vous dirai-je que je l’ai prononcé avec une plénitude de forte amitié et de joie, qui vient de cette paix de Dieu, laquelle dépasse tout sentiment(2)? Voilà ce que j’ai ressenti.
Quant à ce qui me concerne, il me semble que je me suis bien franchement donné, mais, en même temps que je me donnais, il me semblait que je devais demander beaucoup à Notre-Seigneur, et il me paraît que ce n’est pas de l’égoïsme, car je ne veux rien lui demander que je ne sois disposé à lui rendre. Mais il me faudrait plus de tranquillité d’esprit que je n’en ai dans ce moment, ayant à côté de moi quelqu’un qui lit, feuillette, se tourne et se retourne. Aussi, à un autre jour cette question. Seulement, si je ne vous l’ai pas encore dit, cette fête de la Nativité est pour moi comme le commencement d’un nouveau noviciat, où je veux entrer sans marchander et sans rien refuser à Notre-Seigneur de ce qu’il pourra me demander. Or, sur cela, ma chère fille, je vous adresse la prière de me venir en aide. Si votre âme est pour moi celle que je dois cultiver entre toutes les autres, ayez un peu pitié de moi et aidez-moi, en me forçant à correspondre à tout ce que Notre-Seigneur peut réclamer de moi.
Je me figure que la transformation, que je dois subir, me prendra bien près de trois ans; et voilà ma grande raison pour ne pas venir encore à Paris. Il me semble qu’ici j’aurai plus de paix et de calme pour me renouveler.
Je vais répondre à votre lettre. Je n’ai rien à vous dire sur Monseigneur; vous l’avez vu, c’est bien. Quant au soldat, vous ne m’encouragez pas trop à le prendre, à moins que ce ne fût pour les tout petits enfants, à qui il servirait de maître d’étude: il lui serait moins pénible de dépendre des dames Carbonnel. Pensez-vous, d’après ce que vous en voyez, qu’il pût nous aller pour cela? Je voulais en faire un dépensier et, par conséquent, le mettre un peu au-dessus des autres domestiques. Qu’en pensez-vous?
Veuillez remercier M. Michel de son plan, mais je crois qu’il ne répond pas trop à notre but. Que ces observations soient pour vous seule, si vous le jugez à propos, mais il me semble: 1° que, dans notre plan, la chapelle doit faire centre; 2° que le bâtiment des religieux doit être séparé plus qu’il ne le serait selon M. Michel; 3° qu’en mettant le cabinet du supérieur au bas de l’escalier de l’infirmerie et de la lingerie, il aurait l’oeil à tout; 4° que le logement de l’aumônier n’a plus d’importance dans une corporation comme la nôtre; 5° que la maison pénitentiaire, si on en fait une, doit faire corps à part; 6° qu’au lieu de trois cours j’en voudrais cinq ou six, mais séparées uniquement par des haies, parce que je veux des divisions de cinquante au plus(3). Nos Messieurs ne les voudraient que de trente, au moins pour les récréations. Si le passage sous le choeur n’allait pas, on pourrait en pratiquer un sous le long du réfectoire, donnant soit sur la cour intérieure, soit sur le jardin, et, dans ce cas, ce serait le lieu de récréation des maîtres, les jours de pluie. Par ce moyen, les lieux réguliers seraient toujours silencieux. Il faut partir de l’idée que le Midi de la France a beaucoup plus de lumière que le Nord et que cette galerie ne rendrait pas le réfectoire obscur; au contraire, il servirait à le rendre plus frais. Jamais je n’ai songé à assigner le préau du cloître des élèves comme cour de récréation. Je voudrais y planter des arbres, de telle sorte qu’en haut ils pussent donner de l’ombre, sans empêcher de voir au travers d’une arcade à l’autre.
Je crois qu’il ne faut ni rechercher ni éloigner l’affaire de Stanislas. Je verrais quelque chose de mieux à faire avec l’archevêque, mais ceci veut bien des réflexions et des prières.
Adieu, ma chère fille. De grâce, comptez sur moi. Il me semble que j’ai quelque droit à vous le demander. Mille fois tout vôtre en Notre-Seigneur.
3. Ce plan de collège qui revient fréquemment dans les lettres, selon les architectes à qui l'on avait recours, ne fut jamais réalisé; on se contenta d'améliorer ce qui existait.2. *Phil*. IV, 7.