Vailhé, LETTRES, vol.3, p.385

11 nov 1848 Nîmes, GABRIEL Abbé

Il le voudrait voir appuyer la demande de plein exercice qu’il a adressée à Buchez. -Raisons à faire valoir pour l’obtenir. -Il espère que l’archevêque de Paris parlera en sa faveur, ainsi que Buchez. -Compliments pour sa nomination de chanoine.

Informations générales
  • V3-385
  • 0+591|DXCI
  • Vailhé, LETTRES, vol.3, p.385
Informations détaillées
  • 1 AMITIE
    1 CHEMIN DE FER
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 COLLEGE ROYAL
    1 ELEVES
    1 PLEIN EXERCICE
    1 POLITIQUE
    1 PROTESTANTISME
    1 RECONNAISSANCE
    1 REPUBLICAINS
    2 BUCHEZ, PHILIPPE
    2 GIRARD, FERDINAND
    2 LA FARELLE, FELIX DE
    2 MILLERET, MARIE-EUGENIE
    2 SIBOUR, MARIE-DOMINIQUE
    3 ABOUKIR
    3 BOUCHES-DU-RHONE
    3 FRANCE
    3 HERAULT, DEPARTEMENT
    3 NIMES
    3 VAUCLUSE
  • A MONSIEUR L'ABBE GABRIEL (1).
  • GABRIEL Abbé
  • le 11 novembre 1848.
  • 11 nov 1848
  • Nîmes,
La lettre

J’avais prié Madame la supérieure de l’Assomption de prendre quelques renseignements pour savoir s’il ne serait pas possible d’obtenir le plein exercice pour ma maison. Elle me répond que, plus que personne, vous pouvez par vos connaissances me donner un bon coup de main. Je viens donc faire un appel à votre bonne amitié et vous conjurer de profiter du moment présent, qui peut-être ne se reproduira plus. Il y a quelques jours déjà, j’ai adressé à M. Buchez une demande en forme, afin qu’il la présentât lui-même au ministre. J’ai pensé que, plus que nos députés, il pourrait enlever cette concession que je sollicite depuis si longtemps. Mais comme vous avez besoin de raisons à faire valoir, voici ce que je puis vous dire.

1° La maison est depuis quatre ans sous ma direction. Le nombre de ses sujets est allé toujours croissant(2). La maison compte environ 125 pensionnaires, quelques externes jusqu’à la huitième seulement, sauf les fils des professeurs. Il y a en tout 31 maîtres, 5 surveillants, un surveillant général et un préfet de discipline. Tous les professeurs sont au moins bacheliers. J’en ai 4 licenciés, dont 2 agrégés de l’Université. J’ai 2 professeurs d’histoire et 2 de mathématiques, 2 préfets d’études qui inspectent sans cesse les classes et dirigent les travaux des professeurs. Les quatre principales langues vivantes sont enseignées chez nous.

Je ne fais aucune concurrence au collège pour les élèves; j’en ai peu de Nîmes, ils viennent surtout de l’Hérault, de Vaucluse et des Bouches-du-Rhône. L’avantage pour moi d’être à Nîmes c’est que les chemins de fer en ont fait un point central. Le prix de la pension et de l’externat est, du reste, beaucoup plus élevé qu’au collège. La seule concurrence que nous lui fassions, c’est sous le rapport des moeurs: concurrence utile, car, depuis que nous subsistons, l’état moral du lycée s’est notablement amélioré.

Nous ne faisons pas de politique. Pourtant, on nous accuse d’être républicains; nous avons à cause de ce bruit perdu quelques élèves; la République devrait bien nous les rendre en nous accordant le plein exercice. Enfin, on a dit que nous suscitions des divisions entre catholiques et protestants. Ce reproche, fait il y a quatre ans, a été réfuté par l’ancien maire, M. Girard, un des chefs du protestantisme, et j’ai été appuyé surtout par M. de la Farelle, ancien député et protestant.

Il me paraît donc qu’il suffit d’un peu de bonne volonté pour enlever cette demande, et je compte sur votre zèle, votre influence et votre prudence.

Grâces a Dieu, ma maison est (cette année) très bien composée, et j’espère bien en tirer un bon parti. Je pense que si votre archevêque, à qui je vous prie d’offrir mes humbles et tendres respects, veut parler pour moi, il pourra beaucoup et je pense bien qu’il le voudra.

Si vous avez à vous entendre avec Buchez, veuillez lui dire toute ma reconnaissance pour un pareil service. Il serait, en effet, impossible de donner quelque stabilité à cette maison si le plein exercice n’est pas accordé. Je doute qu’il y ait beaucoup de maisons en France qui en jouissent et qui offrent autant de garanties que la mienne. Ainsi, cher abbé, agissez, parlez, pressez et écrivez-moi bientôt que vous avez obtenu ce que vous avez demandé pour moi. Surtout pas de lenteurs, parce qu’elles pourraient bien nous être fatales.

Adieu, cher ami. Voilà une lettre bien intéressée, mais vous verrez pourtant qu’il n’y a que vous à qui je puisse écrire ainsi. Il faut bien un peu compter sur l’amitié des gens pour leur imposer des commissions, comme je le fais en ce moment. Adieu, cher saint homme. Veuillez offrir mes souvenirs à votre supérieure. J’oubliais de vous faire mon compliment sur votre nomination au canonicat. Il vous fallait cela de toute justice.

Adieu. On m’appelle. Je n’ai pas le temps de me relire. Tout à vous.

E. d'Alzon.
Notes et post-scriptum
1. Reproduite dans *Notes et Documents*, t. IV, p. 323-325.1. Reproduite dans *Notes et Documents*, t. IV, p. 323-325.
2. Le manuscrit porte: "Son sujet est allé toujours croissant."